Un logiciel de reconnaissance faciale utilisé illégalement par la police nationale ? La Cnil enquête

La CNIL va enquêter sur l’utilisation d’un logiciel de reconnaissance faciale par la police nationale (photo d’illustration à Gouesnou, dans l’Ouest de la France).
FRED TANNEAU / AFP La CNIL va enquêter sur l’utilisation d’un logiciel de reconnaissance faciale par la police nationale (photo d’illustration à Gouesnou, dans l’Ouest de la France).

POLICE - La Cnil, autorité indépendante gardienne de la vie privée des Français, réclame des explications au gouvernement. La Commission nationale de l’informatique et des libertés a annoncé ce mercredi 15 novembre « initier une procédure de contrôle vis-à-vis du ministère de l’Intérieur » après la publication d’une enquête du média Disclose sur une possible utilisation illégale d’un logiciel de vidéosurveillance dans la police nationale.

Selon le site d’investigation Disclose, la police nationale utilise dans plusieurs départements depuis 2015, et « dans le plus grand secret », un logiciel de vidéosurveillance de la société israélienne Briefcam, filiale du groupe japonais Canon. Le logiciel, appelé « Vidéo Synopsis », permet notamment de traquer une personne grâce à ses habits, de suivre un véhicule sur la base de sa plaque d’immatriculation ou encore d’analyser plusieurs heures de vidéos en quelques minutes.

Plus encore, il est possible d’ajouter à ce logiciel une option sur la reconnaissance faciale, « en quelques clics ». Une option utilisée par la police selon ces journalistes, ce qui est illégal.

Une utilisation non déclarée auprès de la Cnil

En effet, en France, la reconnaissance faciale est très encadrée à cause des risques d’atteinte à la vie privée. La Cnil mène déjà des contrôles sur les caméras de vidéosurveillance algorithmique (ou « augmentées ») utilisées notamment par des collectivités locales. « On contrôlera très probablement certaines des caméras augmentées utilisées dans le cadre des JO » de Paris, avait par ailleurs assuré la Commission en mai auprès de l’AFP.

L’utilisation d’un tel logiciel par la police aurait dû faire l’objet d’une « analyse d’impact relative à la protection des données » du ministère de l’Intérieur, remise à la Cnil. Or l’administration indépendante n’a rien reçu de ce genre.

Elle déclare auprès de Disclose qu’elle « ne dispose pas d’éléments permettant d’infirmer ou de confirmer que la police nationale utilise Briefcam ». Et pour cause, son utilisation ne devait pas être ébruitée : fin 2020, un cadre de la police invitait ainsi à la discrétion : « Certains services ont l’outil Briefcam, mais celui-ci n’étant pas déclaré à la Cnil, il semble préférable de ne pas en parler ».

Selon le représentant Europe de la société, « plus d’une centaine de villes » françaises ont équipé leur police municipale avec l’application Briefcam. Il cite notamment Nice, Roanne, Aulnay-sous-Bois, Perpignan ou Roubaix.

« Les services de la police judiciaire, les préfectures de police de Paris et Marseille, la sûreté publique et la gendarmerie nationale » en sont également dotés selon l’enquête des journalistes. La Cnil doit désormais déterminer l’utilisation qui en a été faite.

Contactés par Le HuffPost à ce sujet, le ministère de l’Intérieur et le cabinet de Gérald Darmanin n’ont pas répondu dans l’immédiat.

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