Obama veut connaître "clairement" les intentions russes en Syrie

WASHINGTON (Reuters) - Barack Obama, lorsqu'il rencontrera lundi Vladimir Poutine, voudra savoir en quoi la présence militaire russe en Syrie contribuera à la défaite de l'Etat islamique, a déclaré jeudi une conseillère de la Maison blanche. Les présidents américain et russe doivent se rencontrer en tête à tête lundi en marge de l'Assemblée générale des Nations unies à New York. La rencontre, qui pourrait durer entre cinquante minutes et une heure selon Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin, devrait avoir lieu après le discours de Poutine devant l'Assemblée générale. Les prises de parole des deux présidents sont prévues dans la matinée, heure de New York. "Il est temps pour la Russie d'expliquer clairement ce qu'elle propose exactement pour contribuer de manière constructive à ce qui est déjà une coalition multinationale constituée (contre l'EI)", a dit Celeste Wallander, directrice des affaires russes au conseil de sécurité nationale. L'argument de Moscou selon lequel un renforcement de la présence militaire russe dans la région permettra de contrer les djihadistes de l'Etat islamique "ne tient pas vraiment debout", a-t-elle ajouté. Barack Obama compte également rappeler Vladimir Poutine à ses engagements en Ukraine, la Russie ayant promis en février de retirer ses militaires d'Ukraine d'ici la fin de l'année, a-t-elle ajouté. "Le président Obama saisira l'occasion de cette rencontre pour discuter de l'Ukraine et s'assurer que Moscou respecte les engagements de Minsk. Ce sera le message essentiel de cette entrevue bilatérale", a souligné un haut responsable de l'administration américaine. ASSAD EST UN "PARI PERDANT" Cette rencontre intervient alors que Moscou a affirmé mercredi que les Etats-Unis se montraient de plus en plus réceptifs à ses vues sur le conflit syrien, présentation contestée à Washington. "Notre position n'a en rien changé, pas plus que nos inquiétudes face aux menées de la Russie en Syrie", a déclaré le porte-parole du département américain d'Etat, John Kirby. La présidence russe fait savoir que la situation en Syrie occupera une place prioritaire dans cette entrevue et que la situation en Ukraine sera évoquée "si le temps le permet". "Il y aura du temps", a rétorqué, côté américain, le porte-parole de la Maison blanche, Josh Earnest, indiquant même que l'Ukraine serait le principal sujet de discussions entre les deux dirigeants et que le dossier syrien ne sera pas "le sujet le plus pressant" pour Obama lorsque l'entretien débutera. Obama dira néanmoins clairement à son homologue que le soutien de la Russie au président Bachar al Assad est un "pari perdant", a dit Josh Earnest devant la presse. Moscou et Washington divergent également sur le calage de cette rencontre: le Kremlin évoque une organisation "par accord mutuel" quand la Maison blanche précise qu'elle aura lieu à la demande de la partie russe. "PAS ÉVIDENT QUE DES INTÉRÊTS SE RECOUPENT" Le secrétaire américain à la Défense, Ash Carter, a indiqué qu'"il (était) possible mais pas encore évident que des intérêts américains et russes se recoupent sur le dossier syrien". "Chercher à vaincre l'EI sans chercher dans le même temps une transition politique, c'est alimenter justement l'extrémisme qui sous-tend l'EI", a estimé le chef du Pentagone, qui a rencontré la semaine dernière son homologue russe de la Défense Sergueï Choïgou. La diplomatie russe s'active sur le front syrien depuis cet été et le président russe, qui ne s'est plus rendu aux Etats-Unis depuis huit ans, devrait insister lors de ses contacts à New York sur le rôle, à ses yeux indispensable, de Bachar al Assad dans la lutte contre l'EI. Moscou, allié indéfectible du régime syrien, a parallèlement renforcé sa présence militaire en Syrie, envoyant des conseillers militaires, des avions, des blindés, des pièces d'artillerie et des hélicoptères qui pourraient à terme être un atout diplomatique dans son jeu mais inquiètent les Occidentaux. Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a ainsi jugé jeudi que ce renforcement était "préoccupant". D'après l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), les forces gouvernementales syriennes ont utilisé jeudi des appareils fournis par la Russie pour bombarder des positions de l'Etat islamique dans la province d'Alep dans le nord de la Syrie. Détaillant le programme d'Obama à l'Onu, Celeste Wallander a déclaré que le président américain pourrait s'entretenir avec son homologue cubain Raul Castro mais qu'aucune rencontre n'était prévue avec le président iranien Hassan Rohani, en dépit de l'accord conclu le 14 juillet dernier sur le programme nucléaire de Téhéran. (Julia Edwards, Roberta Rampton, Phil Stewart, Yeganeh Torbati; Pierre Sérisier, Henri-Pierre André et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)