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May va exiger de Trump que cessent les fuites US sur Manchester

La Première ministre britannique Theresa May va faire part de ses préoccupations à Donald Trump concernant des fuites américaines relatives à l'auteur de l'attentat suicide qui a fait 22 morts lundi soir à Manchester. Le gouvernement de Theresa May est "furieux" en raison ces fuites. /Photo prise le 23 mai 2017/REUTERS/Toby Melville

par Elizabeth Piper et Steve Holland BRUXELLES (Reuters) - Theresa May, furieuse des fuites sur l'enquête de Manchester émanant des services américains, a rappelé jeudi que la coopération avec les Etats-Unis en matière de renseignement reposait sur la confiance. Le gouvernement britannique et les chefs des services de sécurité ont été effarés devant l'ampleur des fuites relayées par la presse américaine sur les progrès de l'enquête sur l'attentat suicide commis lundi soir à la sortie d'un concert d'Ariana Grande à Manchester. A son arrivée à Bruxelles où elle participait avec Donald Trump à un sommet de l'Otan, Theresa May a rappelé les bases de la coopération entre les deux alliés. "Pour ce qui est du partage du renseignement avec les Etats-Unis d'Amérique, nous entretenons une relation spéciale avec les USA. Il s'agit de notre partenariat le plus profond pour ce qui est de la défense et de la sécurité", a-t-elle dit. "Naturellement, ce partenariat est construit sur la confiance et cette confiance réside en partie dans le fait que nous savons que des renseignements peuvent être partagés confidentiellement", a-t-elle poursuivi. "Je dirai clairement au président Trump que les renseignements partagés entre nos agences doivent rester confidentiels." Donald Trump a reconnu que ces fuites étaient "profondément troublantes". Dans une déclaration rendue publique à son arrivée à Bruxelles, le président américain promet de traduire en justice tout individu surpris en train de divulguer des informations confidentielles. "Je demande au département de la Justice et aux autres agences concernées de lancer une enquête complète sur ce sujet et, si cela est approprié, les coupables devront être poursuivis avec toute la rigueur de la loi", dit Donald Trump, qui n'a de cesse de dénoncer les fuites portant sur l'enquête en cours aux Etats-Unis sur une possible ingérence russe dans la campagne électorale et sur d'éventuels liens entre des membres de son équipe de campagne et Moscou. Mais ses propres capacités à gérer des informations sensibles l'ont précipité au coeur d'une controverse pour avoir fourni au chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, et à l'ambassadeur russe à Washington, qu'il recevait le 10 mai à la Maison blanche, des renseignements confidentiels sur le groupe Etat islamique émanant des services d'un pays tiers. COOPÉRATION SUSPENDUE Les enquêteurs britanniques redoutent que la diffusion de ces informations ne compromette leurs opérations, étant apparu que le kamikaze, Salman Abedi, était soutenu par un réseau. Reuters a appris jeudi matin auprès des services britanniques de l'antiterrorisme que la police britannique avait suspendu le partage d'informations avec les Etats-Unis. Cette décision est une mesure hors du commun, étant donné les liens qui existent entre les communautés britannique et américaine du renseignement. D'après cette source, elle restera en vigueur "tant que nous n'aurons pas l'assurance qu'aucune autre divulgation non autorisée ne se produira". Dès mercredi matin, la ministre britannique de l'Intérieur, Amber Rudd, avait dit son "irritation" devant ces fuites, soulignant que la police britannique souhaite "contrôler le flux d'informations afin de préserver l'intégrité des opérations et de conserver l'élément de surprise". PHOTOS DU NEW YORK TIMES Au même moment, son homologue français, Gérard Collomb, déclarait tenir des enquêteurs britanniques que Salman Abedi avait des liens "avérés" avec Daech et qu'il s'était rendu "en Libye puis sans doute en Syrie". Depuis l'attentat, des sources au sein des services américains du renseignement ont rendu public un nombre considérable d'informations. Ils ont été les premiers à fournir mardi l'identité du kamikaze présumé, une demi-heure avant confirmation par la police de Manchester. Les éléments biographiques proviennent également de sources américaines. La diffusion par le New York Times de photos prises sur les lieux de l'attaque, qui a fait selon le dernier bilan 22 morts et 116 blessés, montrant notamment ce qui pourrait être le détonateur utilisé pour déclencher la charge explosive, a fini d'ulcérer les responsables de l'enquête britannique. Outre l'impact sur les familles des victimes, confrontées à ces clichés violents sur lesquels sont visibles des traces de sang, la police britannique craint que les éventuels complices d'Abedi ne puissent avoir un coup d'avance sur les enquêteurs lancés à leurs trousses. "C'est encore plus dommageable quand cela porte sur la divulgation non autorisée de preuves potentielles en pleine enquête antiterroriste majeure", a condamné dans un communiqué la National Counter Terrorism Policing, l'unité de coordination des forces de police britanniques en matière de lutte contre le terrorisme. D'après le Financial Times, les photographies publiées par le New York Times proviennent d'une base de données cryptées partagées par les experts en explosifs d'une vingtaine de pays alliés à la Grande-Bretagne. (avec Kylie McLellan et Alistair Smout à Londres et Andy Bruce à Manchester, Pierre Sérisier et Henri-Pierre André pour le service français, édité par Gilles Trequesser)