L'Etat islamique s'empare du principal barrage d'Irak

L'Etat islamique s'est emparé du principal barrage d'Irak, celui de Mossoul. Cette prise est susceptible de donner aux djihadistes sunnites la capacité d'alimenter en eau les grandes villes d'Irak, ou de contrôler l'eau qui alimente les exploitations agricoles. /Photo d'archives/REUTERS

par Ahmed Rasheed et Raheem Salman BAGDAD (Reuters) - Les djihadistes de l'Etat islamique (ex-EIIL) ont pris le contrôle dimanche du principal barrage d'Irak, d'un gisement pétrolier et de trois villes supplémentaires dans le nord de l'Irak, infligeant aux combattants kurdes leur première défaite majeure depuis leur arrivée dans la région au mois de juin. La prise du barrage de Mossoul, après une offensive d'à peine 24 heures, est susceptible de donner aux djihadistes sunnites de l'Etat islamique (EI) la capacité d'alimenter en eau les grandes villes d'Irak, ou de contrôler l'eau qui alimente les exploitations agricoles, ce qui leur donne un avantage de taille dans leur projet de renversement du gouvernement chiite de Nouri al Maliki. "Les bandes terroristes de l'Etat islamique ont pris le contrôle du barrage de Mossoul après le retrait des forces kurdes sans combat", a commenté la télévision irakienne. Il s'agit d'un sérieux revers pour les peshmerga (combattants) kurdes, qui représentaient une des rares forces encore capables de combattre en Irak et qui avait jusqu'ici réussi à résister aux djihadistes sunnites de l'EI, qui veulent modifier les frontières de la région. L'EI, qui considère les chiites, majoritaires en Irak, comme des apostats qui méritent la mort, s'est également emparé des localités de Wana, Zoumar et Sinjar, et du gisement pétrolier d'Aïn Zalah, qui vient s'ajouter aux quatre autres déjà entre leurs mains. Les djihadistes n'ont rencontré de résistance importante qu'au début de leur dernière offensive, quand ils ont pris Zoumar. Les islamistes ont ensuite hissé leurs drapeaux noirs sur la ville, une habitude qui en général précède des exécutions massives d'opposants capturés et la promulgation de règles idéologiques que même Al Qaïda trouve excessives. MALGRÉ LES RENFORTS Face à la déroute de l'armée irakienne devant l'avancée de l'Etat islamique, qui a déclaré un califat sur certaines parties d'Irak et de Syrie, les milices chiites et les peshmerga kurdes sont considérés comme le dernier rempart contre les djihadistes qui souhaitent s'emparer de Bagdad. En remettant en question l'efficacité des combattants kurdes, les événements de dimanche posent à nouveau la nécessité de la formation d'un gouvernement irakien crédible, capable de s'opposer à l'EI. Deux personnes vivant près du barrage de Mossoul ont expliqué à Reuters que les troupes kurdes avaient fui à bord de véhicules après avoir chargé leurs effets personnels et leurs climatiseurs. A Sinjar, rapportent des témoins, les combattants kurdes sont partis après n'avoir opposé qu'une faible résistance aux djihadistes. A Zoumar, où les premiers combats avaient été signalés samedi, les combattants de l'Etat islamique ont progressé sur trois axes à bord de 4x4 équipés de mitrailleuses, remportant la victoire contre les forces kurdes malgré les renforts déployés par les autorités régionales kurdes. Dans un communiqué, l'Etat islamique indique avoir tué de nombreux combattants kurdes. "Des centaines (de peshmerga) ont fui en laissant derrière eux des véhicules et un très grand nombre d'armes et de munitions", précise l'EI. Début juillet, une délégation du gouvernement régional du Kurdistan s'est rendue à Washington pour presser l'administration américaine de lui fournir des armes sophistiquées pour repousser les djihadistes sunnites, a-t-on appris cette semaine de sources kurdes et américaines. Vers le sud, l'avancée de l'Etat islamique s'est arrêtée depuis des semaines juste au nord de Samarra, une ville située à 100 km au nord de Bagdad. (Henri-Pierre André et; Danielle Rouquié pour le service français)