L'Onu parle de milliers de détentions arbitraires au Venezuela

par Stephanie Nebehay GENEVE (Reuters) - Les forces de sécurité du Venezuela font preuve d'un recours excessif à la force qui a fait des dizaines de morts pour réprimer les manifestations contre le président Nicolas Maduro et ont arbitrairement placé en détention plus de 5.000 personnes depuis avril, dont plus d'un millier sont toujours emprisonnées, a déclaré mardi le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH). Le HCDH appelle le gouvernement vénézuélien à maîtriser les forces de sécurité, à enquêter sur les soupçons d'atteintes aux droits de l'homme, à libérer les personnes détenues de manière arbitraire et à garantir la protection de la procureure générale tout juste limogée, Luisa Ortega. Alors que l'opposition est majoritaire au parlement monocaméral, Nicolas Maduro a organisé l'élection d'une assemblée constituante entrée en fonctions vendredi, malgré plusieurs semaines de contestation dans la rue et les condamnations internationales face à cette initiative jugée contraire aux principes démocratiques. "Nous sommes préoccupés par le fait que la situation au Venezuela s'aggrave et par le fait que ces atteintes aux droits de l'homme ne montrent aucun signe d'apaisement, nous sommes donc inquiets de la direction dans laquelle il se dirige", a dit une porte-parole du HCDH, Ravina Shamdasani, devant la presse à Genève. LA RESPONSABILITÉ "AU PLUS HAUT NIVEAU DU GOUVERNEMENT" Cité dans un communiqué, le Haut Commissaire de l'Onu aux droits de l'homme, Zeid Ra'ad al Hussein, a pour sa part déclaré: "Ces violations se produisent dans un contexte d'effondrement de l'Etat de droit au Venezuela, avec des attaques constantes du gouvernement contre l'Assemblée nationale et les services du procureur général." "La responsabilité des atteintes aux droits de l'homme que nous signalons repose au plus haut niveau du gouvernement", a-t-il ajouté. Exposant les conclusions préliminaires tirées de 135 entretiens conduits à distance et au Panama, le HCDH dit avoir enquêté sur 124 décès et en avoir attribué 46 aux forces de sécurité et 27 à des groupes armés progouvernementaux. Des doutes persistent sur les 51 autres. "Des témoins ont parlé de forces de sécurité tirant sans sommation des grenades lacrymogènes et à la chevrotine sur des manifestants antigouvernementaux. Plusieurs de ces individus interrogés ont dit que les grenades lacrymogènes ont été tirées à bout portant et que des billes, de la chevrotine, des écrous et des boulons ont été utilisés comme munitions", a rapporté Ravina Shamdasani. Des mauvais traitements voire des actes de torture ont été signalés sur des détenus tandis que plusieurs centaines de manifestants ont été traduits devant des tribunaux militaires au lieu de la justice civile, a-t-elle poursuivi. "Les tactiques employées incluent l'électrocution, les coups, y compris avec des casques et des matraques sur des personnes pourtant menottées, la pendaison par les poignets pendant de longues périodes, l'asphyxie par le gaz et les menaces de mort - et dans certains cas les menaces de violence sexuelle - contre les détenus ou leurs familles", a dit la porte-parole du HCDH. (Bertrand Boucey pour le service français, édité par Henri-Pierre André)