Mustapha Benfodil : « Je salue les enfants du hirak »

Le 22 février 2019 marquait le déclenchement du hirak, mouvement de protestation contre le cinquième mandat du président déchu Bouteflika et tout un système.
Le 22 février 2019 marquait le déclenchement du hirak, mouvement de protestation contre le cinquième mandat du président déchu Bouteflika et tout un système.

Rien n'est moins certain que le devenir des morts. Car, au fond, que sait-on de nos morts une fois qu'ils sont partis ? Ils laissent un chagrin, un souvenir et parfois une énigme insoluble. Alger, journal intense s'ouvre sur la mort de Karim. Voici Mounia, son épouse qui devient trop soudainement sa veuve, à la défaveur d'un moment d'inattention. Un banal accident de voiture pour le lunaire Karim. Pour faire son deuil, selon l'expression consacrée, elle décide d'écrire un journal. Mais, au fur et à mesure des mots, elle défait tout autant son couple, l'interroge et le fouille. Pour ce faire, elle se plonge en parallèle à l'écriture de ses propres mots, dans ceux laissés par Karim. Monticules d'écrits laissés par un graphomane qui ne se sentait jamais si bien vivant que quand il passait le réel au tamis du papier encré.

Le roman de Mustapha Benfodil alterne alors deux voix. Comme un dialogue enfin établi par-delà la mort. Grâce à elle, en un sens. C'est d'abord la voix de Mounia qui se donne à entendre. Elle découvre, au fur et à mesure de sa dissection du cadavre de papier laissé par son mari, un homme dont elle ignorait beaucoup. Et dont elle découvre l'essentiel : les pensées, les colères et révoltes, les émotions et les effusions. Les dates et moments clés d'une vie en surface lisse et rangée, mais qui se révèle avoir été agitée en profondeur. L'autre voix est évidemment celle de Karim. Hachée, tournoyante, lancinante. Intranquille, surtout.

À travers son [...] Lire la suite