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Saad Hariri promet de sortir le Liban de l'effondrement qui le menace

SAAD HARIRI PROMET DE SORTIR LE LIBAN DE L'EFFONDREMENT QUI LE MENACE

par Ellen Francis et Maha El Dahan

BEYROUTH (Reuters) - Saad al Hariri, désigné jeudi Premier ministre du Liban, s'est aussitôt engagé à former rapidement un gouvernement "non partisan" et a promis à ses compatriotes de stopper l'effondrement de leur pays.

Le chef de file du Courant du futur a déjà présidé à trois reprises le conseil des ministres libanais, en 2009-2011 puis à partir de 2016. Sa dernière expérience s'était achevée par une démission le 29 octobre 2019 sous la pression d'un mouvement de contestation sans précédent dans l'histoire récente du pays.

C'est donc quasiment un an jour pour jour après sa démission que le fils de Rafic Hariri, qui s'était présenté en "candidat naturel", a été formellement désigné jeudi par le président Michel Aoun au terme de consultations politiques au palais présidentiel de Baabda.

Il va devoir reprendre les choses dans l'état où son prédécesseur, Moustapha Adib, les a laissées.

Désigné le 31 août, l'ancien ambassadeur à Berlin a jeté l'éponge le 26 septembre sans avoir pu former un cabinet, estimant qu'il lui était impossible de surmonter les rivalités entre partis autour de l'attribution des ministères et de former un gouvernement.

Le déblocage de plusieurs milliards de dollars d'aide internationale indispensable pour sortir le pays de la crise économique et desserrer la pression de sa dette dépend de la capacité des Libanais à se doter un nouveau gouvernement à même de s'atteler à des réformes et de s'attaquer à la corruption et l'incurie dramatiquement mises en lumière par l'explosion catastrophique du 4 août dernier sur le port de Beyrouth.

Saad Hariri a assuré qu'il assignerait à son gouvernement "la mission de mettre en oeuvre ces réformes économiques et financières".

"Je dis aux Libanais qui souffrent de nos difficultés jusqu'au désespoir que je suis déterminé à oeuvrer pour stopper l'effondrement qui menace notre économie, notre société et notre sécurité", a-t-il dit à la presse.

CALENDRIER SERRÉ

Soutenu par les députés de son bloc et par le parti du dirigeant druze Walid Jumblatt, Saad Hariri a également obtenu l'aval du parti chiite Amal, dirigé par Nabih Berri, le président du Parlement.

Le Hezbollah chiite n'avait en revanche pas désigné de candidat - le poste de Premier ministre revient à une personnalité sunnite dans le cadre du partage confessionnel du pouvoir - mais avait affiché sa volonté de faciliter le processus. "Nous allons contribuer à préserver ce climat positif", a déclaré à la presse le président de son groupe parlementaire, Mohammed Raad.

Au fil des consultations, d'autres groupes ou indépendants reçus par Michel Aoun ont apporté leur soutien à Hariri parmi lesquels l'ex-Premier ministre Tammam Salam.

Constituant le premier bloc parlementaire chrétien, les élus du Courant patriotique libre de Gebran Bassil, gendre d'Aoun, ont refusé en revanche d'entériner la nomination d'une personnalité aussi politique qu'Hariri à la tête d'un gouvernement censé être formé de "technocrates".

Le bloc des Forces libanaises de Georges Adwane n'a pas davantage exprimé de soutien. "Cette classe politique qui a pris le peuple en otage a-t-elle appris qu'elle ne peut pas continuer de la sorte ?", a déclaré Adwane. "Elle passe désormais un test."

La France, en pointe dans le dossier libanais, n'avait cessé ces dernières semaines d'appeler la classe politique libanaise à "prendre ses responsabilités" pour éviter "le chaos et la paralysie".

L'échec de l'option Moustapha Adib a été très mal vécu par Emmanuel Macron, qui avait rapporté, lors de son second déplacement à Beyrouth après la catastrophe, que la classe politique libanaise s'était engagée auprès de lui à former un "gouvernement de mission" pour la mi-septembre.

Lors d'une conférence de presse organisée en duplex entre Paris et Beyrouth le lendemain de la démission d'Adib, le président français a dénoncé la "trahison collective" des partis politiques libanais et repoussé les échéances, donnant quatre à six semaines aux responsables libanais pour former un gouvernement de mission, soit un laps de temps compris entre les 25 octobre et 8 novembre environ.

(avec Laila Bassam et Dominic Evans; version française Henri-Pierre André, édité par Jean-Stéphane Brosse)