Les kamikazes d'Istanbul sont russe, ouzbek et kirghize

par Humeyra Pamuk et Daren Butler ISTANBUL (Reuters) - Les trois kamikazes soupçonnés de faire partie de l'Etat islamique qui ont tué 43 personnes mardi soir à l'aéroport d'Istanbul sont de nationalité russe, ouzbek et kirghize, a annoncé jeudi un responsable du gouvernement turc. L'attentat n'a pas été revendiqué mais les preuves réunies pour l'instant vont dans le sens d'une responsabilité de l'organisation djihadiste, a déclaré jeudi le ministre turc de l'Intérieur Efkan Ala devant le Parlement. Il a également annoncé que le bilan du triple attentat s'était alourdi à 43 morts, parmi lesquels figurent 19 étrangers. Les trois kamikazes ont ouvert le feu pour créer un mouvement de panique à l'extérieur de l'aéroport international, puis deux d'entre eux sont entrés dans le bâtiment du terminal et se sont fait exploser. Le troisième a actionné ses explosifs à l'entrée. Au total, 239 personnes ont été blessées. Le responsable qui a confirmé la nationalité des attaquants n'a pas donné d'autre précision. Il a requis l'anonymat dans la mesure où les conclusions de l'enquête n'ont pas encore été publiées. Il a été difficile d'identifier formellement les auteurs en raison de l'éparpillement des morceaux de corps, avaient auparavant fait savoir les autorités. "Une équipe médicale travaille 24 heures sur 24 pour mener à bien le processus d'identification", a déclaré un responsable. Selon le quotidien pro-gouvernemental Yeni Şafak, le kamikaze russe était originaire du Daghestan, une république de la Fédération russe frontalière de la Tchétchénie, où la Russie post-soviétique a mené deux guerres contre les séparatistes. Les autorités kirghizes et ouzbek n'ont pu être jointes dans l'immédiat. PERQUISITIONS EN SÉRIE Dans le cadre de l'enquête, la police turque a arrêté 13 personnes, dont trois ressortissants étrangers, lors de perquisitions menées à Istanbul. Les forces spéciales de la police et les services de lutte contre le terrorisme ont lancé simultanément des perquisitions dans 16 lieux de la ville, ont indiqué deux responsables à Reuters. Neuf activistes présumés, qui auraient été en contact avec des membres de l'EI en Syrie, ont été interpellés lors de quatre opérations menées à l'aube à Izmir, grand port situé sur la mer Egée, a annoncé l'agence de presse Anatolie. Les personnes arrêtées sont accusées de financement, de recrutement et de soutien logistique en faveur de l'EI. Selon Yeni Şafak, l'organisateur de l'attentat serait un homme du nom d'Akhmed Tchataïev, d'origine tchétchène. Ce nom figure sur une liste de sanctions des Nations unies. Il y est présenté comme un chef de l'EI chargé de la formation des djihadistes russophones et recherché par les autorités russes. Selon le quotidien Hurriyet, l'un des attaquants est Osman Vadinov, tchétchène lui aussi. Il serait revenu de Rakka, "capitale" autoproclamée de l'EI en Syrie. Reuters n'a pu obtenir confirmation que ces deux hommes sont visés par l'enquête. La Turquie, longtemps accusée d'avoir fermé les yeux sur la menace constituée par l'EI, affiche aujourd'hui sa détermination à combattre l'EI. Ankara vient d'ajuster ses règles militaires d'engagement pour permettre à ses alliés de l'Otan d'accroître leurs patrouilles aériennes le long de sa frontière avec la Syrie. Les autorités turques ont également organisé des perquisitions à plusieurs reprises dans des caches présumées de l'EI en Turquie. Ce week-end, l'armée turque a tué deux membres soupçonnés d'appartenance à l'EI qui tentaient d'entrer en Turquie illégalement, ont annoncé jeudi les forces de sécurité. Un des suspects, de nationalité syrienne, aurait préparé un attentat suicide à Ankara ou dans la province d'Adana, où se trouve la base aérienne d'Incirlik, utilisée par les forces américaines et turques, et à partir de laquelle sont menées une partie des frappes de la coalition internationale contre l'EI. (Avec Maria Tsvetkova à Moscou et Olzhas Auyezov à Astana; Pierre Sérisier et Danielle Rouquié pour le service français)