Naf Naf : pourquoi les enseignes françaises de prêt-à-porter tombent les unes après les autres ?

L'enseigne de prêt-à-porter féminin Naf Naf a demandé fin août son placement en redressement judiciaire. Comme d’autres avant elle, la marque a mis un genou à terre.

Naf Naf a demandé son placement en redressement judiciaire à la fin du mois d’août (Crédit : REUTERS/Charles Platiau)

Plombée par la crise du marché de l’habillement, la marque française de prêt-à-porter Naf Naf a demandé son placement en redressement judiciaire à la fin du mois d’août à la suite d’arriérés de paiement de loyer accumulés. L’enseigne, lancée en 1973, a connu son âge d’or dans les années 80-90 avant de progressivement voir sa fréquentation décliner. Du haut de ses 50 ans, la griffe, qui détient 131 magasins sur tout le territoire, a su traverser les générations malgré les obstacles et un redressement judiciaire - déjà - en 2020.

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À l’époque, Naf Naf avait été reprise par un groupe franco-turc, SY, qui est toujours son actionnaire en 2023. La star déchue de la mode est sur le point de rejoindre le cimetière des marques phares de prêt-à-porter autrefois florissantes et aujourd’hui jugées démodées. Il y a moins d’un an, les 514 boutiques Camaïeu baissaient définitivement le rideau après 38 ans d'activité. D'autres marques comme Pimkie, Gap ou encore Don’t Call Me Jennyfer se battent aussi pour ne pas connaître le même sort funeste.

Inflation, Covid et sacrifices : un cocktail explosif

Plusieurs raisons peuvent expliquer cette longue descente aux enfers des enseignes tricolores d'habillement. Déjà en 2018, les Français faisaient partie des Européens les moins enclins à dépenser pour s’habiller. Cinq ans plus tard, l’inflation n’a pas arrangé les choses, loin s’en faut. La hausse des prix généralisée pousse les consommateurs à faire des arbitrages de plus en plus nombreux et les dépenses de vêtements sont bien souvent le premier budget sacrifié sur l’autel des économies. En début d’année, une étude menée par le cabinet de conseil Wavestone estimait que huit Français sur dix comptaient dépenser moins d’argent pour se vêtir en 2023.

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Autre facteur aggravant : la crise du Covid-19. Depuis l’an dernier, les entreprises sont dans l’obligation de rembourser les prêts garantis par l’État octroyés au plus fort de la crise sanitaire pour maintenir les entreprises à flot. Si la plupart parviennent à honorer leurs crédits non sans mal, les entreprises déjà fragilisées avant le Covid ne peuvent plus payer. Le problème ne se pose pas pour Naf Naf puisque la marque n’avait pas pu obtenir les aides prévues en 2020 en raison de "problèmes administratifs". Mais l’enseigne, qui fête son cinquantième anniversaire cette année, doit faire face à "des arriérés de paiement de loyers" accumulés durant la crise sanitaire.

Shein engloutit tout sur son passage

Face à l’inflation galopante, les enseignes les moins chères tirent leur épingle du jeu. Depuis une bonne dizaine d’années, Zara, H&M et Primark ont gagné la bataille de la mode "low cost" face aux marques françaises qui n’ont pas su se réinventer. L’essor de la seconde main et d'un site comme Vinted ne pousse pas non plus les consommatrices à retourner en boutique. Et depuis trois ans, c’est un autre géant qui engloutit toutes les parts de marché sur son passage : Shein. Le rouleau-compresseur chinois avale tous ses concurrents sur son passage et accentue encore plus les manques de nos marques françaises. "Cette machine (Shein, ndlr) est en train de bouleverser la distribution en France. Naf Naf tombe et les autres sont aussi tombés à cause de cette machine de guerre", se désole Yann Rivoallan, président de la Fédération française du prêt-à-porter féminin, sur BFMTV.

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Pour se démarquer, les marques françaises pourraient aller à contre-courant de Shein et Primark en se concentrant sur la mode durable pour capter une clientèle sensible à ces questions environnementales. Problème : Zara vient tout juste d'annoncer le lancement dans l'Hexagone de "Pre Owned", sa nouvelle plateforme de seconde main avec pour objectif de verdir son image auprès du grand public. Histoire de s’assurer que Naf Naf, Pimkie et consorts mettent définitivement la clé sous la porte ?

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