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L'UE condamne les bombardements russes en Syrie

A Alep. L'Union européenne a condamné lundi les frappes aériennes russes en Syrie, qui pourraient constituer selon elle des crimes de guerre, et a promis d'imposer de nouvelles sanctions aux autorités syriennes. /Photo prise le 17 octobre 2016/REUTERS/Abdalrhman Ismail

par Robin Emmott LUXEMBOURG (Reuters) - L'Union européenne a condamné lundi les frappes aériennes russes en Syrie, qui pourraient constituer selon elle des crimes de guerre, et a promis d'imposer de nouvelles sanctions aux autorités syriennes. Les ministres des Affaires étrangères des 28 ont en outre réclamé un cessez-le-feu immédiat à Alep-Est, cible de la vaste offensive des forces syriennes appuyées par l'aviation russe depuis la fin, le 19 septembre, d'une trêve négociée par Moscou et Washington. "Depuis le début de l'offensive lancée par le régime et ses alliés, notamment la Russie, l'intensité et l'ampleur des bombardements aériens dans l'est d'Alep sont manifestement disproportionnées", disent-ils dans un communiqué diffusé à l'issue de leur réunion à Luxembourg. "Viser délibérément des hôpitaux, le personnel médical, des écoles et des infrastructures essentielles, ainsi que l'utilisation de barils d'explosifs, de bombes à fragmentation et d'armes chimiques, pourraient constituer des crimes de guerre", soulignent-ils, plaidant pour la saisie de la Cour pénale internationale (CPI), sans avancer de calendrier ni détailler leurs intentions. Ils souhaitent par ailleurs que Federica Mogherini, Haute Représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, joue un rôle plus important dans les discussions avec les pays de la régions, notamment la Turquie, l'Iran et l'Arabie saoudite. Le communiqué, d'une fermeté sans précédent à l'égard de la Russie et de son rôle en Syrie, est le fruit de plusieurs jours de négociations avec les Etats membres les plus proches de Moscou. Il s'agit par ailleurs de la deuxième offensive diplomatique européenne après celle aux Nations unies, où la Russie a opposé son veto le 8 octobre à une résolution présentée par la France et l'Espagne. "LA PRESSION DOIT ÊTRE FORTE" La France et la Grande-Bretagne n'ont pas ménagé leurs efforts pour convaincre leurs partenaires européens de condamner les frappes russes en Syrie et d'imposer de nouvelles sanctions au régime syrien. "La pression (sur la Russie) doit être forte", a commenté le chef de la diplomatie française. "Plus l'Union européenne montre unité et détermination, plus nous pouvons progresser vers ce qui est une obligation morale: arrêter le massacre de la population d'Alep", a poursuivi Jean-Marc Ayrault, s'adressant à la presse. "Il est vital de maintenir la pression et nous proposons beaucoup de mesures, de nouvelles sanctions contre le régime syrien et ses partisans", avait déclaré dimanche le secrétaire au Foreign Office, Boris Johnson, après une réunion à Londres avec son homologue américain John Kerry. Les pays de l'UE sont divisés sur la stratégie à adopter à l'égard de la Russie dans le conflit syrien et sur la question des sanctions à l'égard du principal fournisseur d'énergie du bloc communautaire. Paris et Londres sont favorables à une interdiction de territoire et à un gel des avoirs à l'encontre de 20 personnalités syriennes soupçonnées de diriger les attaques contre les civils assiégés dans les quartiers est d'Alep. Ces mesures s'ajouteraient aux sanctions existantes et à l'embargo sur le pétrole et les armes décidé par l'UE. Dans leur communiqué, les ministres des Affaires étrangères promettent d'agir rapidement "avec l'objectif d'imposer de nouvelles mesures restrictives à la Syrie, à des personnalités syriennes et à des entités qui soutiennent le régime aussi longtemps que la répression se poursuivra". L'AUTRICHE CONTRE, L'ALLEMAGNE HÉSITANTE Britanniques et Français ont évoqué la possibilité de sanctions contre 12 Russes impliqués dans le conflit, qui viendraient s'ajouter à une liste européenne d'environ 200 personnes, dont trois Iraniens, précisent des diplomates. John Kerry a confirmé dimanche après sa rencontre avec Boris Johnson que les Etats-Unis et la Grande-Bretagne réfléchissaient à l'instauration de nouvelles sanctions contre la Syrie. La question des sanctions contre la Russie devrait être évoquée lors du sommet européen jeudi et vendredi à Bruxelles mais les plus proches alliés européens de Moscou - la Grèce, Chypre ou la Hongrie - pourraient refuser de s'engager dans cette voie, de crainte d'irriter le Kremlin. L'Autriche, point de transit pour l'acheminement du gaz russe vers l'Europe de l'Ouest, a également fait part lundi de son opposition au projet de sanctions. "Mettre en place des sanctions supplémentaires contre la Russie serait une mauvaise chose", a dit à la presse le chef de la diplomatie autrichienne, Sebastian Kurz. "Nous n'avons pas besoin d'une nouvelle escalade", a-t-il ajouté. L'Allemagne, qui ne souhaite pas accentuer les tensions dues aux sanctions prises après l'annexion de la Crimée en mars 2014, se montre quant à elle hésitante. (Robin Emmott; Julie Carriat, Pierre Sérisier, Eric Faye et Jean-Philippe Lefief pour le service français)