Les méga feux comme au Canada auront des conséquences sur la planète même une fois éteints

Les méga feux auront des conséquences sur la planète même une fois éteints
Les méga feux auront des conséquences sur la planète même une fois éteints

ENVIRONNEMENT - Feux de forêt rime souvent avec perte d’arbres et de biodiversité : oui, mais pas que. Les incendies de cet été 2023 « sortent de la moyenne parce qu’ils ont commencé très tôt, en particulier au Canada », explique au HuffPost Jean-Baptiste Filippi, chercheur au laboratoire Sciences pour l’environnement du CNRS.

Résultat ? Ils ont émis à eux seuls l’équivalent de plus d’un milliard de tonnes de dioxyde de carbone (CO2), ce qui correspond aux émissions annuelles globales du Japon, cinquième plus gros pollueur mondial.

Cela s’explique par le rôle des arbres : ce sont des puits de carbone, c’est-à-dire que tout au long de leur vie, ils absorbent et stockent énormément de CO2. Mais lorsqu’ils brûlent, c’est la double peine : « déjà parce qu’un arbre mort ne peut plus jouer ce rôle d’absorption de CO2, mais surtout parce que sa combustion rejette l’équivalent de tout ce qu’il avait stocké », pointe Pierre Carrega, climatologue et professeur à l’Université Côte d’Azur interrogé par Le HuffPost.

Un phénomène à relativiser

En tout, « les incendies sont responsables de 20 % des émissions annuelles mondiales de CO2 » détaille Jean-Baptiste Filippi. Mais ce dernier nuance : « Ces 20 % là ont plus ou moins toujours existé, parce que ce sont des incendies qui ont toujours eu lieu ». Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, il y a bel et bien du bon dans ces feux de forêts. « Les forêts doivent brûler pour laisser la place à des arbres plus jeunes et vigoureux. Et un certain nombre d’entre eux vont tomber au sol, et seront mangés par les insectes. Donc même l’écosystème dépend de ces feux », assure le chercheur du CNRS.

Les feux de cette année pourraient même avoir, à court terme, des effets positifs. « Paradoxalement, les incendies au Canada ont refroidi l’atmosphère parce qu’ils ont masqué tellement de surface terrestre que cela a renvoyé beaucoup de rayonnements solaires vers l’espace » détaille encore Jean-Baptiste Filippi. Il y a donc un effet plutôt positif sur le changement climatique, mais uniquement localement, et surtout à court terme.

Car malgré cela, sur le long terme, la situation est bien en train de se dégrader. Pour Jean-Baptiste Filippi, si le phénomène des incendies est normal en soi, les mauvaises années de la sorte, avec des méga feux, sont de plus en plus fréquentes : « Avant, la période moyenne entre les mauvaises années était de quinze ans, maintenant elle est plutôt de l’ordre de deux ou trois ans ». Une nouvelle ampleur qui ne présage rien de bon.

Des impacts sanitaires à prendre en compte

D’autant plus que les effets des feux de forêts ne sont pas seulement climatiques. Le climatologue Pierre Carrega souligne qu’ils n’émettent pas que du dioxyde de carbone. Trop souvent oubliés, d’autres gaz et particules fines sont émis dans l’atmosphère, et sont dangereux pour la santé humaine.

La combustion des forêts rejette en effet du dioxyde d’azote et des particules très fines, appelées PM10 car elles mesurent moins de 10 micromètres. Se dessinent alors deux aspects : « Il y a déjà un effet mécanique. Les particules très fines, une fois inhalées, ne sont pas renvoyées et pénètrent donc dans les bronches. Il y a aussi un effet chimique, puisque certains types de constituants ainsi que le dioxyde d’azote peuvent affecter les cellules elles-mêmes », explique Pierre Carrega.

Ce risque sanitaire dépend de la distance qui sépare les feux de la population. Certains incendies canadiens, éloignés des zones d’habitations, n’ont donc pas le même impact que ceux qui ont touché la Grèce par exemple, qui étaient à proximité de régions peuplées, et qui ont forcé certaines personnes à être évacuées.

Quoi qu’il en soit, Jean-Baptiste Filippi et Pierre Carrega s’accordent sur le fait que malgré tous les enjeux qui entourent les feux de forêts, « il ne faut pas généraliser le côté extrême de cette année 2023 dans certains pays », mais plutôt prendre en compte toutes les données accumulées sur le long terme.

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