Le Nouveau Front populaire face au défi de maintenir son unité

La secrétaire nationale des Ecologistes Marine Tondelier (d) à côté de Lucie Castets, choisie par le Nouveau Front populaire pour postuler à Matignon, à Lille, le 27 juillet 2024 (FRANCOIS LO PRESTI)
La secrétaire nationale des Ecologistes Marine Tondelier (d) à côté de Lucie Castets, choisie par le Nouveau Front populaire pour postuler à Matignon, à Lille, le 27 juillet 2024 (FRANCOIS LO PRESTI)

Un débat polyphonique entre chefs de parti, François Ruffin sifflé et applaudi, Jean-Luc Mélenchon tentant l'apaisement: les responsables du Nouveau Front populaire ont tenté samedi de colmater les fissures d'une alliance de gauche mise à rude épreuve, à l'occasion de la Fête de l'Humanité à Brétigny-sur-Orge (Essonne).

En début d'après-midi, devant une agora pleine à craquer, les chefs du PS, de LFI, des Ecologistes et du PCF ont insisté sur l'importance de conserver cette union, clé du succès des législatives anticipées, et peut-être de l'élection présidentielle.

"Évidemment qu'il faudra une candidature unique en 2027", a affirmé la patronne des Ecologistes, Marine Tondelier. A sa suite le socialiste Olivier Faure a indiqué qu'il plaiderait "jusqu'à la fin pour que nous puissions cultiver cette unité, nous retrouver pour l'emporter en 2027".

"Nous devons rester unis", a lui aussi affirmé le secrétaire national du PCF Fabien Roussel, tout en reconnaissant "des différences et des nuances" entre les partenaires du NFP.

- "Désaccord moral" -

Parmi elles, l'attitude vis-à-vis de la procédure de destitution portée par La France insoumise, et dont la recevabilité sera examinée mardi par le bureau de l'Assemblée, où la gauche est majoritaire, avec 12 membres du NFP sur 22, dont trois socialistes.

Lors d'un meeting au stand de LFI, son chef de file Jean-Luc Mélenchon a demandé aux socialistes "d'accepter de transmettre" la motion à la commission des lois.

Mais l'ancien président socialiste et député François Hollande a lui indiqué au journal Sud Ouest qu'il ne s'associerait "d'aucune façon" à une procédure qui "vise à remettre en cause nos institutions", recommandant de "ne pas (y) donner suite".

Autre sujet de discorde, qui a opposé toute la semaine M. Mélenchon au député de la Somme François Ruffin, et qui s'est largement invité à la Fête de l'Huma: la question de la conquête de l'électorat populaire.

Le coordinateur des Insoumis Manuel Bompard a longuement défendu la "stratégie" de son parti visant à s'adresser prioritairement aux électeurs des quartiers populaires et à la jeunesse, et balayé les accusations de François Ruffin, selon lequel LFI oublie ce faisant une partie de la population française.

Au cours d'un autre débat, M. Ruffin a assumé sous les sifflets et quelques applaudissements un "désaccord moral et électoral profond" avec M. Mélenchon et LFI sur le sujet.

"Quand Jean-Luc Mélenchon dit qu'il faut tout faire pour la jeunesse et les quartiers populaires, et laisser tomber le reste, qui est d'accord avec cette ligne-là ?", a-t-il interrogé, tout en faisant part de son "affection" pour M. Mélenchon.

Lors de son meeting, ce dernier a tenté l'apaisement: "Oui (...) nous essayons d'amener massivement le peuple ouvrier des quartiers au vote. (...) Venez avec nous! Ou bien, s'il y a des populations qui vous sont plus familières, des centres-villes qui vous sont plus accueillants qu'à nous, eh bien (...) convainquez-les de venir".

Et, conciliant, il a appelé à ce qu'on "dédramatise la discussion à l'intérieur de la gauche": "tout n'est pas une obligation de se mettre des gifles", a-t-il dit.

- "Pop-corn" -

Marine Tondelier a elle appelé chacun à ne plus "se donne(r) en spectacle", car pendant ce temps "les autres mangent du pop-corn".

Après l'échec de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), qui a éclaté suite aux nombreuses dissensions notamment liées au refus des Insoumis de qualifier le Hamas de terroriste après l'attaque du 7 octobre en Israël, le risque est réel de voir les querelles reprendre le dessus.

A l'Assemblée, les 193 députés du NFP pourraient se diviser sur une proposition de loi du RN visant à abroger la réforme phare de la présidence Macron repoussant l'âge de départ en retraite à 64 ans.

Le PCF laisse entendre qu'il pourrait voter le texte, les autres groupes se montrant plus réticents à voter une proposition émanant du RN.

Même vis-à-vis du Premier ministre Michel Barnier, les quatre partis n'ont pas choisi la même attitude: le PCF ira le voir mardi, les Ecologistes après la composition du gouvernement, les socialistes après son discours de politique générale, et les Insoumis refusent de le rencontrer.

Ils déposeront toutefois ensemble une motion de censure contre le nouveau locataire de Matignon, pour "dire ensemble qu'on refuse le coup de force d'Emmanuel Macron", selon l'Insoumis Paul Vannier.

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