L'OIAC confirme une attaque au gaz sarin en avril en Syrie

Le siège de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques à La Haye. L'OIAC a confirmé que du gaz sarin avait servi dans l'attaque contre un village du nord de la Syrie en avril dernier. /Photo d'archives/REUTERS/Michel Koore

AMSTERDAM (Reuters) - L'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) a confirmé que du gaz sarin avait servi dans l'attaque contre un village du nord de la Syrie en avril dernier, d'après les conclusions d'une équipe d'experts que Reuters a pu consulter jeudi soir. Plusieurs dizaines de personnes ont péri dans le bombardement de Khan Cheikhoune, dans la province d'Idlib, le 4 avril. L'attaque, imputée aux forces du régime de Bachar al Assad par les Occidentaux, a conduit à des frappes de missiles américains contre une base aérienne syrienne. Dans leur rapport, les experts de la Mission d'établissement des faits (FFM) de l'OIAC soulignent, après avoir interrogé des témoins et examiné des échantillons, qu'"un grand nombre de victimes, dont certaines ont succombé, ont été exposées au gaz sarin ou à une substance similaire au sarin". Réagissant à ces conclusions, le ministère russe des Affaires étrangères a dénoncé un rapport biaisé reposant sur des "éléments extrêmement douteux". "Le contenu de ce rapport est largement partial (...), ce qui nous conduit à penser que les activités de cette structure répondent à des consignes politiques", a-t-il déclaré. Le ministre britannique des Affaires étrangères, Boris Johnson, a dit pour sa part n'avoir "absolument aucun doute" que le régime de Bachar al Assad est responsable de cette attaque. "Nous allons poursuivre nos efforts pour imposer des sanctions aux responsables... Les gens qui utilisent des armes chimiques contre des innocents doivent rendre des comptes", a-t-il ajouté sur Sky News. La France a jugé ce rapport "sans équivoque" et ses conclusions "incontestables". "Le rapport de la mission d'établissement des faits confirme l'inquiétante banalisation d'emploi d'armes chimiques en Syrie, qui constitue un défi sans précédent au régime de non-prolifération", déclare le ministère des Affaires étrangères. "Les auteurs des atrocités de Khan Cheikhoun et des autres attaques chimiques devront répondre de leurs actes criminels devant la justice", ajoute-t-il dans un communiqué. Aux Nations unies, l'ambassadrice des Etats-Unis, Nikki Haley, a réclamé qu'une commission d'enquête établisse à présent les responsabilités détaillées de cette attaque chimique. "Maintenant que nous connaissons la vérité irréfutable, nous voulons qu'une commission indépendante confirme avec exactitude qui est responsable de ces attaques brutales afin que nous puissions rendre justice aux victimes", écrit-elle dans un communiqué. Elle demande notamment que le Mécanisme commun d'enquête de l'OIAC et de l'Onu (JIM), un organisme indépendant créé par le Conseil de sécurité en 2015, se saisisse des conclusions des experts pour identifier les auteurs de l'attaque contre Khan Cheikhoune. Par le passé, le JIM a déterminé que les forces gouvernementales syriennes s'étaient rendues coupables de trois attaques au chlore en 2014 et 2015 et que les djihadistes de l'organisation Etat islamique avaient eu recours à du gaz moutarde. La Russie, alliée de Damas, affirme que l'attaque de Khan Cheikoune a été commise par des opposants de Bachar al Assad, qui se seraient arrangés pour qu'elle semble avoir été l'oeuvre des forces gouvernementales. (Anthony Deutsch avec Jack Stubbs à Moscou, Alistair Smout à Londres, Sophie Louet à Paris et Michelle Nichols aux Nations unies; Henri-Pierre André, Tangi Salaün pour le service français, édité par Jean-Stéphane Brosse)