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L'Onu réclame une trêve d'au moins un mois en Syrie

par Tom Perry

BEYROUTH (Reuters) - Les représentants des Nations unies en Syrie ont appelé mardi à un cessez-le-feu immédiat d'au moins un mois afin de permettre l'acheminement de l'aide humanitaire, alors que des bombardements aériens faisaient des dizaines de morts dans des zones rebelles près de Damas et dans le nord-ouest du pays.

Les dernières frappes aériennes sur la Ghouta orientale, zone tenue par les rebelles près de Damas, ont fait mardi 63 morts, rapporte l'Observatoire syrien des droits de l'homme(OSDH). Un responsable local, Khalil Aybour, a fait état de 53 morts.

Lundi, des bombardements aériens avaient fait 30 morts dans le même secteur.

"Aujourd'hui, il n'y a plus aucun lieu sûr. Au moment où je vous parle, il y a des gens sous les décombres, les raids des avions se poursuivent sur les quartiers d'habitation", a déclaré à Reuters Siraj Mahmoud, le chef de la Défense civile dans ce bastion assiégé de l'opposition.

Dans la province d'Idlib (nord-ouest), les bombardements sur les zones rebelles ont fait six morts, dont cinq dans le village de Tarmala.

Damas, la capitale, a été visée par des tirs de l'artillerie rebelle qui ont fait trois morts, rapportent les médias gouvernementaux et l'OSDH.

Paulo Pinheiro, qui dirige la commission d'enquête internationale sur la Syrie, a dénoncé le siège de la Ghouta par les forces gouvernementales, ainsi que "les bombardements aveugles et la famine imposée à la population civile".

Les frappes aériennes ont touché au moins trois hôpitaux ces dernières quarante-huit heures et les "prétendues zones de désescalade" ne sont plus qu'une "farce", a-t-il ajouté.

CRISE HUMANITAIRE

Des obus tirés de la région d'Afrin sont par ailleurs tombés sur un camp de réfugiés à Atmeh, près de la frontière syro-turque, faisant un mort.

Dans un communiqué, le coordinateur humanitaire de l'Onu en Syrie et d'autres représentants de l'Onu mettent en garde "contre les terribles conséquences de la crise humanitaire qui s'aggrave dans plusieurs parties du pays". Ils demandent un arrêt des hostilités pendant au moins un mois.

La Ghouta orientale n'a plus reçu d'aide humanitaire depuis le mois de novembre, soulignent les représentants de l'Onu.

"Pendant ce temps-là, les combats et les bombardements de représailles de toutes les parties ont des conséquences sur les civils dans cette région et à Damas, causant de nombreuses victimes", insistent-ils.

Dans la province d'Idlib, les civils se déplacent sans cesse pour échapper aux affrontements. Quelque deux millions de personnes vivent dans la province, dont un million de déplacés.

L'Onu a par ailleurs annoncé qu'elle voulait enquêter sur les informations faisant état de l'utilisation de chlore lors de bombardements de l'armée syrienne contre des civils à Sarakeb, dans la province d'Idlib, et à Douma, dans la Ghouta orientale.

D'après des secouristes et des médecins syriens, une dizaine de personnes ont été atteintes de troubles respiratoires après des attaques à l'arme chimique.

"MANOEUVRES AMÉRICAINES"

La situation s'est encore compliquée depuis l'offensive menée depuis fin janvier par l'armée turque dans la région d'Afrin, contrôlée par les miliciens kurdes des Unités de protection du peuple (YPG) dans le nord de la Syrie.

Mardi, le président turc Recep Tayyip Erdogan a une nouvelle fois demandé le retrait des militaires américains présents aux côtés des combattants kurdes et arabes qui contrôlent la ville de Manbij, à une centaine de kilomètres à l'est d'Afrin.

Les Etats-Unis disposent de 2.000 hommes dans la région, officiellement dans le cadre de la coalition internationale de lutte contre les djihadistes de l'Etat islamique (EI).

"Si les Etats-Unis nous disent qu'ils envoient 5.000 camions et 2.000 avions de transport (en Syrie) pour le combat contre Daech, nous ne les croirons pas", a dit le président turc, évoquant des manoeuvres américaines "contre la Turquie et l'Iran, et peut-être la Russie".

En accord avec l'Iran et la Russie, l'armée turque installe des postes d'observation dans la région d'Idlib et la province d'Alep.

Une attaque à la roquette et au mortier contre un de ces postes en cours d'installation dans la province d'Idlib a fait un mort et cinq blessés lundi parmi les soldats turcs.

Les forces gouvernementales syriennes ont de leur côté annoncé le déploiement de nouvelles défenses aériennes sur les lignes de front avec les rebelles dans les régions d'Alep et Idlib.

Par ailleurs, le corps du commandant russe Roman Fillipov, tué en affrontant les rebelles après la destruction de son avion SU-25 par un missile samedi dans le nord de la Syrie, a été rapatrié en Russie, a annoncé le ministère russe de la Défense. Sa dépouille a pu être récupérée grâce à l'aide des autorités turques, ajoute le ministère.

(Avec Lisa Barrington; Daren Butler et Orhan Coskun à Istanbul, Stephanie Nebehay à Genève, Polina Ivanova et Maria Kiselyova à Moscou; Danielle Rouquié, Guy et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)