Loi justice : l’activation à distance des téléphones portables censurée par le Conseil constitutionnel
Éric Dupond-Moretti voulait que les enquêteurs puissent filmer ou écouter à leur insu des personnes visées par certaines enquêtes. Elles pourront juste être géolocalisées.
JUSTICE - On savait la mesure très contestée. Elle n’entrera jamais en vigueur. Le Conseil constitutionnel a en effet censuré, jeudi 16 novembre, la disposition prévue dans la loi justice qui aurait permis une activation à distance de certains téléphones. Ses détracteurs considéraient qu’elle transformait les portables en « mouchards ».
La mesure, contenue dans la loi portée par Éric Dupond-Moretti, se voulait un nouvel outil à la disposition des enquêteurs pour écouter ou filmer à leur insu des personnes visées dans des affaires de terrorisme, de délinquance ou criminalité organisées. Mais le Conseil constitutionnel a estimé que cela constituait une atteinte au droit au respect de la vie privée. Et les sages ont considéré que cette atteinte était disproportionnée au but poursuivi.
En revanche, il sera possible pour les enquêteurs d’utiliser cette technique pour géolocaliser un individu ; le texte de loi conditionne cette possibilité au fait que le crime ou délit potentiel soit puni d’au moins cinq ans de prison.
Dérive autoritaire vs modernisation d’une vieille technique
Lors des débats tendus au Parlement dans le courant de l’été, la majorité et la droite avaient validé la disposition. La gauche s’y était opposée, la France insoumise allant jusqu’à dénoncer « la dérive autoritaire du gouvernement ».
En réponse, Éric Dupond-Moretti avait estimé que la disposition concernerait seulement quelques « dizaines d’affaires par an ». « On est loin du totalitarisme de 1984 », avait déclaré le Garde des Sceaux en référence au livre de George Orwell. Pour lui, cela apparaissait comme une modernisation de la « vieille technique » de la sonorisation des suspects via des micros ou des caméras posés chez eux.
Second argument avancé, ce déclenchement à distance d’appareils connectés est déjà utilisé par les services de renseignement qui le font sans contrôle ni autorisation du juge. Autant d’arguments qui n’ont donc pas convaincu le Conseil constitutionnel.
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