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Loi anti-squat : pourquoi la proposition de la majorité fait bondir les associations

Manifestation contre le projet de loi anti-squat, à Paris, le 27 novembre 2022 (Photo by Thomas SAMSON / AFP)
Manifestation contre le projet de loi anti-squat, à Paris, le 27 novembre 2022 (Photo by Thomas SAMSON / AFP)

Le texte propose de tripler les sanctions maximales encourues par les squatteurs, pour les porter à trois ans de prison et 45 000 euros d'amende.

Une proposition de loi "purement répressive", "hyper moralisante"... L'inquiétude est palpable au sein des associations de mal-logés, après la proposition de loi déposée par un député de la majorité contre les squatteurs.

Le projet de loi, en discussion à l'Assemblée nationale, propose de protéger plus efficacement les propriétaires de logement contre les squats et les loyers impayés. Concrètement, la proposition de loi alourdit les peines de prison pour les squatteurs, et en crée à l’encontre des locataires qui ne se soumettent pas à une décision d’expulsion.

"On ne peut pas envoyer en prison un locataire qui ne paie pas ses loyers !"

"Envisager d'envoyer en prison un locataire qui ne paie pas son loyer, c'est déshumaniser leur situation. Quand on ne paie pas son loyer, c'est souvent en raison d'un accident de la vie, une perte d'emploi, un problème de versement des aides, un divorce... On ne peut pas les considérer comme des voyous, qu'on envoie en prison, c'est n'importe quoi", déplore Manuel Daumergue, directeur des études de la Fondation Abbé Pierre.

Tout particulièrement dans le viseur, l'article 1A, porté par des élus Républicains et jugé bienvenue par le député Renaissance Guillaume Kasbarian, rapporteur du texte. "L’occupation sans droit ni titre, de mauvaise foi, d’un immeuble bâti à usage d’habitation appartenant à un tiers s’apparente à un vol".

"C'est disproportionné"

Conséquence de cet amendement, s'il est adopté, il expose de "trois à 15 ans de prison des gens qui squatteraient un logement vide depuis des années, ainsi que des locataires dont le bail a été résilié après des impayés", décrypte le directeur des études de la Fondation Abbé Pierre.

"C'est totalement fou de se dire qu'il y a trois millions de logements vacants, des gens à la rue, et de proposer une loi pour que s'ils entrent dans un de ses logements, on puisse les envoyer en prison, c'est tellement disproportionné", pointe du doigt Manuel Daumergue.

"On craint une hausse des expulsions"

Autre élément qui dérange les associations dans la proposition de loi, c'est la volonté d'accélérer la procédure d'expulsion. "On craint une hausse des expulsions. La durée de la procédure d'expulsion permet de passer de 150 000 assignations à 'seulement' 15 000 expulsions par les forces de l'ordre. C'est-à-dire que 135 000 personnes s'en sortent en reprenant le paiement de leur loyer. Réduire la durée, c'est empêcher que le juge examine le dossier. Or, cela permet d'apprécier la situation, de proposer un échéancier, de trouver des solutions pour éviter les expulsions, et donc de finir à la rue", détaille le directeur des études de la Fondation Abbé Pierre.

La proposition de loi, qui est encore en discussions à l'Assemblée, fait l'objet de nombreux amendements qui pourraient encore modifier sa nature. De nombreux députés de la Nupes ont par ailleurs partagé leur inquiétude sur les conséquences d'une telle loi, si elle venait à voir le jour.

VIDÉO - L'Assemblée nationale examine la proposition de loi anti-squats