Manifestation pro-Palestine à Paris: fallait-il interdire le rassemblement?

Des forces de l'ordre mobilisées face aux manifestants, samedi 15 mai 2021, lors du rassemblement interdit en soutien aux Palestiniens à Paris - Geoffroy Van Der Hasselt - AFP
Des forces de l'ordre mobilisées face aux manifestants, samedi 15 mai 2021, lors du rassemblement interdit en soutien aux Palestiniens à Paris - Geoffroy Van Der Hasselt - AFP

La journée a été mouvementée dans les rues parisiennes. Alors qu'elle avait été interdite par décision préfectorale, une manifestation de soutien au peuple palestinien avait lieu dans les rues de la capitale, dans les environs du quartier Barbès, où 2500 à 3500 personnes étaient mobilisées.

Si la situation s'est tendue au fil des heures, la situation est restée sous contrôle des plus de 4000 gendarmes présents pour l'occasion et ce samedi soir, 15 personnes sont actuellement gardées à vue. En outre, un gendarme a été blessé par un jet de projectiles.

A l'inverse, d'autres rassemblements, autorisés ceux-ci, ont également été organisés dans d'autres villes de France dont Lyon, Marseille, Lille ou encore Nice sans qu'aucun heurt n'aient été notés.

"On peut comprendre la frilosité des autorités"

De fait, la question de la contre-productivité de l'interdiction du rassemblement parisien se pose. Invité à notre antenne, Benjamin Morel, maître de conférence à l’Université Paris II Panthéon-Assas, tiens à rappeler que la décision préfectorale ne repose en aucun cas sur la nature même de la manifestation.

"L’objectif quand vous interdisez n’est pas de considérer que la cause est à l’origine de l’interdiction, ce qui étau problématique c’était le potentiel trouble à l’ordre public, soit matériel, ou immatériel avec des insultes et propos antisémites", explique-t-il.

Pour lui, de manière localisée, l'hypothèse de l'interdiction du rassemblement parisien paraît légitime.

"Au vu de ce qui s’est passé à Paris, l’idée d’une manifestation purement pacifique apparaît écartée. La grande différence entre cette manif et celle du premier mai c’est qu’il n’y a pas d‘organisation qui dispose d’un service d’ordre. Pour ces raisons-là, on peut comprendre la frilosité des autorités", ajoute-t-il.

Des manifestations "de paix"

De son côté, invitée sur notre antenne, Julie Garnier, oratrice nationale de La France Insoumise, estime que l'autorisation des manifestations écarterait tous risques de débordements lors des rassemblements.

"Pour les manifestations en France, la première chose serait de les autoriser puisqu’on voit que quand elles sont autorisées, elles se passent bien. On peut le constater en province et c’est ce qui s’est passé en 2014. Quand elles n’étaient pas autorisées, ça s’est mal passé, et quand elles ont été autorisées, comme le 23 juillet, tout s’est bien passé. Il faut faire redescendre la pression", assure-t-elle.

Selon elle, les manifestations prévues ce jour sont "de paix." "Tout le monde était invité, c'est àa le but d'une manifestation, tous les messages étaient de paix", rappelle-t-elle.

A cela, Prisca Thévenot, porte-parole LaREM, a convenu que "l'ensemble des manifestations se sont bien déroulées, avec une volonté d'appeler à la paix." Pourtant, cette dernière souligne que les décisions ont été prises localement.

"Il ne faut pas oublier qu'il y a un service de renseignements, qui sur des faits tangibles a remonté qu'il pouvait y avoir des débordements. Des recours ont été portés pour retoquer les interdictions, et elles ont été retoquées. A Paris, le tribunal n'a pas retoqué la décision et a validé l'interdiction. Cette manifestation n'a pas eu lieu, mais est-ce que pour autant les gens n'ont pas pu s'exprimer, je ne crois pas."

En guise de conclusion, Julie Garnier a averti sur un éventuel recul des libertés fondamentales en France. "Manifester doit être garanti par l’État, l’État doit être le facilitateur des rassemblements. Ce gouvernement a fait de notre pays une démocratie défaillante, il a fait reculer de nombreuses libertés fondamentales", estime-t-elle.

Article original publié sur BFMTV.com