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Les syndicats de pilotes d'Air France entre attentisme et colère

Les principaux syndicats de pilotes d'Air France ont qualifié mardi de "provocation" les mesures d'amélioration du bien-être présentées jeudi dernier par la direction avant la nomination d'un nouveau PDG d'Air France-KLM attendue d'ici début juillet. /Photo prise le 9 mai 2018/REUTERS/Christian Hartmann

par Cyril Altmeyer

PARIS (Reuters) - Les principaux syndicats de pilotes d'Air France ont qualifié mardi de "provocation" les mesures d'amélioration du bien-être présentées jeudi dernier par la direction avant la nomination d'un nouveau PDG d'Air France-KLM attendue d'ici début juillet.

L'intersyndicale d'Air France a suspendu lundi soir son préavis de grève déposé du 23 au 26 juin pour réclamer une nette augmentation des salaires, à l'exception notable du Syndicat des pilotes d'Air France (Spaf), qui représente un quart des pilotes de la compagnie.

Le Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL), largement majoritaire, justifie sa décision de lever le préavis par l'engagement pris par la présidente non exécutive d'Air France-KLM Anne-Marie Couderc de faire de la question salariale à Air France la priorité du nouveau PDG dès son arrivée.

"Elle a également indiqué que le processus de sélection avait été plus rapide que prévu initialement et que ce dernier était attendu pour début juillet", ajoute le syndicat.

Air France s'est refusé à tout commentaire sur ce communiqué, après avoir salué lundi soir comme une "bonne nouvelle" la levée du préavis de grève de neuf des dix organisations de l'intersyndicale.

Mais pour Grégoire Aplincourt, président du Spaf, renoncer à la grève serait un "aveu de faiblesse", dénonçant la proposition de nouvelles chambres de repos pour les navigants sans réouverture de négociations, précisant que des pilotes affiliés au SNPL sont prêts à rejoindre le mouvement de grève.

"UN PDG OU UN PÈRE NOËL?"

La direction d'Air France a annoncé jeudi dernier le déblocage d'un budget exceptionnel dès cet été pour "améliorer le quotidien des salariés", tout en prévenant qu'il n'y aurait pas de nouvelle négociation salariale dans l'immédiat.

"L’actuelle direction n’a pas de mandat : que fait-elle là ? On va nommer un PDG ou un père Noël ?", a dit Grégoire Aplincourt à Reuters.

Anne-Marie Couderc assure depuis le 15 mai la transition aux côtés d'un triumvirat de dirigeants dans l'attente de la nomination d'un nouveau PDG pour remplacer Jean-Marc Janaillac, qui a démissionné à la suite de l'échec d'une consultation des salariés sur un projet d'accord salarial.

Mais le coût des 15 jours de grève de cette année, désormais évalué à 300-350 millions d'euros, et le renchérissement des prix du pétrole risquent de diminuer la marge de manoeuvre d'un nouveau PDG pour négocier, alors même que l'amélioration des résultats d'Air France-KLM en 2017 a été moins marquée que pour ses concurrentes directes Lufthansa et IAG.

Le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire a plaidé la semaine dernière pour qu'un nouveau PDG soit nommé rapidement.

Le processus, actuellement dans sa phase finale, a concerné près d'une dizaine de candidats pour la recherche du nouveau PDG, qui reprendra aussi la présidence d'Air France et terminera le mandat de Jean-Marc Janaillac jusqu'à l'assemblée générale annuelle de mai 2019, qui devra voter sur son renouvellement.

L'Etat français, qui détient 14,3% d'Air France-KLM, s'est dit début juin "ouvert sur le principe" d'un rachat par AccorHotels de tout ou partie de cette participation, traduisant la fin d'un tabou sur le sujet.

Mais la structure de l'actionnariat du groupe hôtelier, dont les deux premiers actionnaires sont le chinois Jin Jiang, les fonds qatari QIA et saoudien Kingdom Holding, pourrait jouer en sa défaveur, l'Etat étant traditionnellement soucieux de préserver un actionnariat européen au sein de ses entreprises phares.

Or Air France-KLM a accueilli en juillet dernier la compagnie américaine Delta Air Lines et China Eastern Airlines à son capital dans le cadre d'une vaste réorganisation de son réseau d'alliances.

Air France-KLM s'est adjugé 5,42% mardi à la Bourse de Paris en réaction à la levée du préavis de grève de l'intersyndicale, mais le titre reste en baisse de 44% depuis le début de l'année.

(Edité par Dominique Rodriguez)