Moonlight : 5 choses à savoir sur le film aux trois Oscars

1. Une idée qui vient du théâtre

Le projet Moonlight est né dans le cadre d’une école d’art dramatique. C’est le dramaturge Tarell Alvin McCraney, membre de la troupe théâtrale Steppenwolf, qui en a eu l’idée. Grâce à sa trilogie «Brother/Sister» qui se déroule dans une cité de la Louisiane, il s’est imposé comme un auteur majeur de la communauté noire.

En 2013, la productrice Adele Romanski était à la recherche d’un nouveau projet de long métrage pour Barry Jenkins après la réussite de Medicine For Melancholy. Amis depuis l’université, la productrice et le réalisateur avaient pris l’habitude de se voir deux fois par semaine pour échanger des idées jusqu’à ce qu’une dizaine d’entre elles, plus concrètes que les autres, ne prennent forme. Par l’intermédiaire d’un membre du Borscht Festival, Jenkins avait notamment lu le texte de McCraney où il raconte de manière très personnelle sa jeunesse à Miami : "Tarell avait formidablement évoqué le calvaire des jeunes Noirs qui grandissent dans les cités de Miami, souligne Jenkins. J’y ai vu l’occasion de m’inspirer de mes propres souvenirs d’enfance, en les relatant par le prisme du magnifique regard de Tarell. Son histoire correspond assez bien à la mienne. C’était donc une rencontre idéale."


Ashton Sanders

2. Grandir dans la violence : un parcours commun

Le réalisateur Barry Jenkins a grandi dans la même cité violente de Liberty City (Miami) que Tarell Alvin McCraney, où se déroule l’essentiel du film. Jenkins et McCraney ne se connaissaient pas quand ils étaient enfants mais ont vécu une adolescence comparable. Ils ont fréquenté la même école et
le même collège – bien qu’ils n’aient pas le même âge – et sont devenus tous les deux artistes, abordant des thèmes voisins qui s’inspirent de leur parcours, comme l’identité et la masculinité. Plus remarquable encore : ils ont tous les deux grandi auprès d’une mère totalement accro à la drogue. La mère de Jenkins a surmonté sa toxicomanie tout en étant séropositive pendant 24 ans, tandis que celle de McCraney a fini par mourir du Sida.

3. Un rôle, trois acteurs : un casting ambitieux

Le cinéaste Barry Jenkins a fait le choix d'utiliser 3 acteurs différents pour camper le même personnage (Chiron) à 3 époques de sa vie. Il n'a pas voulu que les comédiens choisis se croisent sur le plateau car il souhaitait que ces derniers ne s'influencent pas entre eux afin qu'ils livrent leur propre interprétation du rôle. Pour camper Chiron enfant, Jenkins voulait un jeune comédien issu de Miami. Après avoir placardé des avis de castings dans toute la ville, le réalisateur et sa directrice de casting Yesi Ramirez ont trouvé Alex R. Hibbert

Pour trouver l'acteur qui allait incarner le personnage à l'âge de 16 ans, Ramirez a sillonné les USA. Elle a aussi visionné des enregistrements d’audition, étudié des photos de visages et passé au crible de nombreux clips de lycéens suivant des options théâtre dans leur établissement. Au bout du compte, la production a retenu Ashton Sanders que Yesi Ramirez avait découvert au cours de l’une de ses nombreuses séances de casting à Los Angeles. Il s’était produit dans un film indépendant et avait tenu un second rôle dans N.W.A., mais il s’est surtout distingué grâce à son calme et son visage impassible, qualités indispensables pour Chiron dans le deuxième chapitre du film.

Quant à Black, l'incarnation de Chiron adulte, c'est sur Trevante Rhodes que Barry Jenkins et Yesi Ramirez ont jeté leur dévolu : "En tant que directrice de casting, c’est très rare qu’un acteur me fasse un tel effet rien qu’en entrant dans la pièce, mais c’était le cas de Trevante. Outre sa virilité, il fait preuve d’une vulnérabilité dont nous avions besoin pour que le spectateur s’attache à lui", confie Ramirez.


Naomie Harris

4. Naomie Harris toxicomane

La comédienne britannique Naomie Harris incarne Paula, la mère toxicomane de Chiron dans Moonlight. Pour l'actrice, qui ne boit pas, ne fume pas et ne se drogue pas, la perspective d’incarner un personnage aussi complexe et perturbé était difficile sur un plan émotionnel. Pour s’y préparer, la comédienne a étudié le mode de vie et le comportement des toxicomanes à l’époque où le crack faisait des ravages aux États-Unis : 

"J’ai dû m’imaginer son parcours dans ma tête pour arriver à l’interpréter. Paula a un boulot et n’est pas qu’une toxico. Elle est vraiment accro et peu à peu elle développe une accoutumance au crack. Elle privilégie systématiquement son besoin d’obtenir sa dose plutôt que de s’occuper de son fils. Quel que soit le personnage qu’on interprète, il faut toujours le défendre. On doit essayer de comprendre les choix d’une femme comme Paula et de tisser un lien avec elle pour l’incarner avec réalisme et conviction."

5. Tournage en milieu difficile

Barry Jenkins et son équipe ont tourné dans le quartier de Liberty Square qui fait partie de la cité de
Liberty City où vivent Paula et Chiron. Il a la triste réputation d’être l’une des zones les plus dangereuses des États-Unis. Pour Jenkins, lui-même originaire de Liberty City, il était essentiel de restituer la beauté du milieu où, adolescent, il s’est construit, tout comme celui-ci a façonné la personnalité de Chiron :

"Liberty City est l’un des quartiers les plus déshérités de Miami, mais ce qu’on voit dans le film, ce sont ses couleurs chatoyantes. Tous les immeubles sont peints dans des teintes pastel de bleu, rose et orange. Ils n’ont pas été rénovés depuis 40 ans mais les couleurs tiennent toujours. Moonlight aborde des sujets graves, mais je tenais à dépeindre l’éclat inattendu de ce quartier, surtout lorsqu’il est éclairé par la lumière propre à Miami", relate le metteur en scène.

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