Témoignages, rapport accablant... Ce que l'on sait des nouvelles accusations visant l'Abbé Pierre

Après un premier rapport publié il y a sept semaines, c'est une nouvelle onde de choc. Le cabinet spécialisé Egaé, chargé en juillet par Emmaüs et la Fondation Abbé-Pierre de recueillir de potentiels nouveaux témoignages, a publié ce vendredi 6 septembre un rapport de 26 pages révélant de nouvelles accusations de violences sexuelles visant l'Abbé Pierre.

"À ce jour, il est possible d'identifier au moins 17 personnes supplémentaires ayant subi des violences" de la part du religieux, est-il écrit dans ce nouveau rapport. Les faits dénoncés s'étalent sur une période allant des années 1950 à la fin des années 1990. BFMTV.com fait le point sur ces nouvelles accusations.

• 17 nouveaux témoignages

Dix-sept personnes supplémentaires disent donc avoir subi des violences de la part du religieux, et font dans leur grande majorité état de contacts "non sollicités sur les seins", de "baisers forcés", mais également de "contacts sexuels répétés sur une personne vulnérable", d'"actes répétés de pénétration sexuelle" ou encore de "contacts sexuels sur une enfant".

Les faits dénoncés se seraient déroulés en France, mais également aux États-Unis, au Maroc ou encore en Suisse. Les personnes qui ont témoigné sont ou ont été bénévoles d'Emmaüs, salariées de lieux dans lesquels a séjourné l'Abbé Pierre, membres de familles proches du prêtre ou encore des personnes rencontrées lors d'événements publics, précise Egaé.

• Accusations de harcèlement sexuel, agressions et viols

Parmi les témoignages, une jeune femme de 20 ans qui assure avoir été embrassée de force par l'Abbé Pierre, lors d'un événement à Paris, en 1999. Il avait alors 87 ans. Une jeune fille a quant à elle relaté avoir subi des agressions sexuelles et été victime de harcèlement sexuel alors qu'elle était âgée de 8 et 9 ans, en 1974 et 1975 à Paris. Elle était accompagnée par son beau-père, auteur d'inceste.

En 1989, une femme a raconté avoir été forcée par le prêtre à lui pratiquer des fellations dans un appartement parisien. Il l'aurait également fouettée avec une ceinture. En 2006, alors que l'Abbé Pierre était hospitalisé dans la capitale, une infirmière a expliqué qu'il lui avait touché les seins. Quand elle s'en est ouvert à ses collègues, deux autres lui ont confié avoir subi des agressions semblables.

La famille d'une autre femme, décédée aujourd'hui, rapporte qu'elle avait été "forcée de masturber" l'Abbé Pierre à Rabat, au Maroc, en 1956. Selon un autre témoignage, l'Abbé Pierre aurait également imposé, en 1951, des contacts physiques non sollicités lorsqu'il était député à l'Assemblée nationale.

"Certaines parlaient pour la première fois de ce qui leur était arrivé et revivaient les faits en même temps qu'elles les racontaient", a déclaré à l'AFP Caroline De Haas, directrice associée d'Egaé.

• Une première salve de révélations en juillet

Déclenchée le 17 juillet, une première vague de témoignages visant l'Abbé Pierre, icône et défenseur inlassable des sans-abri et des mal-logés, avait provoqué une onde de choc en France. Dans cette enquête de huit pages commandée par Emmaüs et la Fondation Abbé-Pierre, sept femmes avaient témoigné d'agressions sexuelles, de propos sexistes et de sollicitations.

En juin 2023, une première femme avait pris contact avec les responsables d'Emmaüs France assurant avoir subi de la part de l'Abbé Pierre d'agressions sexuelles à la fin des années 70 et au début des années 80. Alors qu'elle était mineure, elle a raconté que l'Abbé Pierre, de 50 ans son aîné, lui avait touché la poitrine à plusieurs reprises alors qu'il est invité dans la maison familiale.

Les faits évoqués les plus anciens remontaient à 1970, les plus récents dataient de 2005, l'Abbé Pierre était alors âgé de 92 ans.

• La Fondation Abbé-Pierre change de nom, le lieu de mémoire dédié au prêtre fermé

Dans un communiqué commun, la Fondation Abbé-Pierre, Emmaüs France et Emmaüs International réaffirment leur "soutien total aux victimes", saluent "leur courage" et assurent être "à leurs côtés".

Après cette salve de nouveaux témoignages, la Fondation Abbé-Pierre a par ailleurs annoncé sa décision de changer de nom. Emmaüs a en outre fait savoir que le lieu de mémoire dédié au prêtre situé à Esteville, en Seine-Maritime, serait définitivement fermé. La mention "fondateur Abbé Pierre" du logo d'Emmaüs France pourrait également être prochainement supprimée.

Une commission indépendante chargée "d'expliquer les dysfonctionnements qui ont permis à l'Abbé Pierre d'agir comme il l'a fait pendant plus de 50 ans" va aussi être créée.

Selon le cabinet Egaé, ce nouveau rapport est un "point d'étape". Ce qui laisse entendre que d'autres témoignages pourraient encore surgir.

Article original publié sur BFMTV.com