Ligue 1: à partir de quel niveau de risques interdire systématiquement les déplacements de supporteurs?
Virage à 180, et changement de cap total pour le gouvernement. Le 27 octobre dernier, RMC Sport dévoilait la lettre de Gérald Darmanin et d'Amélie Oudéa-Castéra envoyée aux préfets de toutes les régions françaises afin de limiter les interdictions de déplacement pour cette nouvelle saison de Ligue 1. Datée du 13 octobre, cette missive du ministre de l'Intérieur et de la ministre des Sports voulait donner la priorité à l'encadrement des supporteurs plutôt qu'à leur absence forcée. Cette décision devait aussi servir à une meilleure préparation dans la gestion des flux avant les Jeux olympiques à Paris, l'été prochain.
Un peu plus d'un mois après cette lettre, le discours a changé. Le week-end après ces révélations, le match OM-OL (29 octobre) n'avait pas lieu. La faute à de graves incidents à l'extérieur de l'enceinte marseillaise. Depuis ces scènes, et la vague médiatique, les deux ministres en première ligne sur ces questions ont changé leur vision. "Il faut reconnaître que les événements d'OM-OL ont changé le visage de la saison, il faut maintenant être ferme, très ferme", expliquent plusieurs conseillers ministériels concernés par la question. Les interlocuteurs n'éludent pas les autres événements qui sont survenus cette saison en Ligue 1, comme le car des supporteurs de Brest caillassé à Montpellier ou encore une famille prise à partie à Nantes, en septembre dernier.
De nombreux matchs classés à risques au cours d'une saison
Sur France Inter, ce lundi matin, Amélie Oudéa-Castéra a émis l'hypothèse d'une interdiction des déplacements de supporteurs dès que la rencontre est considérée à risque par les autorités. En clair, dans le langage courant de la gestion des supporteurs en France, cela voudrait dire dès que la note de la Division nationale de lutte contre le hooliganisme (DNLH) dépasse le 2 sur 5. "La note 1 sur 5 n'est pas très parlante", admet une source policière. Avant de compléter: "À partir du 2 on peut considérer qu'un antagonisme est présent, c'était le cas à Nantes par exemple".
Dans les faits, cela concerne énormément de matchs lors d'une saison de Ligue 1 (et de nombreux matchs de Ligue 2). Le président de la LFP, Vincent Labrune, est sur la même longueur d'onde que la ministre des Sports. Et de nombreux représentants du football français poussent dans le sens d'Amélie Oudéa-Castéra. La DNLH, service spécialisé dans la gestion des supporteurs en France, est en contact permanent avec l'ensemble des forces vives qui composent l'environnement football sur notre territoire. Les policiers spécialisés émettent des notes sur tous les matchs classés (de 1 à 5), y compris dans les divisions amateures. À l'international, la DNLH écrit sur tous les matchs (comme les matchs de coupes d'Europe), qu'ils soient classés ou non.
Encore plus d'arrêtés ces prochaines semaines?
"Le problème des arrêtés, c'est qu'ils sont facilement attaquables devant la justice, ça ne pourra pas tenir pendant des mois", souligne un policier spécialisé dans la gestion des supporteurs. Une situation qui s'est produite très récemment avec le match Paris FC-Bordeaux en Ligue 2. Si les menaces de la ministre des Sports entrent rapidement en place, les préfets devront donc produire encore plus d'arrêtés pour les abords des stades et l'accès aux enceintes. Ces arrêtés seront complétés par des interdictions de déplacements du ministère de l'Intérieur. C'est le fonctionnement normal (et régulier) du système en France.
"Outre ces classements qui sont très importants dans les réunions préparatoires, il faut aussi prendre en compte de manière plus importante le renseignement policier de terrain. C'est la base pour préparer une rencontre", complète ce policier spécialisé. Enfin, certains appellent à repenser et élargir le rôle de la DNLH, cette structure de coordination rattachée à la direction centrale de la sécurité publique assure une mission de renseignement et de synthèse avant les rencontres.
Les classements :
Classement risques 1: flux important et inhabituel de supporteurs ou spectateurs.
Classement risques 2: contexte dégradé susceptible de générer des comportements déviants de la part des supporteurs.
Classement risques 3: risque de troubles à l'ordre public liés à un contentieux entre supporteurs ou au comportement habituel de certains supporteurs.
Classement risques 4: risques avérés de troubles à l'ordre public liés à un contentieux chronique entre supporteurs ou à la présence avérée de supporteurs à risques.
Classement risques 5: risques graves de troubles à l'ordre public nécessitant des mesures exceptionnelles.