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L'UE durcit encore le ton contre la Pologne

La Commission européenne a engagé mercredi une procédure d'infraction contre la Pologne pour non-respect du droit de l'Union, en réaction à une loi sur les tribunaux de droit commun promulguée la veille par le président Andrzej Duda. /Photo prise le 21 juillet 2017/REUTERS/Kacper Pempel

BRUXELLES (Reuters) - La Commission européenne a engagé mercredi une procédure d'infraction contre la Pologne pour non-respect du droit de l'Union, en réaction à une loi sur les tribunaux de droit commun promulguée la veille par le président Andrzej Duda. Bruxelles a indiqué qu'une lettre de mise en demeure serait envoyée à Varsovie dès que cette loi, qui permet au ministre de la Justice de nommer et révoquer les magistrats présidant les tribunaux ordinaires, aura été publiée au Journal officiel. L'exécutif européen a également donné un mois à Varsovie pour répondre à ses inquiétudes concernant l'état de droit en Pologne. Ces inquiétudes, déjà formulées dans le cadre d'une procédure de sauvegarde de l'état de droit engagée en janvier 2016, sont aggravées par les projets de réforme de la justice, souligne-t-il. "L'indépendance de la justice est une condition préalable essentielle pour adhérer à notre Union", a déclaré le président de la Commission Jean-Claude Juncker dans un communiqué. "L'UE ne peut donc accepter un système qui permet de révoquer des juges à discrétion." "Si le gouvernement polonais persévère à compromettre l'indépendance de la justice et l'état de droit en Pologne, nous n'aurons pas d'autre choix que de déclencher la procédure de l'article 7", poursuit-il. L'article 7 du traité de l'UE peut aboutir à une suspension du droit de vote au Conseil européen d'un Etat membre en cas de non-respect des valeurs communes de l'Union. Il permet dans un premier temps d'émettre un avertissement formel à la majorité des quatre cinquièmes du Conseil européen. MANIFESTATIONS Après une semaine de manifestations massives contre les projets de réforme de la justice du parti ultraconservateur PiS (Droit et Justice) au pouvoir, le président Duda a opposé lundi son veto à deux lois, dont l'une aurait permis de révoquer les juges de la Cour suprême, avant d'approuver le lendemain la loi sur les tribunaux de droit commun. La Première ministre Beata Szydlo a toutefois assuré ensuite que son gouvernement ne renoncerait pas à ses projets, qui visent selon elle à réformer un système grippé et à obliger davantage les juges à rendre des comptes aux justiciables. Du côté de l'opposition, on dénonce des lois liberticides, qui s'ajoutent à la mise au pas par le PiS, au pouvoir depuis 2015, du Tribunal constitutionnel et des médias publics. "Il est temps de rétablir l'indépendance du Tribunal constitutionnel, et soit d'abroger les lois réformant le pouvoir judiciaire, soit de les rendre conformes à la Constitution polonaise et aux normes européennes en matière d'indépendance de la justice", a souligné le premier vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans. Réagissant à ces propos, le porte-parole du gouvernement Rafal Bochenek a déclaré qu'il ne "tolérerait aucun chantage de la part de responsables européens, en particulier de chantage qui ne s'appuie pas sur des faits". "Nous regrettons que M. Timmermans exprime des critiques blessantes contre la Pologne sans connaître les projets de loi ni la législation polonaise", a-t-il ajouté. Le porte-parole du gouvernement de Varsovie a toutefois souligné qu'il restait ouvert au dialogue avec Bruxelles. (Jan Strupczewski; Jean-Stéphane Brosse pour le service français)