Non, l'OMS n'a pas déjà annoncé la fin de l'alerte sanitaire due au virus mpox

Le 14 août, l'OMS a déclenché son plus haut niveau d'alerte en déclarant le statut d'urgence de santé publique internationale au sujet de l'épidémie du virus mpox. Sur les réseaux sociaux, des internautes assurent que quelques jours seulement après avoir pris cette décision, son directeur général Tedros Adhanom Ghebreyesus a rétropédalé et annoncé la fin de cet état d'urgence. Mais c'est faux : la vidéo du directeur de l'OMS annonçant la levée de l'urgence sanitaire mondiale date de 2023, et concerne la précédente épidémie de mpox, pas celle qui est en cours en Afrique centrale.

"Tedros Adhanom Ghebreyesus recule sur #monkeypox, il n’y a plus d’urgence sanitaire mondiale. Gabriel Attal doit fermer les centres de dépistages et de vaccinations immédiatement. Les vérités surplombent les mensonges, la peur a changée (sic) de camps #Poison": sur X, comme sur Facebook fin août, des internautes assurent que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a annoncé la fin de l'état d'urgence sanitaire concernant l'épidémie de mpox.

<span>Capture d'écran de Facebook le 26 août</span>
Capture d'écran de Facebook le 26 août

Ces publications, relayant une vidéo du directeur général de l'OMS, circulent aussi en espagnol notamment, comme dans cette publication sur X du 21 août: "Ca y est le cirque se termine! Plus personne ne les croit, et ils savent que beaucoup voudraient leur tête ! Tedros se rétracte après avoir déclaré la nouvelle blague du singe".

Dans la vidéo de 55 secondes qui accompagne la plupart de ces publications trompeuses, on entend Tedros Adhanom Ghebreyesus annoncer la fin de l'alerte sanitaire mondiale pour le mpox.

Qu'est-ce-que le mpox?

Le mpox, anciennement appelé variole du singe ou "monkeypox disease" en anglais, est une maladie infectieuse transmissible liée à un virus, de la famille des poxvirus. Son nom a été changé par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en novembre 2022, la terminologie "variole du singe" donnant lieu à des stigmatisations racistes et homophobes, principalement en Afrique (archive).

Elle se caractérise par des lésions cutanées, comme des pustules, une forte fièvre et des douleurs musculaires. Identifiée depuis un demi-siècle, la maladie est longtemps restée circonscrite à une dizaine de pays africains. Mais, en 2022, elle a commencé à s'étendre dans le reste du monde, notamment des pays développés où le virus n'avait jamais circulé.

Une vidéo de 2023 liée à la précédente épidémie de mpox

Le 14 août 2024, l'OMS a décrété une urgence de santé publique de portée internationale, l'alerte sanitaire du niveau le plus élevé, pour le mpox. Cette annonce a engendré un flot de désinformation, notamment sur l'origine de la maladie, ou sur sa transmission, comme l'AFP Factuel l'a démystifié ici.

Mais il est faux de dire, comme le prétendent des internautes, que son directeur général a levé cette alerte quelques jours seulement après l'avoir décrétée. La vidéo qui circule fin août sur les réseaux comme une "preuve" que l'OMS lèverait l'alerte sanitaire est ancienne: elle date de mai 2023, et a été partagée par le directeur de l'OMS sur  Instagram et X le 11 mai 2023.

En mai 2023, l'OMS a effectivement annoncé la fin de l'urgence de santé publique mpox, expliquant que "quelque 90% de cas en moins ont été signalés au cours des trois derniers mois, par rapport aux trois mois précédents" (archive). Mais il s'agissait de l'alerte déclarée quelques mois plus tôt, en juillet 2022 lorsqu'une épidémie s'était étendue à travers le monde.

Interrogé par l'AFP le 20 août, le Pr Antoine Gessain, spécialiste de mpox à l'Institut Pasteur, rappelle qu'en 2017 au Nigeria est apparue "une épidémie surtout parmi des hommes jeunes, puis il y a eu diffusion vers les pays occidentaux et en 2022 cela est devenu une épidémie mondiale, une véritable pandémie, dans les communautés gays à partenaires multiples. Le virus a alors muté et est devenu le clade 2b".

Grâce à d'importants efforts de santé publique, cette pandémie de 2022 a été maîtrisée, faisant environ 200 morts sur 100.000 cas dans le monde, "surtout chez des patients VIH infectés". En 2024, ce variant a infecté 107 personnes en France, selon les derniers bulletins publics.

Mais aujourd'hui, c'est une autre épidémie qui inquiète les autorités de santé: tandis qu'en République démocratique du Congo (RDC) depuis deux à trois ans les cas de clade 1 chez des enfants ont augmenté, en même temps dans une autre région du pays, à l'Est, une épidémie sévit "dans une population hétérosexuelle à partenaires multiples de personnes travaillant dans les mines et de jeunes adultes et travailleurs du sexe, un virus légèrement différent du 1, le 1b", selon le Pr Gessain.

"C’est ce virus muté qui se diffuse actuellement dans les pays limitrophes de l’Est de la RDC, comme le Burundi", ajoute le spécialiste.

C'est cette recrudescence du mpox en RDC, portée par le clade 1b qui touche aussi le Burundi, le Kenya, le Rwanda et l'Ouganda, qui a incité l'OMS à décréter le 14 août 2024 une urgence de santé publique de portée internationale, l'alerte sanitaire du niveau le plus élevé.

Dans sa dernière communication le 26 août, l'OMS a estimé que les épidémies de mpox en RDC et dans les pays voisins "peuvent être maîtrisées et stoppées", mais il va falloir quelque 121 millions d'euros pour financer la riposte internationale ces six prochains mois (archive).