Les policiers sceptiques sur la police de proximité

Les forces de l'ordre ont accueilli avec scepticisme l'annonce de la mise en place d'une police du quotidien en France, sorte de nouvelle police de proximité, s'interrogeant autant sur les modalités de cette mesure que sur le personnel mobilisé. /Photo prise le 22 avril 2017/REUTERS/Philippe Wojazer

PARIS (Reuters) - Les forces de l'ordre ont accueilli avec scepticisme l'annonce de la mise en place d'une police du quotidien en France, sorte de nouvelle police de proximité, s'interrogeant autant sur les modalités de cette mesure que sur le personnel mobilisé. Promesse de campagne d'Emmanuel Macron, "la mise en place de la police de sécurité du quotidien commencera dès la fin de l'année", a déclaré le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb dans une interview publiée mercredi par Le Figaro. Un timing qui rend perplexes les représentants des forces de l'ordre. "C'est un changement de mentalité, avec une nouvelle doctrine à mettre en place. Cela va prendre un peu de temps", a déclaré à Reuters Philippe Capon, secrétaire général du syndicat Unsa-Police. La police de proximité avait été lancée en 1998, alors que la gauche était au pouvoir, pour faire davantage de prévention, notamment dans les quartiers difficiles. En 2003, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, y avait mis un terme. Pour les policiers, il s'agit de tirer les enseignements de la première expérience afin de ne pas répéter les mêmes erreurs. "La police de proximité, c'était la police des Bisounours. Tout le monde était gentil et on avait oublié la répression", a dit à Reuters le porte-parole d'Unsa. Pour Yves Lefebvre, secrétaire général de SGP Unité-Police, un retour à cette doctrine serait "une grossière erreur". "Aujourd'hui il faut mettre un terme aux zones de non-droit, mais pas n'importe comment", a-t-il indiqué sur LCI. Selon les représentants de forces de l'ordre, cette nouvelle police de proximité ne devra pas se faire sans un volet répression. "On se rend bien compte qu'aujourd'hui, le sujet c'est le problème des impunités. Les collègues font un travail au quotidien, ils interpellent souvent les mêmes personnes", a estimé le secrétaire général adjoint d'Alliance, Benoît Baret, sur BFM. Pour cela, il conviendrait de rapprocher la police et la justice, s'accordent les représentants des policiers. "Une police du quotidien veut dire une justice du quotidien. Sinon ça ne marchera pas", a indiqué Philippe Capon, de l'Unsa, regrettant que les affaires mettaient souvent plus d'un an a être jugées. Pour autant, ce volet répression ne doit pas donner lieu à une nouvelle politique du chiffre. "Il me semble que Gérard Collomb ait bien pris cela en compte", a ajouté Philippe Capon. D'autant que les représentants des policiers s'interrogent sur la manière de mettre en place cette mesure, et surtout avec quels effectifs, alors que 10.000 postes doivent être créés sur le quinquennat. "On ne sait pas si ces postes en feront partie, il faut des clarifications", a réclamé Philippe Capon. Le secrétaire général de l'Unsa plaide pour une expérimentation de six mois dans des territoires ciblés. "Si on veut la lancer de manière généralisée d'ici au premier janvier 2018, ça sera un échec", conclut-il. (Cyril Camu, édité par Yves Clarisse)