"On n'a pas peur": un Iranien engagé dans la contestation contre le régime témoigne

"On n'a pas peur": un Iranien engagé dans la contestation contre le régime témoigne

Pour des raisons évidentes de sécurité, on ne connaîtra ni son nom ni son visage (flouté) mais son récit permet une plongée inédite au sein du mouvement de contestation qui ébranle le régime des ayatollahs en Iran. Mardi, CNN a en effet diffusé le témoignage de l'un de ces jeunes manifestants engagés dans la lutte contre la dictature.

"On n'arrêtera pas"

Trois semaines après la naissance du mouvement initié par la mort de la jeune Mahsa Amini, à la suite de son arrestation par la police des moeurs pour "port incorrect" du voile, et malgré la violence de la répression, il a juré que la contestation était loin d'être "finie".

"Ces gens croient qu'on est comme les générations précédentes, que s'ils font ça, on va arrêter. On n'arrêtera pas", a-t-il ainsi assuré devant sa webcam pour la télévision américaine.

Il a ajouté: "On avance dans l'inconnu parce que si on arrête là, ils tueront encore plus de gens, ils mettront plus de gens en prison, en tortureront plus, les violeront. Ils sont capables de tout. Donc, on ne va pas s'arrêter, ce n'est pas la fin, je vous le promets". Il a insisté: "On n'a pas peur. On est ulcéré, on est furieux."

Pris au piège

Téhéran, Mashhad, Shiraz: la contestation s'est étendue dans tout le pays comme une traînée de poudre après la mort de Mahsa Amini. Cimentée à l'origine par la volonté de fairee tomber l'obligation du port du voile pour les femmes, la protestation s'est changée en vaste mouvement démocratique. Un souffle qui déchaîne la brutalité des tenants de la République islamique.

Dimanche, un événement a donné un exemple particulièrement spectaculaire de l'opposition entre les manifestants et le gouvernement: l'affrontement entre une foule d'étudiants et la police du côté de l'université Sharif à Téhéran.

D'abord rassemblés auprès de l'établissement pour scander des slogans hostiles au régimes, les manifestants se sont ensuite réfugiés dans le parking souterrain de la faculté, afin de fuir la répression. Cependant, ils s'y sont trouvé nassés, pris au piège.

C'est dans ces circonstances que le témoin de CNN a décidé d'intervenir. Le récit de son action en dit long sur la barbarie des hommes du "Guide suprême" Ali Khamenei.

Tirs sur les étudiants, des professeurs passés à tabac

"J'ai vu cet appel de détresse en provenance de l'Université Sharif. Un de mes amis m'a appelé, il m a dit: 'S'il te plaît, viens nous sauver, ils nous tirent dessus'", a introduit le manifestant, poursuivant: "J'ai pris deux de mes amis avec moi pour qu'ils puissent m'aider. On a pris nos vélos et on est allé là-bas." Sur place, il découvre un champ de bataille:

"Ils avaient des pistolets, des pistolets de paintball, des bâtons. C'était une zone de guerre, et il y avait du sang partout."

"Des étudiants ont été stoppés par la sécurité de l'université et on leur a dit: 'Si vous approchez de la station de métro, on fera feu. Retournez à l'université'". "Un des profs a essayé de sortir certains étudiants de là. Ils l'ont tabassé, comme beaucoup de professeurs qui ont essayé de sauver les étudiants", a-t-il raconté.

Selon le décompte livré par l'ONG Iran Human Rights, les policiers ont déjà tué 154 personnes pour tenter d'étouffer le mouvement. En vain.

Article original publié sur BFMTV.com