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Ni pro-européen, ni pro-russe, le programme "pro-citoyens" de la Première ministre de la Moldavie

Natalia Gavrilița, Première ministre de la Moldavie, dirige un nouveau gouvernement tourné vers les pays occidentaux. La Moldavie est en proie à l'instabilité, à la corruption et à une pauvreté croissante depuis de nombreuses années. Aujourd'hui, Natalia Gavrilița a pour objectif de réformer le pays et de le rapprocher de l'Union européenne. Nous l'avons interviewée à l'occasion de son premier déplacement à Bruxelles.

Sándor Zsiros, euronews :

"Ce n'est peut-être pas un hasard si vous avez choisi Bruxelles pour votre premier voyage à l'étranger depuis votre nomination. Quel message voulez-vous faire passer à l'Union européenne ?"

Natalia Gavrilița, Première ministre de Moldavie :

"Notre message, c'est que la Moldavie fait preuve d'une énergie et d'un enthousiasme renouvelés pour lutter contre la corruption, améliorer ses institutions et garantir l'état de droit, ainsi que la stabilité et la croissance économiques, bref, pour s'assurer que nous nous rapprochions des valeurs, des standards et du mode vie européens."

"Les citoyens moldaves en ont assez des politiciens qui détournent de l'argent"

Sándor Zsiros :

"Au cours de l'histoire, la Moldavie a hésité entre se tourner vers la Russie ou vers les pays occidentaux. Pensez-vous que l'actuelle orientation pro-occidentale est là pour durer ? Et comment allez-vous l'inscrire dans le temps ?"

Natalia Gavrilița :

"Nous avons été élus avec un large score, sur un programme essentiellement national, non pas sur la question de choisir entre l'Est et l'Ouest, mais sur le choix d'une vie meilleure pour la population de Moldavie. Les citoyens moldaves en ont assez des gouvernements qui mentent, des politiciens qui détournent de l'argent, des services publics qui ne sont pas utiles à la population et des décisions qui ne tiennent pas compte de l'intérêt général. Et ce qu'ils ont exprimé lors de ces élections, c'est qu'ils voulaient un gouvernement dans lequel ils pouvaient avoir confiance, c'est-à-dire un gouvernement qui tous les jours, prend des décisions en ayant en tête l'intérêt général et non celui de quelques-uns. Alors, est-ce que c'est un programme pro-européen ou pro-russe ? En réalité, c'est un programme pro-citoyens."

"Nous faisons le ménage dans nos institutions et les entreprises détenues par l'État"

Sándor Zsiros :

"Vous devez lutter contre la corruption, transformer l'économie. Comment allez-vous progresser dans ces domaines ?"

Natalia Gavrilița :

"Nous commençons, évidemment, par faire le ménage dans nos institutions. Il y a quelques semaines, nous avons stoppé une grande acquisition publique où de l'argent était détourné. Nous faisons le ménage dans les instances dirigeantes et les entreprises détenues par l'État. Nous stoppons la corruption au sein du gouvernement. Dans le même temps, nous avons entamé un travail sur la législation pour nous assurer que le pouvoir judiciaire rende davantage de comptes. Nous avons fait en sorte que le procureur général soit davantage tenu responsable des performances du système judiciaire."

Sándor Zsiros :

"La Moldavie est l'un des pays les plus pauvres d'Europe. Qu'allez-vous faire pour que l'économie fonctionne mieux pour les citoyens ?"

Natalia Gavrilița :

"Au cours des trente années d'instabilité et de corruption rampante que nous avons connues, le secteur privé a lui aussi servi des intérêts particuliers. Donc ce que nous voulons faire, c'est réduire de manière significative les obstacles à l'entrepreneuriat. Nous voulons lever les monopoles dans différents secteurs, améliorer la législation pour que cela soit plus facile pour diverses entreprises de s'y faire une place. Nous envisageons de réduire la bureaucratie pour les petites et moyennes entreprises. Nous voulons réformer la fonction de contrôle exercée par le gouvernement. Et bien sûr, nous voulons cette stabilité pour les quatre prochaines années avec une présidente, un parlement et un gouvernement qui travaillent tous dans la même direction. Et nous espérons saisir cette opportunité pour attirer davantage d'investissements dans notre pays."

"Ces réformes de style européen doivent être irréversibles"

Sándor Zsiros :

"Lutter contre la corruption, c'est toujours risqué. Vous sentez-vous en sécurité ? Pensez-vous que le gouvernement soit assez soutenu pour mener ce combat ?"

Natalia Gavrilița :

"Les citoyens nous soutiennent de manière massive et c'est ce qui nous pousse à avancer. Personnellement, je me sens en sécurité parce que nous faisons ce qu'il faut et je suis sûre qu'à la fois, nos citoyens et nos partenaires nous fourniront la meilleure protection possible."

Sándor Zsiros :

"Pour l'instant, l'Union européenne n'est pas prête à un nouvel élargissement. Comment envisagez-vous les prochaines décennies pour la Moldavie ?"

Natalia Gavrilița :

"Je pense que l'élargissement européen et l'intégration européenne, ce sont des processus longs. Nous savons bien que nous devons mener les réformes demandées et considérablement améliorer la manière dont nos institutions fonctionnent. Nous devons améliorer le niveau de vie de notre population. Nous devons aussi nous assurer que ces réformes de style européen soient irréversibles et ensuite, nous pourrons parler d'élargissement. Mais en attendant, rien ne nous empêche de travailler avec l'Union européenne de manière plus approfondie dans des domaines spécifiques."

Région séparatiste de la Transnistrie : "Rendre la rive droite plus attractive pour la population de la rive gauche"

Sándor Zsiros :

"Quelle pourrait être la solution pour la région séparatiste de la Transnistrie ?"

Natalia Gavrilița :

"Nous nous efforçons de faire en sorte que la rive droite du fleuve Dniestr en Moldavie soit plus attractive pour la population de la rive gauche. En améliorant nos institutions, en luttant contre la corruption, nous contribuons à aller vers une réintégration en rendant la rive droite plus attractive pour ceux de la rive gauche. Deuxièmement, nous jugeons utile, le ménage qui est fait dans les systèmes de corruption qui existaient entre les rives droite et gauche. Il s'agissait aussi d'un conflit qui était alimenté - ou, je dirais, qui était maintenu - en raison des profits réalisés au service d'intérêts particuliers sur les deux rives du fleuve. Donc nous essayons d'endiguer la corruption à ce niveau également."

Sándor Zsiros :

"Seriez-vous prête à vous asseoir autour d'une table avec les dirigeants russes pour parler de leur présence militaire sur place ?"

Natalia Gavrilița :

"Nous avons toujours été clairs à ce sujet et la position des autorités moldaves, quel que soit le gouvernement, n'a pas changé depuis trente ans : nous avons toujours demandé un retrait des troupes russes. Nous voulons aussi accélérer la résolution du problème de l'armement stocké sur la rive gauche, dans la région de Cobasna. Bien entendu, nous avons dit pendant la campagne que nous allions mettre en œuvre une politique étrangère équilibrée, répondant aux besoins des citoyens. Et nous sommes prêts à faire tout ce qu'il faudra pour protéger l'intérêt de nos citoyens et l'intérêt général."