L'UE tente une nouvelle approche face aux migrations africaines

Des migrants secourus en Méditerranée. Pour tenter de réduire le flot de candidats en quête d'une vie meilleure qui tentent par milliers de rejoindre l'Europe, l'UE propose des accords commerciaux et des investissements à des pays africains. /Photo prise le 20 octobre 2016/Yara Nardi/Croix rouge italienne

par Francesco Guarascio BRUXELLES (Reuters) - Les dirigeants de l'Union européenne se sont mis d'accord jeudi pour accélérer la lutte contre l'immigration illégale en provenance des pays africains, après avoir quasiment tari les flux en provenance de Turquie. L'accord conclu en mars dernier avec Ankara a permis de réduire quasiment à néant les arrivées de migrants sur les îles grecques de la mer Egée. Mais dans le même temps, les arrivées en Italie en provenance d'Afrique ont augmenté. Pour tenter de réduire le flot de candidats en quête d'une vie meilleure qui tentent par milliers de traverser la Méditerranée, l'UE propose des accords commerciaux et des investissements à des pays africains. "Il ne s'agit pas seulement d'argent, il s'agit d'améliorer les capacités et les chances des habitants de ces pays, et donner de l'espoir", a déclaré à son arrivée au sommet de Bruxelles Angela Merkel. La chancelière veut faire de l'Afrique une priorité de la présidence allemande du G20 l'an prochain et prévoit d'organiser à Berlin une conférence consacrée au développement du continent. En échange d'un soutien financier, les Européens demandent à leurs partenaires africains de renforcer les contrôles à leurs frontières et d'accepter le retour d'immigrés illégaux. "Davantage d'efforts sont nécessaires pour tarir le flot de migrants illégaux, provenant d'Afrique en particulier, et d'améliorer les taux de retour", peut-on lire dans le communiqué commun relatif à l'immigration adopté par les dirigeants des Vingt-Huit. Ces derniers ont donné leur aval à un plan préparé par la Haute Représentante pour les Affaires étrangères de l'Union, Federica Mogherini, visant à appliquer cette nouvelle approche avec cinq pays: le Niger, le Nigeria, le Mali, le Sénégal et l'Ethiopie. Les premiers résultats de ce projet seront présentés par Federica Mogherini lors du prochain sommet européen, en décembre, avec l'idée d'étendre l'expérience à d'autres pays. Parmi les autres Etats visés figurent l'Erythrée, souvent qualifié de Corée du Nord de l'Afrique en raison de l'opacité de son régime et de ses mauvaises performances en matière de respect des droits de l'Homme. Une situation qui fait des migrants érythréens des candidats sérieux à l'obtention du droit d'asile dans les pays de l'Union européenne. Les diplomates italiens ont salué cette nouvelle démarche à l'égard de l'Afrique, qui rejoint la volonté de Rome de s'attaquer aux sources mêmes des migrations. Selon des responsables, la référence à l'effort financier "significatif" de l'Italie faite dans le texte des Vingt-Huit peut être considérée comme une victoire personnelle pour le président du Conseil italien, Matteo Renzi. Le Parlement italien a fixé pour l'an prochain un objectif de déficit budgétaire à 2,3% du PIB, au lieu des 1,8% sur lesquels Rome s'était engagé en mai dernier. Mais Matteo Renzi réclame de la Commission européenne que les dépenses exceptionnelles liées dépenses au séisme d'août dernier à Amatrice et à l'accueil des migrants ne soient pas comptées dans le déficit. L'Italie a accueilli 154.000 migrants l'année dernière, un niveau qui devrait être atteint voire dépassé cette année. Dans la seule journée de jeudi, plus de 1.400 migrants massés sur des bateaux ont été secourus au large des côtes libyennes, selon un communiqué des garde-côtes italiens. (avec Steve Scherer à Rome; Elizabeth Pineau pour le service français)