L'ex-fugitif Thierry Ascione distille sa vie "en cavale"

Croquis d'audience de Thierry Ascione jugé pour complicité d'assassinat et escroquerie pour des faits commis au Guatemala il y a plus de 30 ans à la cour d'assises de Paris, le 1er octobre 2024 (Benoit PEYRUCQ)
Croquis d'audience de Thierry Ascione jugé pour complicité d'assassinat et escroquerie pour des faits commis au Guatemala il y a plus de 30 ans à la cour d'assises de Paris, le 1er octobre 2024 (Benoit PEYRUCQ)

"J'ai eu une vie un peu plus différente que la majorité des gens" (sic), a reconnu mercredi devant la cour d'assises de Paris l'ex-fugitif Thierry Ascione, jugé pour complicité d'assassinat et escroquerie pour des faits commis au Guatemala il y a plus de 30 ans.

La "vie un peu différente" de Thierry Ascione s'est traduite par une cavale de 20 ans en Amérique latine puis en Asie du sud-est, jusqu'à son interpellation rocambolesque à la suite d'une avarie de son voilier, pris dans un typhon au large de l'Indonésie en octobre 2021.

Pour la justice, Thierry Ascione est impliqué dans l'assassinat, particulièrement atroce, d'un couple de restaurateurs français établis au Guatemala, Bernard Béreaud et sa compagne Marie-Antoinette Perriard, tués le 28 décembre 1991.

Si deux jeunes Français dont le neveu du restaurateur, Jean-Philippe Bernard, et un ancien légionnaire, Philippe Biret, sont rapidement arrêtés par la police du Guatemala, Thierry Ascione, mis en cause par l'ex-légionnaire, demeure introuvable. Un mois après le double meurtre il se trouve en Floride où, selon l'accusation, il a encaissé un chèque de 80.000 dollars censé avoir été émis par Bernard Béreau.

"J'étais un escroc", reconnait volontiers Thierry Ascione, qui a gardé l'accent de Marseille où il est né il y a 65 ans.

Après la Floride, sa trace se perd en Asie jusqu'à son arrestation en Thaïlande en mai 1995 alors qu'il est en possession d'un passeport américain volé à un touriste au Vietnam. Extradé en France en septembre 1995, il est mis en examen et incarcéré.

Après près de cinq  ans de détention provisoire, il est remis en liberté en attente de son procès mais en profite pour se faire la belle.

"Vous n'avez pas respecté +le contrat de confiance+ à votre égard de la justice", s'insurge le président David De Pas.

"Je suis d'accord", admet Thierry Ascione. Il raconte être retourné au Guatemala sous une fausse identité "pas pour éviter (son) procès mais pour récupérer" des éléments de preuve visant à l'innocenter.

- "En terminer avec cette histoire" -

"Quand j'étais au Guatemala, on ne m'a pas informé de la date de mon procès", dit-il avec ingénuité. Jugé en son absence, il est condamné à la réclusion à perpétuité en juin 2001.

Une cavale de 20 ans commence. "J'ai pris la décision que je pensais la meilleure pour en terminer avec cette histoire", dit-il.

A une enquêtrice de personnalité, il a détaillé les pays d'Asie où il est passé (Inde, Hong Kong, Thaïlande, Malaisie, Philippines...). Il se présente comme "un entrepreneur", ouvre et vend des sociétés. L'origine de l'argent demeure un mystère. "L'argent n'a jamais été mon moteur", se contente-t-il de dire.

Il a reconnu mercredi s'être même rendu en France entre 2000 et 2021 "mais pas sous le nom d'Ascione".

"J'ai toujours voyagé... Je prends l'avion, cherche des opportunités. Quand ça ne marche pas je vais dans le pays d'à côté... C'est ma façon de fonctionner", explique l'accusé polyglotte.

Vingt ans après les faits, estimant qu'ils sont prescrits, il affirme avoir eu la volonté de revenir en France à visage découvert. Il vogue vers la Nouvelle-Calédonie mais son voilier est touché par la foudre. Thierry Ascione échoue sur une île indonésienne.

Un mandat d'arrêt à son encontre court toujours. Interpellé, expulsé vers les Pays-Bas en juin 2023, il est remis à la France en octobre 2023, date depuis laquelle il est incarcéré.

Le procès est prévu jusqu'au 11 octobre.

aje/bfa/rhl