Manoeuvres et réflexions à six mois des européennes

Les partis français se mettent lentement en ordre de marche pour les élections européennes de mai 2019 via la recherche de candidats et l'élaboration d'un programme susceptible de toucher une opinion tentée, comme ailleurs, par le nationalisme. /Photo d'archives/REUTERS/Philippe Wojazer

PARIS (Reuters) - Les partis français se mettent lentement en ordre de marche pour les élections européennes de mai 2019 via la recherche de candidats et l'élaboration d'un programme susceptible de toucher une opinion tentée, comme ailleurs, par le nationalisme.

A six mois de l'échéance, dans un camp présidentiel au coude-à-coude avec le Rassemblement national autour de 20% dans les sondages, Emmanuel Macron a pris les choses en main, sans attendre l'élection du nouveau délégué général de La République en marche (LaRem) le 1er décembre.

L'un de ses proches conseillers, Stéphane Séjourné, dirigera la campagne en vue de laquelle des personnalités comme le journaliste Bernard Guetta sont pressentis pour figurer sur la liste commune LaRem-MoDem. et.

Depuis des mois, Emmanuel Macron dramatise les enjeux et théorise le duel entre les "progressistes", dont il se veut le chantre, et les "nationalistes" emmenés par le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, et l'Italien Matteo Salvini.

Une stratégie "terriblement cynique" selon le président des Républicains Laurent Wauquiez, qui entend, lui, incarner "une autre alternative démocratique dans le champ républicain par rapport à ce que peut représenter Emmanuel Macron".

Le nom de Jean Leonetti, président du Conseil national de LR, est cité pour figurer en tête de la liste du parti crédité d'environ 15% des intentions de vote dans les derniers sondages.

"SOUVERAINETÉ"

A ceux qui voient un signe envoyé à la droite dans l'emploi par Emmanuel Macron du mot "souveraineté", fréquent dans ses discours du centenaire de la Première Guerre mondiale, l'Elysée répond que "l'idée de souveraineté a, en réalité, précédé celle du clivage nationalistes-progressites."

"Il ne s'agit pas de faire du jivarisme politique en réduisant la tête des uns et des autres, soit au progressisme, soit au nationalisme, mais de poser un clivage global et ensuite faire en sorte que les questions se résolvent dans la question centrale de la souveraineté européenne", dit un conseiller.

La question environnementale, préoccupation majeure des électeurs a priori favorables au président, doit selon lui se traiter, comme d'autres, à l'échelle continentale.

"Sur les sujets environnementaux mais aussi militaires, scientifiques, éducatifs, sociaux, les travailleurs détachés, la suprématie des Gafa, etc. la souveraineté européenne consiste à dire que l'on résout mieux ces problèmes particuliers en les mettant en commun avec ses partenaires car ces problèmes, ils les partagent", explique-t-il

La plupart des grands partis attendent à la fin de l'année, voire début 2019, pour désigner leurs têtes de liste.

Une exception : Yannick Jadot, chef de file de la liste Europe Ecologie-Les Verts (EELV) depuis juillet. Il a fixé l'ambitieux objectif d'obtenir 15% des suffrages, score déjà dépassé en 2009 sous la baguette de Daniel Cohn-Bendit.

Crédité d'environ 2% des intentions de vote, le Parti communiste français (PCF) emmené aux européennes par l'adjoint au Logement de la mairie de Paris Ian Brossat, n'a pas renoncé à rassembler au-delà du parti, une position appelée à se préciser en congrès le 23 novembre. Une alliance avec le mouvement Génération.s de Benoît Hamon, qui garde l'oreille d'une partie des orphelins du Parti socialiste, semble possible.

Divisé en interne, comme en 2005, crédité d'environ 6% des intentions de vote pour l'instant, le Parti socialiste a reporté au 15 décembre son conseil national sur les européennes, qui coïncidera avec l'inauguration de son siège à Ivry-sur-Seine.

Plus de 200 cadres ont fait acte de candidature pour 79 places. L'idée de voir figurer sur la liste l'ancienne ministre Ségolène Royal, qui bondit dans les sondages, est écartée par son ancienne famille politique.

"Ségolène Royal n'est pas à jour de cotisation et n'a pas fait acte de candidature donc elle ne remplit pas les conditions fixées", note la formation dirigée par Olivier Faure.

L'INSOUMISE CHARLOTTE GIRARD JETTE L'ÉPONGE

Période compliquée aussi à La France insoumise (LFI) où Charlotte Girard, co-tête de liste au côté de Manuel Bompard, a jeté l'éponge jeudi, invoquant sur les réseaux sociaux des "contraintes personnelles" mais aussi "les conditions d'organisation" au sein de LFI.

Le coup est dur pour le camp de Jean-Luc Mélenchon, déjà ébranlé par les perquisitions menées le mois dernier au siège du parti et au domicile de son chef de file dans le cadre d'une enquête sur les comptes de la campagne présidentielle de 2017.

LFI s'allie pour les européennes avec le mouvement "Après" nouvellement créé par deux transfuges du PS, Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann.

Pendant ce temps, le Rassemblement national accompagne le mécontentement croissant d'une partie des Français, qui s'exprimera samedi dans tout le pays lors de la journée d'action dite des "Gilets jaunes".

En attendant la constitution d'une liste, que le député Louis Aliot aimerait diriger, des cadres se réunissent régulièrement pour parler stratégie.

Après avoir essayé en vain de rallier Marine Le Pen et Laurent Wauquiez à sa cause, le député de l'Essonne Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France, poursuit quant à lui son ascension dans les sondages, où il est crédité d'environ 6% des intentions de vote.

(Elizabeth Pineau avec Simon Carraud, édité par Yves Clarisse)