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Les rebelles résistent dans l'Ouest grâce au soutien saoudien

par Laila Bassam et Tom Perry BEYROUTH (Reuters) - L'aide accrue de l'Arabie saoudite aux insurgés syriens leurs permet de résister aux offensives lancées récemment par l'armée syrienne et ses alliés dans l'ouest du pays, dit-on de sources proches du pouvoir à Damas. Les islamistes d'Ahrar al Cham ont ainsi repris vendredi le village d'Atchane et ses environs, dans la province d'Hama, dont les forces gouvernementales s'étaient emparées en octobre, annonce l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). La ville voisine de Morek était tombée la veille aux mains du Djound al Aksa. Les offensives gouvernementales menées avec l'appui de l'aviation russe, du Hezbollah libanais et du corps iranien des Gardiens de la Révolution dans la région côtière, cruciale pour la survie du régime de Bachar al Assad, n'a pour le moment pas donné de résultats, disent les observateurs. Selon l'un d'eux, le seul succès tangible mais très modeste a été enregistré au sud d'Alep. Les services de renseignement américains sont du même avis, tandis que les insurgés n'hésitent pas à parler d'un échec de l'armée et s'attendent même à gagner du terrain. Selon deux étrangers proches de l'administration syrienne ayant requis l'anonymat, les offensives sont donc ralenties par l'armement que l'Arabie saoudite, farouche rivale de l'Iran, livre aux rebelles, en particulier les missiles antichars TOW de fabrication américaine, qui feraient une grande différence. "Le soutien de l'Arabie saoudite à l'opposition n'a non seulement pas cessé, mais il s'est accru de manière inédite et c'est ce qui freine les opérations et empêche d'obtenir de grands succès sur le terrain", a déclaré l'un d'eux. "Les Saoudiens sont dans un état de folie, dans la surenchère totale", affirme le second, selon lequel les missiles TOW ont même entraîné l'arrêt de l'offensive dans la région de Sagl al Ghab. La plaine en question se trouve au pied du djébel Ansariya, fief des alaouites, qui protège notamment Lattaquié. La progression des rebelles dans ce secteur au cours de l'été a contribué à l'entrée en lice de l'aviation russe, qui les bombarde depuis la fin septembre. "LE RÉGIME EST EN TRAIN DE PERDRE" Selon les deux étrangers au fait de l'évolution politique et militaire du conflit, les forces gouvernementales et leurs alliés, surtout l'Iran, mettent désormais l'accent sur la bataille qui se déroule au sud d'Alep. Face à l'implication de plus en plus importante de Téhéran et de Moscou, Ryad a promis récemment d'accroître son aide aux insurgés. Le 31 octobre, le ministère saoudien des Affaires étrangères a ainsi fait savoir qu'il envisageait de leur fournir des armes plus efficaces. Les rebelles de l'Armée syrienne libre (ASL) reçoivent en outre l'aide de la CIA, qui en forme une partie. Dans une dépêche de Washington datée du 31 octobre, Reuters, citant une source informée, annonçait que l'agence américaine, en collaboration avec le Qatar et l'Arabie saoudite, avait élargi ses livraisons clandestines de missiles de TOW à d'autres mouvements. Selon une autre source, une quantité importante de TOW a été livrée en octobre à des rebelles sunnites du Nord-Ouest jugés relativement modérés. Certaines composantes de l'ASL parlent elles aussi de livraisons importantes de TOW depuis le début de l'intervention russe, le 30 septembre. D'autres assurent en revanche que les armes livrées via la Turquie ne sont ni plus nombreuses ni plus efficaces. L'opposition armée, qui réclame en particulier des missiles antiaériens, n'a pour le moment pas obtenu gain de cause. Selon le de file du Foursan al Hak qui a participé jeudi à la prise de Morek, les missiles TOW y ont joué un grand rôle. Farès al Bayouch nie toutefois avoir reçu davantage d'aide militaire extérieure. "Le plan du régime a échoué en raison de la ténacité de l'Armée syrienne libre et de sa mobilité", affirme-t-il. "Le régime est en train de perdre", renchérit Ahmed al Seoud, chef de la 13e division, autre composante de l'ASL, selon lequel l'armée, la Russie et les "mercenaires" sont tenus en échec depuis six semaines. Pour Rami Abdulrahman, directeur de l'OSDH qui rend compte quotidiennement de l'évolution du conflit, "le régime a enregistré quelques succès sur le front de Lattaquié et celui du sud d'Alep, mais ce ne sont pas des succès stratégiques, et il a complètement échoué dans le nord des provinces d'Hama et de Homs, surtout dans le nord d'Hama". (Jean-Philippe Lefief pour le service français)