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A Magdebourg, dans l'est de Allemagne, l'AfD célèbre sa percée

par Joseph Nasr MAGDEBOURG, Allemagne (Reuters) - A Magdebourg, dans l'est de l'Allemagne, les partisans du parti anti-immigration AfD (Alternative pour l'Allemagne) ont célébré à grand bruit dimanche leur percée à l'occasion des élections régionales, avec un score encore impensable il y a un an. "Quelle soirée extraordinaire, quel résultat brillant !", a martelé Andre Poggenburg, le chef de l'AfD pour le Land de Saxe-Anhalt, dont Magdebourg est la capitale. Dans un discours enflammé, il s'est réjoui des plus de 24% des voix obtenus par son parti, qui arrive pour la première fois de sa courte histoire en deuxième position dans un scrutin régional. "Nous avons combattu comme des lions pour notre terre", a ajouté l'orateur en qualifiant Angela Merkel de "pire chancelier de l'histoire allemande". Formé il y a trois ans pour s'opposer aux plans de sauvetage de l'euro, l'AfD s'est métamorphosé au cours de l'année écoulée en parti hostile aux immigrés après s'être débarrassé de son fondateur Bernd Lucke. Sa nouvelle patronne, la chimiste Frauke Petry, prononce des discours incendiaires contre Angela Merkel et a créé un tollé en réclamant que la police puisse avoir le droit, en dernier recours, d'ouvrir le feu sur les migrants à la frontière. Outre le résultat en Saxe-Anhalt, l'AfD a remporté 15% des voix dans le prospère Bade-Wurtemberg, et plus de 12% en Rhénanie-Palatinat. Les sondages de sortie des urnes montrent que la formation d'extrême droite a attiré les suffrages des électeurs qui n'avaient jamais voté précédemment mais aussi des milliers d'électeurs traditionnels de l'Union chrétienne-démocrate (CDU) d'Angela Merkel, en particulier dans le Bade-Wurtemberg. "NOUS VOULONS DES ÉTRANGERS QUI S'INTÈGRENT" Alors que les partis populistes et hostiles à l'immigration prospèrent depuis des années dans les autres pays européens, l'Allemagne restait une exception, en raison notamment de son opposition aux idéologies d'extrême droite liée au passé nazi du pays. Mais la crise migratoire a bouleversé la donne. Aux dernières élections législatives fédérales, en 2013, l'AfD n'était pas parvenue à franchir le seuil des 5% des voix requis pour entrer au Bundestag, il est désormais présent dans la moitié des seize parlements régionaux du pays. Venu de Hambourg avec d'autres membres de l'AfD, Gerlach Holm, 67 ans, juge que Frauke Petry est allée trop loin dans ses propos mais, dit-il, "nous ne sommes pas contre les étrangers". "Nous avons besoin des étrangers car nous avons de faibles taux de natalité et nous sommes de plus en plus vieux. Mais nous voulons des étrangers qui s'intègrent", ajoute-il. Alors qu'aucun parti allemand n'envisage de gouverner en coalition avec l'AfD, Thorsten, un commercial âgé de 48 ans, dit qu'"il n'a pas voté pour l'AfD parce qu'il s'attend à ce qu'il gouverne", mais qu'il "a voté pour l'AfD pour protester contre la politique du gouvernement fédéral". Il préfère taire son nom de famille, de peur de se faire licencier par son employeur. "Je n'ai jamais demandé à Mme Merkel d'ouvrir les frontières allemandes à tout le monde", ajoute-t-il. "C'est bien de laisser les gens fuir des conflits, mais pas tout le monde." Nico Braun, un homme de 41 ans, se réjouit beaucoup moins de cette soirée électorale. En entrant dans un bar situé de l'autre côté de la rue, il lance au propriétaire turc: "Est-ce que l'AfD est partie ou bien il faut que je dise Heil Hitler?" (Jean-Stéphane Brosse pour le service français)