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Les grandes puissances réunies à Munich sur la Syrie

MUNICH (Reuters) - Les grandes puissances ont entamé sans illusions jeudi à Munich de nouvelles discussions pour tenter de faire avancer le processus de paix en Syrie. La Russie s'est déclarée prête à discuter d'un cessez-le-feu à partir du 1er mars prochain, mais selon un responsable occidental, le secrétaire d'Etat américain John Kerry réclame une trêve applicable immédiatement. C'est "tout ou rien", a dit ce responsable. L'opposition syrienne fait savoir quant à elle qu'elle ne peut accepter de cesser les hostilités dans le climat actuel car il lui est impossible de faire confiance aux Russes. "Ce que font la Russie, le régime, l'Iran et les milices sectaires soutenues par l'Iran ne sert pas le processus de paix, c'est plutôt le contraire, cela entrave le processus de paix", a déclaré Riad Hijab, coordinateur du conseil de l'opposition syrienne, soutenu par les occidentaux. La poursuite des bombardements russes sur Alep, la grande ville du nord de la Syrie que l'armée syrienne et ses milices alliées cherche à reprendre totalement à la rébellion, gèle pour l'instant le processus de négociation. Plusieurs membres du Conseil de sécurité de l'Onu, notamment les pays occidentaux, ont appelé mercredi Moscou à mettre fin à ses raids aériens dans la région d'Alep, où couve une nouvelle grave crise humanitaire, rappelant que la résolution 2254 votée par le Conseil de sécurité de l'Onu en décembre prévoyait l'arrêt immédiat des bombardements des zones civiles. Selon le ministère russe de la Défense, cité par l'agence Tass, l'aviation russe a effectué 510 sorties et détruit environ 1.900 cibles en Syrie pendant la semaine écoulée. Le Premier ministre russe, Dmitry Medvedev, a déclaré que toutes les puissances devaient s'assoire à la table des négociations pour trouver une issue au conflit syrien faute de quoi "une nouvelle guerre froide pourrait se déclencher". "Les Américains et nos partenaires Arabes doivent bien réfléchir: veulent-ils une guerre permanente", a-t-il demandé au quotidien Handlesblatt. "Il est impossible de remporter une telle guerre (....). "Tout particulièrement dans le monde arabe où tout le monde se bat contre tout le monde". L'offensive sur Alep a conduit à la suspension, le 3 février, des discussions intersyriennes entamées à Genève sous l'égide des Nations unies. L'émissaire spécial de l'Onu, Staffan de Mistura, espère relancer les négociations le 25 février. D'après l'agence Interfax, le vice-ministre des Affaires étrangères Guennadi Gatilov estime que les négociations de paix pourraient reprendre avant le 25 février. Pour certains commentateurs, la réunion de Munich est capitale pour savoir si le processus diplomatique va se poursuivre à court terme. Mais un haut diplomate occidental ne cache pas son pessimisme: "Cette réunion risque d'être sans fin et je crains que les résultats ne soient extrêmement minces." Dans le même temps, à Bruxelles, les Etats-Unis ont demandé à leurs alliés de la coalition internationale qu'ils dirigent contre l'Etat islamique (EI) d'accélérer la lutte contre l'organisation sunnite fondamentaliste sans tenir compte d'éventuelles avancées sur le plan diplomatique. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de son côté prévenu que la patience d'Ankara à propos du conflit syrien avait des limites et a appelé les Nations unies à agir pour prévenir ce qu'il a qualifié de "nettoyage ethnique" chez son voisin. Quelque 400.000 Syriens ont été tués depuis que la guerre civile a éclaté dans ce pays il y a cinq ans et 70.000 autres sont morts en raison du manque d'eau potable, de nourriture ou de médicaments, écrit jeudi The Guardian, qui cite un rapport du Centre syrien pour la recherche politique, une ONG travaillant notamment avec l'agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR). (John Irish, Suleiman al Khalidi et Shadia Nasralla; Jean-Stéphane Brosse et Nicolas Delame pour le service français)