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Le LOL, la loi et moi

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n jour d’automne, il y a longtemps déjà, j’ai reçu une lettre, glissée dans une belle enveloppe bien cachetée. Lorsque je l’ai ouverte, j’ai vu de jolies voyelles, d’élégantes consonnes, découpées avec méthode et précision. T’en souviens-tu ? Ça avait dû prendre du temps tous ces découpages, des «e» bien ronds, des «s» bien nets, collés les uns à la suite des autres. Le tout ordonné avec soin pour faire une phrase nette, précise : «SALE NÉGRESSE, RENTRE DANS TON PAYS, SINON TU VAS CREVER !»

Sous le point d’exclamation, tu avais dessiné de très belles gouttes de sang qui donnaient à l’ensemble une indéniable cohérence. T’en souviens-tu ? Tu n’avais pas signé ta lettre, bien sûr. Je n’ai donc jamais pu te répondre. Quel dommage ! Nous aurions pu parler de «mon pays», qui devait probablement être aussi le tien. Nous aurions pu parler des «négresses» et des «nègres», et de tous les autres, les «ratons», les «youpins», les «salopes», les «pédés»… Car lorsqu’on en est là, il est rare qu’on ne soit pas dans la détestation de tous. Quand on en est là, il est impossible qu’on haïsse une partie sans haïr l’ensemble. Puisque tout est dans tout, comme une pile de dominos, qu’un seul tombe et l’ensemble finira par tomber, ça n’est qu’une question de temps. Nous aurions surtout pu parler de justice puisque, si tu avais mis sur cette lettre un nom et une adresse, notre conversation aurait eu lieu devant un juge, devant la loi. Au vu et au su. Pas d’anonymat, pas de pseudonyme, toi, moi et le droit. Dommage donc. N’est-ce pas ?

Et puis la vie a continué, la technologie a progressé, on s’est envoyé moins de lettres, plus de mails, moins de petits mots doux, plus d’émojis, de textos. On s’est inscrit sur des réseaux sociaux, on a liké, on a followé, on a essayé de faire des phrases qui tiennent en 140 caractères. Et un jour, j’ai reçu un tweet très charmant d’une personne, qui ne portait pas de nom non plus, mais proposait de «M’ENTERRER VIVANTE DANS UN BOIS». Etait-ce Vincennes ou (...) Lire la suite sur Liberation.fr

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