Mort de Régine: une chanteuse et un répertoire ancrés dans la culture populaire
Charles Aznavour et Henri Salvador lui ont mis le pied à l’étrier. Avec Les Petits papiers, Serge Gainsbourg lui a offert son plus grand succès. Longtemps reine des nuits parisiennes, Régine, mort ce dimanche à l'âge de 92 ans, s'est également illustrée dans la musique avec des titres comme La grande Zoa, Azzurro ou Patchouli Chinchilla. Retour sur une carrière musicale marquée par des textes devenus des incontournables de la musique française.
De la nuit parisienne à la scène
Née le 26 décembre 1929 à Anderlecht (Belgique), Régine - de son vrai nom Régina Zylbergerg - prend dès son plus jeune âge des cours de chant, encouragée par l'artiste française Renée Lebas. En parallèle de ses débuts en tant que femme d'affaires et reine de la nuit parisienne, elle se lance dans la chanson. Ses liens avec le showbiz lui ouvrent rapidement les portes des studios de musique, où elle enregistre son premier disque en 1963.
Charles Aznavour, Barbara, Henri Salvador, Serge Lama, Didier Barbelivien, Patrick Modiano ou encore Françoise Sagan, tous les plus grands artistes lui écrivent des tubes, spécialement adaptés à sa voix envoûtante, légèrement éraillée, et à sa personnalité pragmatique, mélancolique et pleine d'humour.
Mais c'est son amitié avec Serge Gainsbourg qui va marquer sa discographie. En 1965, l'interprète de La Javanaise lui écrit son plus grand tube Les Petits papiers. S'en suit une collaboration et une amitié de longue date entre les deux artistes. Gainsbourg lui signera 17 chansons qu'elle jouera sur les scènes du monde entier.
"Il m'a dit un jour: 'Tu devrais chanter'. Je lui ai demandé pourquoi, il m'a répondu que j'avais une voix étrange. J'ai dit: 'non j'ai une voix rauque" et il m'a dit: "Non, tu as quelque chose dans la voix. Tu devrais chanter'", se souvenait Régine dans une interview pour BFMTV.
Des chansons désormais cultes
Briser les préjugés à l'égard des homosexuels dans Les Femmes, ça fait pédé ou rendre hommage au monde de la nuit et à la figure du travesti dans La Grande Zoa... Avec un répertoire impressionnant, des influences musicales novatrices pour l'époque et sa gouaille de titi parisien, Régine tente de se faire une place dans la variété française.
Mais comme le racontait le journaliste et parolier Pascal Sevran - mort en 2008 - dans son livre Le music-hall français (1978), "son image de marque parisienne l'a empêché de s’imposer vraiment".
"Son côté femme des nuits mondaines, à tu et à toi avec les grands de ce monde, a faussé le jeu. On ne peut décemment pas chanter le trottoir, le métro et son peuple et rentrer se coucher en Rolls à l’heure où les ouvriers de Billancourt s’en vont pointer", assurait-il dans son ouvrage.
Pourtant, forte du succès de ses chansons, Régine s'empare, à la fin des années 70 du tournant disco. Après être passée par l'Olympia, elle chante au Carnegie Hall de New York en 1969, devenant - avec notamment Edith Piaf - l'une des rares Françaises à avoir conquis l'Amérique. À Paris, elle montera ensuite sur la scène de Bobino ou de la Cigale.
Toujours prête à entonner ses tubes, désormais devenus des classiques, Régine s'était même lancée en 2015 dans sa première vraie tournée baptisée La Grande Zoa, clin d'œil à son tube, écrit par Frédéric Botton.
"Ma plus grande joie serait qu’on écoute encore mes chansons dans cinquante ans, confiait Régine à l'AFP en 2020. Je suis très fière que certaines soient devenues des classiques", ajoute celle que Renaud, qui lui a aussi écrit plusieurs titres, considère comme la dernière représentante historique de la chanson française.
En 2016, à l'âge de 85 ans, elle chantait encore aux Folies-Bergères avec son entrain coutumier, Je survivrai, reprise du tube de Gloria Gaynor, enveloppée de son légendaire boa.