Médecine psychédélique et maladies mentales : une étude inédite menée en France
Malgré son histoire mouvementée, la médecine psychédélique gagne du terrain en France. Le CHU de Nîmes a lancé en février 2024 le premier essai clinique tricolore dans ce domaine depuis les années 1960. Neuf mois après son démarrage, retour sur cette étude pilote avec l’addictologue Amandine Luquiens.
Février 2024 a vu le lancement officiel de la toute première étude en France depuis les années 1960 portant sur l’intérêt thérapeutique des substances psychédéliques sur des sujets humains. Cette étude académique monocentrique (menée dans un seul centre de recherche) se déroule au sein du service d’addictologie du CHU de Nîmes.
Les psychédéliques pour traiter l'addiction à l'alcool associée à la dépression
Il s’agit d’une étude pilote randomisée : parmi les 30 patients inclus, une partie reçoit une dose importante de psilocybine (25 mg), substance psychédélique active issue des "champignons magiques", et l’autre partie reçoit une très faible dose (1 mg), et ce en double aveugle. C'est-à-dire que ni les patients ni l’équipe de chercheurs ne connaissent les doses administrées. L’objectif de cette étude est de vérifier l’acceptabilité et la faisabilité de la psychothérapie assistée par psychédéliques (PAP) pour traiter l’addiction à l’alcool associée à la dépression.
Cette pathologie dite duelle (associant deux affections mentales) rend les patients très vulnérables avec un risque de rechute important. "L’addiction à l’alcool est une maladie chronique, souvent aggravée par la dépression," nous explique Amandine Luquiens, psychiatre addictologue et professeure en addictologie au CHU de Nîmes et à l’université de Montpellier, qui dirige l’étude. "Les patients concernés ont généralement des parcours très difficiles avec de nombreuses tentatives de sevrage infructueuses. Les personnes qui m’ont contactée pour cette étude envoient des emails extrêmement touchants dans lesquelles elles expliquent leur parcours extrêmement difficile et comment les stratégies conventionnelles (antidépresseurs, anxiolytiques, psychothérapie, groupes d'entraide type Alcooliques Anonymes, ndlr) n’ont pas été suffisantes pour les aider."
Séance de psychothérapie, illustration. Crédit : MICROGEN IMAGES / SCIENCE PHOTO LI / SMD / Science Photo Library via AFP