Drogues : Didier Migaud s'oppose à des "courtes peines" pour les consommateurs
Le ministre de la Justice ferme la porte à l'alourdissement des sanctions pour les consommateurs en évoquant "la surpopulation carcérale". Didier Migaud devrait dévoiler le détail de deux nouveaux textes contre le trafic de drogue ce vendredi 8 novembre à Marseille avec Bruno Retailleau.
Une fin de non-recevoir. Didier Migaud a clairement pris ses distances avec la proposition du député Rassemblement national (RN), Jean-Philippe Tanguy, de créer des "courtes peines" de prison pour les consommateurs de drogue.
"À partir du moment où vous avez des courtes peines qui sont exécutées, il faut pouvoir trouver les lieux où vous enfermez les personnes. Nous sommes dans une situation de surpopulation carcérale", a jugé le garde des Sceaux ce mardi 5 novembre sur France info.
"On a 5 millions de consommateurs dans notre pays. Je suis favorable à des campagnes d'information pour informer des dangers de la drogue sur la santé", a précisé le garde des Sceaux sur France info.
"Mexicanisation" de la France
Fusillade suivie d'une rixe mortelle à Poitiers le week-end dernier, un enfant blessé par balle à Rennes la semaine dernière en passant par la mort d'un adolescent par fusillade dans l'Ardèche, ou celle d'un chauffeur de VTC à Marseille tué froidement d'une balle dans la nuque début octobre...
Plusieurs affaires liées directement au narcotrafic - le terme désormais utilisé par Bruno Retailleau, le ministre de l'Intérieur pour décrire l'explosion du trafic de drogue en France - ont eu lieu ces dernières semaines.
Des drames qui ont poussé Bruno Retailleau à hausser le ton. Le ministre de l'Intérieur a dénoncé une "mexicanisation" de la France, en référence au Mexique, plaque tournante du trafic de drogue vers l'Amérique du Nord, sous l'égide de dizaines de cartels extrêmement puissants.
Le RN défend de son côté, par la voix du député Jean-Philippe Tanguy, l'établissement de courtes peines de prison pour que les consommateurs "assument enfin". Le député macroniste Karl Olive a plaidé de son côté pour l'envoi de militaires dans certains quartiers touchés par le trafic de drogue pour provoquer un "véritable électrochoc dans le pays".
Vers le déploiement de deux nouvelles lois
Pour lutter contre les réseaux, Bruno Retailleau prépare pour l'instant deux lois, l'une créant "des juridictions et des parquets spécialisés contre la criminalité organisée" et une seconde sur "le statut des repentis pour briser la loi du silence".
Jusqu'ici plutôt discret, Didier Migaud qui sera en charge conjointement de ces dossiers avec Bruno Retailleau, devrait s'exprimer longuement sur ces dossiers vendredi à Marseille lors d'une visite conjointe.
Les dernières campagnes d'ampleur en la matière remontent à plusieurs années avec une efficacité très limitée, d'après un ancien directeur de l'Observatoire français des drogues, comme le rapporte France info.
Des amendes pour les consommateurs peu payées
En cas de contrôle par la police ou la gendarmerie, un consommateur pris en flagrant délit ou en possession de petites quantités est plus souvent condamné à une amende forfaitaire prononcée en dehors d'un procès. Elle est de 200 euros et peut descendre à 150 euros si elle est payée dans les 15 jours.
Seules cas où l'usage de drogue fait l'objet d'une procédure devant le tribunal: le cas où un consommateur conteste son amende, la possession d'une quantité importante de drogue ou d'un type de drogue assimilé à des drogues dures ou encore un casier judiciaire.
Seules 35% des amendes sont actuellement payées. Emmanuel Macron avait promis en juin 2023 de pouvoir les régler immédiatement en espèce ou en carte bleue. Si les policiers et les gendarmes ont bien été équipés de terminaux de paiement, la mesure n'est toujours pas appliquée.
La France insoumise défend de son côté la légalisation du cannabis tout comme Raphaël Glucksmann (Place publique) qui avait signé en 2019 une tribune dans ce sens.
L'ex président socialiste François Hollande a jugé ce lundi soir sur BFMTV que "la proposition de légaliser le cannabis n'entraînerait en aucune façon une baisse du trafic".