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Moscou va cesser de financer le Conseil de l'Europe, jugé anti-russe

La Russie a informé vendredi le Conseil de l’Europe qu'elle allait suspendre sa participation au budget de l’organisation en réaction à l’attitude jugée anti-russe de son Assemblée parlementaire (APCE), a annoncé l'institution de promotion des droits de l'homme et de la démocratie. /Photo d'archives/REUTERS/Vincent Kessler

STRASBOURG (Reuters) - La Russie a informé vendredi le Conseil de l’Europe qu'elle allait suspendre sa participation au budget de l’organisation en réaction à l’attitude jugée anti-russe de son Assemblée parlementaire (APCE), a annoncé l'institution de promotion des droits de l'homme et de la démocratie. Dans une lettre à son secrétaire général, le ministre russe des Affaires étrangères justifie cette décision par les sanctions prises à l’encontre des parlementaires russes en avril 2014, après l’annexion de la Crimée par Moscou, mais aussi par les "persécutions" dont feraient l’objet les parlementaires qui voudraient les lever. "Une campagne frénétique est menée pour persécuter les parlementaires qui souhaitent normaliser les relations avec la Russie au sein du Conseil de l’Europe", écrit Sergueï Lavrov. Le ministre fait implicitement référence au président de l’Assemblée, le conservateur espagnol Pedro Agramunt. Celui-ci est menacé de destitution pour avoir, avec deux autres membres de l’APCE, effectué en avril un voyage en Syrie à bord d’un avion gouvernemental russe et rencontré le président Bachar al Assad sans en avoir informé les instances de l’Assemblée. Le nom de Pedro Agramunt est également cité par une ONG allemande dans un rapport sur des soupçons de corruption en relation avec l’Azerbaïdjan au sein de l’APCE. La réaction russe intervient le jour où l’Assemblée parlementaire annonce qu’une motion de destitution signée par 158 de ses membres sera soumise au vote lors de la prochaine partie de session, en octobre, conformément à une réforme de son règlement adoptée mardi. "CRISE" "La crise au sein de l’APCE pourrait également affecter d’autres organes de la plus ancienne organisation paneuropéenne et devenir systémique", ajoute Sergueï Lavrov. La suspension du financement russe est une arme lourde dans la mesure où la Russie a choisi, dès son adhésion en 1996, de figurer, avec la France, l’Allemagne, l’Italie, le Royaume-Uni et désormais la Turquie, parmi les 'grands contributeurs'. Chacun fournit près de 11% du budget de l’organisation. Celui-ci est établi à 454,6 millions d’euros pour 2017. En contrepartie, le "grand contributeur" bénéficie d’un plus grand quota de fonctionnaires au sein de l’organisation et, dès lors, d’une capacité d’influence accrue. Sergueï Lavrov sous-entend également que, si les droits de vote des parlementaires russes restaient suspendus, Moscou pourrait contester les prochaines élections, par l’Assemblée, du secrétaire général de l’organisation, de son commissaire aux droits de l’homme ou des juges à la Cour européenne des droits de l’homme. Le secrétaire général du Conseil de l’Europe, Thorbjorn Jagland, n’a pas souhaité réagir dans l’immédiat. "Il évalue les implications de cette décision et en discutera avec le comité des ministres (les ambassadeurs des 47 Etats membres) la semaine prochaine", a déclaré dans un communiqué son porte-parole, Daniel Holtgen. (Gilbert Reilhac, édité par Yves Clarisse)