Maltraitance dans les crèches: ces signes qui peuvent alerter les parents

Après avoir enquêté sur l'accompagnement des personnes âgées dans les Ehpad, Victor Castanet revient avec Les ogres, son nouveau livre en librairies ce mercredi 18 septembre. Le journaliste y expose les dérives de certaines crèches privées et dénonce des actes de maltraitance, y compris des violences physiques.

"Il y a cette crèche privée près de Lille, où il y a neuf enfants qui auraient été victimes de situation de maltraitance", affirme-t-il dans un entretien à l'AFP. "Des coups, des griffures, des punitions dans le noir, des humiliations, des privations de nourriture. Ces enfants font encore des cauchemars réguliers."

Des incidents rares, estime la pédiatre Fabienne Cahn-Sellem auprès de BFMTV.com, mais évidemment "insupportables". Pour les parents, ces histoires difficiles peuvent interroger en pleine période de rentrée. La spécialiste livre à BFMTV.com les signaux qui doivent attirer l'attention des pères et des mères.

• Tâter le terrain lors de la période d'adaptation

Tout débute à l'arrivée de l'enfant dans la crèche, durant la période dite d'"adaptation" qui dure en général deux semaines - les premiers moments de l'enfant dans un nouveau lieu. Les parents doivent chercher à lire l'attitude de l'auxiliaire référente: est-elle bienveillante? Empathique? Comment s'exprime-t-elle quand elle s'adresse aux parents? À l'enfant?

Si l'attitude ne témoigne pas en soi d'une maltraitance, ces éléments peuvent laisser entrevoir un "manque de bienveillance", des mots de la pédiatre. "C'est déjà embêtant, dommageable", souligne Fabienne Cahn-Sellem.

• Pleurs, inhibition... Les signes de "souffrance"

Une fois la période d'adaptation passée, d'autres signes de mal-être peuvent interpeller. Un enfant qui pleure ou crie excessivement en allant à la crèche peut être un indicateur.

"On peut dire qu'un enfant qui n'est pas heureux d'aller à la crèche au-delà de cette période d'adaptation, qui pleure en y allant ou qu'on retrouve ayant beaucoup, beaucoup pleuré ou avec la voix cassée (...) peut attirer l'attention", explique la professionnelle de santé.

À l'inverse, d'autres signes de "souffrance" peuvent être plus discrets. Plutôt que des démonstrations très visibles, ce sont des manques qui doivent mettre la puce à l'oreille. Par exemple, lorsqu'il enfant est "inhibé, qu'il ne gazouille plus" comme à l'accoutumé.

• Des blessures physiques inexpliquées?

Les abus physiques sont plus rares au sein des crèches, notamment grâce à la présence simultanée de plusieurs encadrants dans l'établissement. Mais la présence de traces inexpliquées peut être un signe d'alarme.

"Bien évidemment, s'il n'y a pas d'explication fiable sur une chute, un bleu, une blessure… Il faut que les parents aillent plus loin et essayent d'en savoir un peu plus. Même s'il est vrai que les auxiliaires n'ont pas l'œil rivé à 100%, en permanence, sur les enfants, c'est une partie de leur travail".

Plus largement, le fait qu'un ou une responsable ne puisse expliquer de manière précise ce qu'a fait l'enfant dans la journée, s'il a joué, mangé, dormi, peut être révélateur d’un souci.

• Couches sales, repas inadaptés: des signaux faibles

Certains actes, s'ils ne sont pas toujours assimilés à de la maltraitance, sont problématiques. C'est par exemple le cas des enfants qui conservent des couches souillées pendant trop longtemps, notamment dans les établissements qui ne les changent qu'à des heures fixes. Ce qui peut être révélé par l'apparition de dermite, une irritation de la peau.

Pour l'observer, il suffit d'une simple comparaison entre l'aspect du fessier du week-end et celle de la semaine. "Je demande aux parents: est-ce que vous trouvez que les fesses de votre enfant sont mieux le dimanche soir après l'avoir eu tout le week-end que la semaine? (...) Est-ce que le mardi soir il a de nouveau les fesses en feu, alors qu'on leur a confié le lundi matin avec des fesses parfaites?", conseille la pédiatre.

Autre problématique, les repas. Dans certains établissements, les portions ont tendance à rétrécir, malgré un plan national de recommandations en matière de nutrition.

Un point plus difficile à observer par les parents. Mais certains, comme à Vitrolles dans les Bouches-du-Rhône, ont réussi à l'identifier. "On n'était pas encore sorties de la crèche qu'elle demandait déjà le biberon, le lait, de l'eau ou des gâteaux", racontait en mars 2023 une mère au micro de BFM Marseille Provence. Une autre a tout bonnement décidé d'entrer dans l'établissement pour vérifier les portions - et a constaté de gros manquements.

• Des contrôles par les parents ou des professionnels?

Chaque parent ne peut pas décider d'inspecter la crèche à son bon vouloir un soir ou un matin. Des solutions pour un contrôle externe raisonnable existent toutefois à l'échelle locale, de l'expérience de la pédiatre. Dans certaines crèches, les parents désignent un délégué, comme ils le feraient dans les établissements scolaires. Eux pourraient s'assurer de la bonne conformité. "C'est un bon système", assure-t-elle.

La spécialiste regrette toutefois que les pédiatres n'interviennent plus dans les établissements. Les professionnels y faisaient de la formation et pouvaient détecter des potentielles maltraitances. Désormais, des référents santé, qui ne sont pas présents sur place en permanence, assurent cette mission.

Article original publié sur BFMTV.com