Liban: comment des milliers de bipeurs de membres du Hezbollah ont-ils pu exploser simultanément?
Que s'est-il vraiment passé ce mardi 17 septembre en fin de journée au Liban et en Syrie? L'explosion simultanée de milliers de bipeurs appartenants à des membres du Hezbollah a fait au moins 12 morts et près de 2.800 blessés. Mais comment et pourquoi ce petit boîtier à la technologie plutôt primitive a-t-il pu exploser?
Les regards se tournent vers Israël et les services du Mossad, alors que la guerre fait rage depuis bientôt un an à la frontière israélo-libanaise. L'attaque a en effet immédiatement été imputée à l'État hébreu par le mouvement islamiste.
Israël utilise depuis longtemps la technologie pour traquer ou attaquer ses opposants. Comme le note le Financial Times, en 1972, l'un des responsables des attentats des Jeux olympiques de Munich avait été tué par l'explosion déclenchée à distance de son téléphone.
"Nous savons qu'Israël a déjà utilisé la technologie pour suivre sa cible", a commenté auprès de la BBC Simon Mabon, spécialiste des relations internationales et professeur à l'université de Lancaster. Une attaque qualifiée de "sans précédent".
Un explosif caché à la livraison?
Moins de 24 heures après les faits, quelques hypothèses se dessinent. Selon les informations du New York Times, citant des responsables américains anonymes, les milliers d'appareils commandés au printemps dernier auraient été trafiqués par des agents israéliens avant leur arrivée au Liban.
La chaîne américaine CNN évoque de son côté une opération conjointe menée par l'armée israélienne et les services de renseignement de l'État hébreu. Le gouvernement israélien et son armée sont restés cependant silencieux.
"Il y a plusieurs scénarios qui auraient pu amener à une explosion. Le plus probable à date c'est effectivement l'ajout d'un explosif dans ce pageur. La question c'est: à quel moment a-t-il été ajouté? Il aurait pu être ajouté à la fabrication, mais ils ont été distribués dans le monde entier. Donc, le plus probable, c'est à la livraison", a estimé sur BFMTV Gérôme Billois, associé en cybersécurité et confiance numérique au sein du cabinet Wavestone.
Une source de sécurité libanaise de haut rang et une autre source anonyme citée par l'agence de presse Reuters affirment que le Mossad aurait effectivement placé des explosifs à l'intérieur de 5.000 bipeurs importés par le Hezbollah depuis plusieurs mois. La question du "comment" reste toutefois sans réponse.
Si l'hypothèse d'un piratage à distance menant à l'explosion de la batterie semble moins probable, il est possible que les appareils aient été modifiés - en plus de l'ajout d'explosif - pour qu'une détonation soit enclenchée à la réception d'un message particulier.
"Il n'est techniquement pas possible de provoquer l’explosion violente d’une batterie, encore moins à distance, sans toucher à l’intégrité de la batterie, avec un accès physique à l’appareil, sur le moment", explique Baptiste Robert, spécialiste en cybersécurité à BFMTV.com.
L'identité du fabricant demeure incertaine
Reste que, l'identité du constructeur des petits appareils n'est pas si claire. L'entreprise taïwanaise Gold Apollo a démenti des informations selon lesquelles elle aurait fabriqué les bipeurs utilisés par le Hezbollah.
"Ce ne sont pas nos produits (...) Ce ne sont pas nos produits du début à la fin", a affirmé le directeur de l'entreprise, en réponse aux informations de la presse américaine.
La société précise avoir fourni un droit de fabrication à un autre constructeur, cette fois hongrois. "Nous ne faisons qu'autoriser la marque et ne participons pas à la conception ou à la fabrication de ce produit", a précisé l'entreprise Gold Apollo auprès de Reuters.