Les sanctions russes limitées aux produits agricoles turcs

Les sanctions imposées par la Russie à la Turquie à la suite de la destruction d'un de ses chasseurs-bombardiers opérant en Syrie seront limitées aux produits agricoles et n'entreront peut-être pas en vigueur avant plusieurs semaines, selon des responsables russes. /Photo d'archives/REUTERS/Osman Orsal

MOSCOU (Reuters) - Les sanctions imposées par la Russie à la Turquie à la suite de la destruction d'un de ses chasseurs-bombardiers opérant en Syrie seront limitées aux produits agricoles et n'entreront peut-être pas en vigueur avant plusieurs semaines, ont déclaré lundi des responsables russes. Le vice-Premier ministre Arkadi Dvorkovitch a expliqué lors d'une réunion gouvernementale que Moscou pourrait repousser la mise en oeuvre des sanctions visant les fruits et légumes pour ne pas renforcer les tensions inflationnistes en Russie. Les autorités russes interdisent déjà les importations de produits agricoles des pays membres de l'Union européenne en riposte aux sanctions adoptées par cette dernière en raison du conflit dans l'est de l'Ukraine. Le premier vice-Premier ministre, Igor Chouvalov, a indiqué de son côté que Moscou n'interdirait pas pour le moment les importations de produits industriels turcs. Le Premier ministre, Dmitri Medvedev, a cependant prévenu pendant la même réunion que les sanctions annoncées samedi pourraient être durcies par la suite "si nécessaire". L'effet des sanctions se fait déjà sentir pour les exportateurs turcs, quelque 1.250 camions transportant des produits turcs étant bloqués en Géorgie et en Ukraine, deux pays par lesquels ils doivent transiter avant d'entrer en Russie, a déclaré lundi à Reuters un responsable du secteur des transports. "La Russie n'a pas délivré d'autorisation d'entrée ou de transit aux camions turcs depuis quatre jours", a précisé Fatih Serer, directeur de l'association turque des transporteurs internationaux, qui estime les pertes financières entre 50 et 60.000 dollars par jour. PAS D'EXCUSES TURQUES Environ la moitié des exportations turques vers la Russie se font par voie terrestre. En outre, selon Fatih Serer, près de 800 conteneurs sont immobilisés dans les ports turc de Samsun et russe de Novorossiysk, sur la mer Noire, dans l'attente de leur dédouanement. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a dit "regretter" que le Soukhoï-24 russe ait été abattu mais il a refusé de présenter les excuses que Moscou lui demandait, imputant la responsabilité de cet incident au pilote qui n'a pas répondu aux injonctions de quitter l'espace aérien turc. Lundi, le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu a répété lors d'un déplacement à Bruxelles qu'il était "hors de question" pour Ankara de s'excuser. "Aucun pays ne devrait nous demander de nous excuser", a-t-il déclaré à la presse à l'issue d'un entretien avec le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg. "La protection de notre espace aérien est un droit et un devoir", a ajouté Ahmet Davutoglu, en disant espérer que la Russie "reconsidérerait" ses sanctions. Le président russe Vladimir Poutine n'a pas donné suite à la proposition de son homologue turc de se rencontrer à Paris en marge de la COP21 pour améliorer les relations entre les deux pays, ont confirmé lundi des sources proches de la présidence turque. L'armée turque a annoncé de son côté que le corps du pilote de l'avion russe, tué par des rebelles syriens après s'être éjecté, avait été rapatrié lundi à Moscou après une cérémonie funéraire à Ankara, à laquelle a assisté l'ambassadeur russe en Turquie. (Darya Korsunskaya, avec Robin Emmott à Bruxelles et Ece Toksabay à Ankara; Tangi Salaün pour le service français)