Meta arrête la modération sur Facebook et Instagram : pourquoi Mark Zuckerberg tente de draguer Donald Trump ?
Le PDG de Meta a annoncé qu'il cesserait de travailler avec des organisations de vérification des faits, dénonçant la "censure" qui en résulte.
La modération de contenus sur les réseaux sociaux, une nouvelle forme de censure ? C'est sur cette voie que s'engage Mark Zuckerberg, le PDG de Meta (la société de médias sociaux qui possède les géants Facebook et Instagram). En reprenant nombre d'arguments entendus dans la bouche du président élu Donald Trump et plus largement dans le camp conservateur américain, Mark Zuckerberg a annoncé mardi 7 janvier 2025 que la société cesserait de travailler avec des organisations de vérification de faits.
La raison annoncée étant que cette étape de vérification des contenus publiés aboutirait trop souvent à de la censure. "Après l'élection de Trump en 2016, les médias traditionnels ont écrit sans arrêt sur la façon dont la désinformation était une menace pour la démocratie. Nous avons essayé de bonne foi de répondre à ces préoccupations sans devenir les arbitres de la vérité", a déclaré Zuckerberg, selon des propos rapportés par NPR.
"Mais les vérificateurs de faits ont tout simplement été trop biaisés politiquement et ont détruit plus de confiance qu'ils n'en ont créé, en particulier aux États-Unis." Mark Zuckerberg
Après 2016, des vérificateurs pour contrer les ingérences russes
L'élection présidentielle américaine qui voyait s'affronter Donald Trump et Hillary Clinton avait été émaillée de fake news diffusée sur les réseaux sociaux, notamment par la Russie. Pour faire face à ce phénomène, la plateforme Facebook avait décidé de créer un important partenariat avec des sociétés de vérifications de faits, et avait ainsi participé à créer de nouveaux standards pour les réseaux sociaux.
Les élections de 2020 et la pandémie de COVID-19 ont exacerbé un contrecoup parmi les conservateurs, qui ont qualifié la modération du contenu de "censure". Après l'attaque contre le Capitole le 6 janvier 2021, Facebook, ainsi que Twitter et YouTube, avaient banni Donald Trump de leurs plateformes. Toutefois, ces entreprises lui ont permis de revenir avant sa campagne pour un second mandat présidentiel.
A lire aussi >> Qui est Larry Ellison, qui devance désormais Mark Zuckerberg et Bernard Arnault au classement des personnes les plus riches du monde
Les modérateurs et vérificateurs, cibles privilégiées
Ces dernières années, les vérificateurs de faits, les chercheurs étudiant les fausses informations et les programmes de modération des médias sociaux sont devenus des cibles privilégiées des enquêtes et des contestations légales, souvent menées par un Congrès à majorité républicaine.
Mark Zuckerberg a récemment déclaré que son approche de la modération du contenu avait évolué. "Meta a commis trop d'erreurs dans l'application de ses politiques de contenu", a-t-il affirmé, ajoutant que l'élection potentielle de Trump à un second mandat constituait un "point de basculement culturel pour redonner la priorité à la liberté d'expression".
"Nous allons revenir à nos fondamentaux, nous concentrer sur la réduction des erreurs, simplifier nos politiques et rétablir la liberté d'expression sur nos plateformes."
Un virage pro Trump...
Cette décision intervient alors que Meta, ainsi que d'autres entreprises technologiques, cherchent à améliorer leurs relations avec Donald Trump. Depuis longtemps, Trump et d'autres républicains accusent la Silicon Valley de biais anti-conservateurs, affirmant que leurs discours ont été muselés en ligne. Trump, de son côté, a accusé Zuckerberg d'ingérence électorale et a même évoqué la possibilité de peines de prison à son encontre, comme le rapporte Politico.
La semaine dernière, Meta a promu Joel Kaplan, un républicain chevronné ayant travaillé sous l'administration de George W. Bush, à la tête de la politique mondiale. Kaplan remplace Nick Clegg, ancien vice-Premier ministre britannique. De plus, lundi, Meta a nommé Dana White, PDG de l'Ultimate Fighting Championship (UFC) et fervent partisan de Trump, au sein de son conseil d'administration, peut-on lire dans Libération.
...ou la peur d'être ciblé ?
Mark Zuckerberg, parmi d'autres dirigeants technologiques, s'est également rendu à Mar-a-Lago pour rencontrer Trump après l'élection. Par ailleurs, Meta a fait un don de 1 million de dollars au fonds d'inauguration de Trump, un geste similaire à ceux de Sam Altman, PDG d'OpenAI, et d'autres figures technologiques.
"La manière dont Zuckerberg a présenté ces annonces, ainsi que leur timing, visait manifestement un public républicain." Brendan Nyhan, politologue au Dartmouth College
Brendan Nyhan, politologue au Dartmouth College et interrogé par NPR, a critiqué ce qu’il appelle la "démonstration de loyauté performative" des chefs d’entreprise envers la nouvelle administration. Selon lui, "Meta perçoit clairement un risque politique important d’être ciblé".