Publicité

La France veut une position européenne ferme face à l'Iran

La France a appelé lundi l'Union européenne à envisager de nouvelles sanctions contre l'Iran pour son implication dans la guerre en Syrie. "Nous sommes déterminés à nous assurer que l'accord de Vienne est respecté", a indiqué le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. /Photo prise le 5 janvier 2018/REUTERS/Benoit Tessier

par Robin Emmott

BRUXELLES (Reuters) - La France a appelé lundi l'Union européenne à envisager de nouvelles sanctions contre l'Iran pour son implication dans la guerre en Syrie et pour la poursuite de son programme balistique tout en essayant de convaincre les Etats-Unis de ne pas remettre en cause l'accord de 2015 sur le programme nucléaire iranien.

Donald Trump a donné aux signataires européens de cet accord jusqu'au 12 mai pour "réparer les affreuses erreurs" de ce texte ratifié par l'administration de Barack Obama, faute de quoi il refusera de prolonger l'assouplissement des sanctions américaines contre la république islamique.

Face à cette pression américaine, la France, la Grande-Bretagne et l'Allemagne ont proposé dans un document confidentiel de nouvelles sanctions européennes pour le soutien qu'apporte Téhéran au gouvernement de Bachar al Assad et pour son programme de missiles balistiques.

"Nous sommes déterminés à nous assurer que l'accord de Vienne est respecté", a déclaré le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian devant la presse avant des entretiens avec ses homologues européens à Bruxelles.

"Mais nous ne pouvons pas exclure la responsabilité de l'Iran dans la prolifération de missiles balistiques, ni son rôle très discutable au Proche et au Moyen-Orient", a-t-il dit. "Cela doit aussi être discuté pour parvenir à une position commune."

TÉHÉRAN CRITIQUE LE DRIAN

En réponse aux propos de Jean-Yves Le Drian, le ministère iranien des Affaires étrangères a réaffirmé qu'il ne pouvait y avoir négociation sur des armes que Téhéran présente comme purement défensives.

"Nous espérions qu'après sa récente visite à Téhéran (début mars, NDLR) et ses négociations avec les responsables iraniens, (Jean-Yves Le Drian) comprendrait les réalités de la politique de défense iranienne", a déclaré Bahram Qasemi, porte-parole du ministère, cité par l'agence de presse Fars.

Le document confidentiel cite "des transferts de missiles et de technologies balistiques" vers la Syrie et les alliés de l'Iran comme les rebelles houthis au Yémen ou le Hezbollah au Liban.

L'échéance fixée par Donald Trump étant encore jugée lointaine, la réunion de lundi a été avant tout l'occasion pour les ministres des Affaires étrangères européens de discuter de la stratégie à adopter face au président américain sur ce dossier et la question des sanctions n'a pas dominé le débat, indiquent des diplomates.

Si l'UE se prononçait en faveur de nouvelles sanctions, il s'agirait des premières dispositions punitives depuis la levée des sanctions économiques après l'accord de 2015 sur le programme nucléaire iranien conclu entre Téhéran et le groupe P5+1 (USA, Chine, Russie, France, Grande-Bretagne et Allemagne).

De nouvelles sanctions ne pourraient être approuvées qu'à l'unanimité des 28 Etats membres de la communauté dont certains sont enclins à renouer des partenariats économiques avec un pays qui fut autrefois un allié commercial privilégié.

"Nous devons examiner toutes les mesures envisageables afin d'avoir le même type de pression que nous avons eue dans le dossier nucléaire", a commenté Didier Reynders, le ministre belge des Affaires étrangères.

En privé, certains ministres ont dit s'inquiéter de la décision de Donald Trump de remplacer Rex Tillerson par Mike Pompeo à la tête du département d'Etat et plusieurs ont mis en garde contre le risque réel d'un retrait de l'administration américaine de l'accord de Vienne.

Le sénateur américain Bob Corker, président de la commission sénatoriale des Affaires étrangères, a dit s'attendre dimanche à ce que Donald Trump annonce en mai la sortie des Etats-Unis, à moins que les gouvernements européens "s'entendent vraiment sur un cadre".

Federica Mogherini, en charge de la diplomatie européenne, qui présida les derniers tours de table sur l'accord nucléaire, a indiqué qu'il n'y avait pas de position officielle de l'UE sur de nouvelles sanctions.

(Robin Emmott; Pierre Sérisier et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)