Marche du 7 septembre : le Nouveau Front populaire au défi de maintenir son unité

Si les socialistes font bande à part en n’appelant pas à manifester le 7 septembre, le Nouveau Front populaire devrait tenir, renforcé par un pouvoir qui se droitise.

Et si l’arrivée de Michel Barnier à Matignon renforçait l’unité de la gauche ? Remontés contre ce qu’ils considèrent être « un déni de démocratie », les principaux leaders du Nouveau Front populaire parlent d’une même voix. La nomination d’un Premier ministre marqué très à droite laisse, en miroir, champ libre à la gauche pour s’opposer et protester. Dans Libération, le politologue Jean-Yves Dormagen estime même que la situation peut profiter à la gauche « puisqu’elle se retrouve en position de monopole de l’opposition », le RN s’étant plutôt prononcé en faveur d’une neutralité, voire d’un soutien critique, au futur gouvernement.

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Dès lors, et sachant qu’elle a une carte à jouer, la coalition de gauche durera-t-elle dans la durée ? Premier crash test ce samedi 7 septembre, avec les manifestations organisées partout en France en opposition au « coup de force de Macron ». Seul le Parti socialiste a officiellement refusé de se joindre à l’appel des organisations de jeunesse, d’associations et de partis politiques (parmi lesquels La France insoumise, le PCF, les Écologistes, Génération⸱s...). « Le débat doit se faire à l’Assemblée, justifie auprès du HuffPost la députée PS des Yvelines Dieynaba Diop. Nous sommes des parlementaires, nous irons discuter. »

À l’inverse, Jean-Luc Mélenchon appelle à « la mobilisation la plus puissante possible ». Dans une courte vidéo enregistrée le 5 septembre en réaction à la nomination de Michel Barnier, le triple candidat à l’élection présidentielle explique qu’il en va du « respect de la démocratie », mais aussi du « respect de notre propre dignité de citoyennes et de citoyens » : « Nous sommes les seuls souverains de ce pays ». L’argumentaire n’est pas étonnant : de « marche contre le coup d’État social » en « fête à Macron », les Insoumis ont dans leur ADN la mobilisation de la rue, et donc du nombre, pour faire face au pouvoir en place.

« Débouché politique »

La date du 7 septembre a été choisie bien avant les annonces de ces derniers jours. Elle visait à accentuer la pression sur le chef de l’État, qui s’engluait dans des consultations sans fin, et à lui rappeler que les Français ont placé, en nombre de sièges, la gauche en tête le 7 juillet. Avec un Premier ministre libéral et conservateur, la journée prend désormais une autre dimension. Mais révèle aussi certaines failles internes au NFP.

« La mobilisation du 7 septembre, dans toutes les villes préfectures, sera le premier temps populaire de l’action. Le dépôt des motions de destitution et de censure ouvrira le débouché politique de ces actions de terrain. Elles en seront le prolongement naturel », écrivait Jean-Luc Mélenchon dans une note de blog le 29 août. En d’autres termes, et pour traduire la pensée du fondateur de La France insoumise, la censure et la destitution seront la suite logique des rassemblements de samedi. Pour la censure, aucun problème, l’ensemble des forces du NFP y sont prêtes. En revanche, pour la destitution, c’est plus compliqué. Les socialistes y sont unanimement opposés, alors que chez les Verts et les communistes, les lignes évoluent un peu. Côté écolo, Sandrine Rousseau et Benjamin Lucas ont signé la proposition de résolution, tout comme Émeline K/Bidi et Frédéric Maillot au groupe GDR.

Face à un pouvoir qui se tourne vers la droite et s’en remet à la clémence du RN, le NFP pourrait peu à peu se laisser tenter par un vote de la destitution. C’est en tout cas le pari de Jean-Luc Mélenchon. Au milieu de tout ça, Lucie Castets tente de maintenir une flamme qui a perdu en intensité depuis la nomination de Michel Barnier, mais qu’elle entend tant bien que mal préserver. La haute fonctionnaire envisage de multiplier les déplacements à la rencontre des Français dans les prochaines semaines. « J’irai surtout là où les gens votent RN, révèle-t-elle dans Mediapart. Ce sera probablement assez désagréable, mais si on ne reste qu’entre nous, on ne risque pas d’élargir le socle électoral de la gauche ».

A-t-elle vraiment le choix ? Sans mandat à défendre ni de combat électoral à mener, la candidate du NFP à Matignon, qui a quitté ses fonctions à la mairie de Paris, est contrainte de composer avec une actualité politique qui va désormais s’écrire sans elle. Sauf si le temps s’accélère. Puisqu’une nouvelle dissolution en 2025, voire une élection présidentielle anticipée en cas de blocage du pays, ne sont pas à exclure. D’où l’intérêt pour Lucie Castets de solidifier son capital politique en misant sur son principal atout : l’union de la gauche. Elle a fort à faire.

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