Mort d’Alberto Fujimori, ex-président du Pérou condamné pour crimes contre l’humanité
INTERNATIONAL - L’ancien président du Pérou Alberto Fujimori (1990-2000), gracié en décembre pour raisons de santé après avoir été condamné pour « crimes contre l’humanité », est décédé ce mercredi 11 septembre à Lima à l’âge de 86 ans, a annoncé sa famille sur le réseau social X.
« Après une longue bataille contre le cancer, notre père, Alberto Fujimori, vient de partir à la rencontre du Seigneur. Nous demandons à ceux qui l’ont aimé de nous accompagner par une prière pour le repos éternel de son âme. Merci pour tout papa ! », ont annoncé ses enfants Keiko, Hiro, Sachie et Kenji Fujimori.
L’ex-dirigeant, d’origine japonaise, avait été libéré en décembre après avoir passé 16 ans dans une prison située dans l’est de Lima. Il y purgeait une peine de 25 ans pour crimes contre l’humanité, notamment pour deux massacres de civils commis par un escadron de l’armée dans le cadre de la lutte contre la guérilla maoïste du Sentier lumineux au début des années 1990.
Surnommé « El Chino »
Il avait été libéré en décembre sur ordre de la Cour constitutionnelle « pour raisons humanitaires », malgré l’opposition de la justice interaméricaine. En mai, Alberto Fujimori avait annoncé qu’une tumeur maligne à la langue lui avait été diagnostiquée.
Après avoir gouverné pendant dix ans le Pérou d’une main de fer, l’héritage du dictateur divise toujours profondément les Péruviens. Alberto Fujimori a désuni les Péruviens comme peu d’hommes politiques l’ont fait dans l’histoire du pays. Car dans ce pays andin de 32 millions d’habitants, difficile d’oublier le passage au pouvoir de celui que l’on surnomme « El Chino » (le Chinois).
Pour certains, il est l’homme qui a dopé l’essor économique du pays par ses politiques ultra-libérales, et combattu avec succès les guérillas du Sentier lumineux (maoïste) et du Mouvement révolutionnaire Tupac Amaru (guévariste).
Gouvernance autoritaire
D’autres se souviennent surtout des scandales de corruption et de ses méthodes autoritaires, qui l’ont conduit derrière les barreaux pour avoir commandité deux massacres perpétrés par un escadron de la mort en 1991-1992, dans le cadre de la lutte contre le Sentier lumineux.
Né à Lima le 28 juillet 1938 de parents japonais immigrés, Alberto devient ingénieur agronome puis enseigne les mathématiques. En 1964, il passe une année universitaire à Strasbourg où il apprend le français et, en 1970, obtient un master de mathématiques aux Etats-Unis.
En 1990, Alberto Fujimori remporte à la surprise générale l’élection présidentielle face au célèbre écrivain et prix Nobel de littérature, Mario Vargas Llosa. Faute de majorité, le 5 avril 1992, avec l’appui des forces armées, il dissout le Parlement et suspend la Constitution. L’année suivante, il fait adopter une nouvelle Loi fondamentale donnant plus de pouvoir au président.
Après sa victoire sur le Sentier lumineux et l’arrestation de son chef Abimael Guzman - décédé en prison le 11 septembre 2021 - le magazine américain Time le nomme en 1993 personnalité sud-américaine de l’année. Il est réélu président en 1995.
Destitué pour des affaires de corruption
En 1996, le Parlement adopte une loi qui l’autorise à postuler à un troisième mandat. En mai 2000, Alberto Fujimori s’impose à nouveau, mais le Parlement vote sa destitution en novembre pour corruption. L’affaire prend des allures de scénario hollywoodien. Le dirigeant déchu s’enfuit au Japon, pays dont il détient également la nationalité, et démissionne par fax depuis un hôtel de la capitale nippone.
Lima passe des années à tenter de convaincre Tokyo de l’extrader, en vain. A l’issue d’une longue bataille judiciaire, c’est finalement le Chili, où il s’était rendu en 2005, qui extrade Alberto Fujimori deux ans plus tard.
Sa famille et ses avocats a lutté pour qu’il ne finisse pas sa vie derrière les barreaux. Mi-mars 2022, une grâce présidentielle accordée la veille de Noël 2017 par le président de l’époque, Pedro Pablo Kuczynski, a été annulée en octobre 2018 par la justice. Le 7 décembre 2023 la Cour constitutionnelle a finalement ordonné la libération immédiate de l’ancien président controversé, rétablissant la grâce accordée en 2017.
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