May promet d'écouter sur le Brexit et édulcore son programme

La Première ministre britannique a promis de multiplier les consultations sur le Brexit et renoncé à plusieurs réformes controversées des services sociaux, de l'éducation ou de la gouvernance des entreprises. /Photo prise le 21 juin 2017/REUTERS/Kirsty Wigglesworth

par William James et Elizabeth Piper LONDRES (Reuters) - Affaiblie par son revers aux élections législatives du 8 juin et la perte de sa majorité à la Chambre des communes, toujours en négociation avec les unionistes nord-irlandais du DUP, Theresa May a présenté mercredi un programme de gouvernement empreint d'"humilité", reflet de sa fragilité politique. La Première ministre britannique a promis de multiplier les consultations sur le Brexit et renoncé à plusieurs réformes controversées des services sociaux, de l'éducation ou de la gouvernance des entreprises. Comme le veut la tradition, c'est la reine Elizabeth II qui a lu aux membres des deux chambres du Parlement les engagements du gouvernement pour les deux prochaines années. Le discours de la Reine, qui marque l'ouverture du Parlement, est d'ordinaire une cérémonie purement protocolaire mais il prenait cette fois, dans un contexte de crise politique aiguë, les allures d'un test majeur de la capacité de Theresa May à gouverner le pays. Depuis sa gifle électorale - les Tories n'ont plus que 318 députés aux Communes, où la majorité absolue est fixée à 326 sièges -, la Première ministre cherche à obtenir le soutien des dix députés du DUP mais les négociations traînent en longueur. Une source du DUP a déclaré mercredi qu'un accord cette semaine paraissait peu probable. Les gouvernements minoritaires sont rares au Royaume-Uni, où le scrutin majoritaire uninominal à un tour débouche généralement sur des majorités solides. L'autorité de Theresa May a en outre été ébranlée par une série d'attentats et la réponse jugée calamiteuse du gouvernement à l'incendie qui a fait 79 morts dans une tour d'habitation il y a une semaine à Londres. Après plusieurs jours de débats parlementaires, le programme de Theresa May sera mis aux voix jeudi 29 juin, ce qui se transformera de facto en un vote de confiance. "Le résultat de l'élection n'est pas celui que j'espérais, mais ce gouvernement répondra avec humilité et détermination au message envoyé par l'électorat", a déclaré la Première ministre. RÉUSSIR LE BREXIT Près d'un an après le vote des Britanniques en faveur du Brexit par 52% des voix, deux jours après le lancement officiel des négociations officielles sur le divorce avec Bruxelles, Theresa May a présenté un ensemble de mesures logiquement dominé par la sortie de l'Union européenne, avec l'ambition de "forger le consensus le plus large possible". "Tout d'abord, nous devons réussir le Brexit. Cela veut dire obtenir un accord conforme au résultat du référendum de l'an dernier et le faire de manière à recueillir le plus grand soutien public", a insisté la chef du Parti conservateur. "Ce gouvernement consultera et écoutera, tout en étant clair sur le fait que le Brexit aboutira, en travaillant avec le Parlement, les entreprises, les administrations concernées et d'autres pour garantir un retrait ordonné", a-t-elle ajouté. Dans un document distribué à la presse pendant le discours, le gouvernement a souligné qu'il multiplierait les consultations avec les milieux d'affaires "afin de tester et valider ses positions". Le programme du gouvernement est ainsi restreint aux aspects techniques du Brexit: une loi d'abrogation (Great Repeal Bill) sera présentée pour convertir le corpus de lois européennes en lois nationales. Des lois séparées sont prévues sur certains sujets comme l'immigration - pour mettre fin à la liberté de circulation -, les douanes ou la pêche. Sur le plan de la politique économique, le gouvernement a promis de prêter davantage attention au "message" des électeurs face à la politique d'austérité menée depuis près de dix ans au Royaume-Uni mais réaffirme viser un budget à l'équilibre d'ici le milieu de la prochaine décennie. Au chapitre des réformes controversées, Theresa May n'a pas mentionné sa volonté de rétablir des écoles sélectives connues sous le nom de "grammar schools", ni son projet de demander aux personnes âgées de financer davantage leurs frais de santé. Elle a également renoncé à ses projets visant à encadrer davantage la rémunération des patrons et à accorder aux salariés plus de poids dans la définition de la stratégie de leur entreprise en Grande-Bretagne. (Bertrand Boucey et Jean-Stéphane Brosse pour le service français, édité par Tangi Salaün)