Nicky Larson, Crying Freeman… pourquoi les adaptations françaises de mangas sont plus réussies que les américaines ?

Comment expliquer que les adaptations françaises de mangas japonais soient plus réussies que les américaines ?

C’est un fait : la plupart des adaptations occidentales (Europe + Etats-Unis) de mangas japonais sont des plantages indignes de l’oeuvre d’origine. Triste symbole de cette tendance, Dragonball Evolution (noté 0,9/5 par les spectateurs d’AlloCiné), ou encore le Death Note d’Adam Wingard (1,5). Pourtant, ce constat semble s’inverser lorsque nous nous intéressons aux adaptations françaises : Crying Freeman de Christophe Gans (3,3/5) et le récent Nicky Larson et le Parfum de Cupidon de Philippe Lacheau (4,2). Comment expliquer cet écart ?

Tout d’abord, il y a une raison culturelle à cela. En France, les anime japonais ont débarqué sur nos antennes dès la fin des années 70 (le public américain ne les découvrira que vingt ans plus tard), berçant ainsi la jeunesse de plusieurs générations de téléspectateurs, à commencer par celles de Gans et Lacheau. Ce qui explique sans doute pourquoi ces deux cinéastes ont décidé de porter ces mangas à l’écran dans le respect le plus total des œuvres originales.

Par exemple, lorsqu’il a souhaité réaliser Nicky Larson, Philippe Lacheau a pris le risque d’écrire un script sans posséder les droits du manga, puis s’est déplacé jusqu’à Tokyo pour en faire lire une version traduite à l’auteur Tsukasa Hōjō qui, séduit par cette histoire, lui a permis de faire le film. Et c’est justement cet amour pour le manga qui a sauté aux yeux des fans lorsqu’ils ont découvert le long métrage, malgré les a priori négatifs suscités par la bande-annonce.

A l’inverse, le processus d’adaptation aux États-Unis est différent. En général, les films ne sont pas réalisés par des fans mais par des cinéastes de second plan, permettant ainsi aux studios de contrôler la direction du film sans se heurter à la vision artistique d’un réalisateur de renom. Car l’argument marketing prédomine avant le respect d’une œuvre originale, qui n’aura de toute façon été lue que par une infime partie du public.

Nicky Larson : une suite est-elle possible ?

Une autre raison que l’on pourrait évoquer est celle du budget. En toute logique, au plus un film coûtera cher à produire, au plus il sera difficile de le rentabiliser, et par conséquent l'aspect mercantile prendra le pas sur l’artistique : une star bankable sera ainsi choisie quand bien même elle ne convient pas au rôle, le montage final sera tous publics – et tant pis si le manga était violent etc...

En France, avec des budgets plus modestes, Christophe Gans et Philippe Lacheau se sont libérés de toute contrainte financière en empreignant de leur style l’oeuvre qu’ils adaptaient. Avec des contraintes économiques de cet ordre, la créativité a en outre tendance à se débrider et c’est ainsi que naissent d’intéressantes idées de mise en scène, à l’instar par exemple de la bagarre en vue subjective dans Nicky Larson et le Parfum de Cupidon.

Faut-il pour autant désespérer qu’un jour les adaptations US gagnent en qualité et ravissent les fans de mangas ? Bien évidemment que non, d’autant que l’appétence du public américain pour ces œuvres ne cesse de grandir, y compris pour leurs adaptations animées (en témoigne l’important succès rencontré par le film Dragon Ball Super: Broly aux Etats-Unis).

Tout laisse donc à penser qu’au cours des prochaines années, les adaptations seront de meilleure facture, à condition bien sûr que les moyens à disposition des cinéastes (qu'on espère fans de mangas) se mettront davantage au service de l’aspect artistique de ces films. De nombreux projets étant actuellement développés – tant au cinéma qu’à la télévision – il ne nous reste donc plus qu'à croiser les doigts pour que des changements s'opèrent...

D'ailleurs avec une moyenne de 4,4 étoiles (875 votes)*, Alita: Battle Angel, adaptation du manga Gunnm développée pendant plus d'une décennie par James Cameron (producteur du film), semble confirmer cette tendance optimiste...

* total relevé le vendredi 15 février 2019 en fin d'après-midi