Manifestations: Le Parlement européen critique Paris sans le dire

Le Parlement européen a condamné jeudi la répression des manifestations pacifiques par la violence et a appelé les Etats à ne pas recourir à une force «disproportionnée» contre ceux qui protestent, sans pour autant mentionner en particulier la France ni aucun autre pays. /Photo prise le 2 février 2019/REUTERS/Philippe Wojazer

STRASBOURG (Reuters) - Le Parlement européen a condamné jeudi la répression des manifestations pacifiques par la violence et a appelé les Etats à ne pas recourir à une force «disproportionnée» contre ceux qui protestent, sans pour autant mentionner en particulier la France ni aucun autre pays.

La résolution a été adoptée par 438 voix contre 78 et 87 abstentions.

Un débat sur le droit à manifester pacifiquement lundi suivi du vote d'une résolution avaient été inscrits à l’ordre du jour de la session de février à l’initiative des partis de gauche français, qui souhaitaient réagir au nombre important de blessés comptabilisés durant trois mois de manifestations des «Gilets jaunes».

La délégation socialiste française au Parlement européen a donné un bilan (hors accidents aux ronds-points) d'un mort et de 1.700 blessés, dont 94 graves et 13 personnes ayant perdu un œil.

Faute d’un consensus avec la droite et les libéraux, la résolution finalement votée ne cite aucun pays – la Pologne, l’Espagne et la Roumanie étaient aussi visées – mais "condamne le recours à des interventions violentes et disproportionnées par les autorités publiques lors de protestations et de manifestations pacifiques".

Pas de condamnation, non plus, des armes à «létalité réduite» telles que les lanceurs de balles de défense ou les grenades de désencerclement qu’auraient voulu mentionner les socialistes, les Verts et la Gauche unie européenne (communistes et France insoumise).

En lieu et place, un amendement de la gauche confie à la commission des libertés civiles du Parlement le soin de préparer un rapport sur le sujet.

Un amendement socialiste reconnaît par ailleurs les conditions de travail « difficiles » de la police et « condamne tout acte de violence (…) perpétré (…) par des manifestants violents et radicaux qui ne participent aux manifestations que pour semer la violence ».

Un autre, émanant des Verts, « condamne l’adoption de lois qui restreignent la liberté de réunion dans plusieurs États membres ces dernières années », toujours sans en citer aucune.

Anticipant le caractère très modéré de la résolution, l’eurodéputée écologiste Eva Joly s’était inquiétée mardi d’une Europe dans laquelle «il y a des gens qui sont réputés être des bons élèves et des gens qui sont réputés être des élèves de seconde catégorie».

«Imaginons un instant que ce qui s’est passé en France se soit passé en Hongrie, ou en Pologne ou en Roumanie… », avait suggéré l’ancienne magistrate.

(Gilbert Reilhac édité par Danielle Rouquié)