Les ex-chefs du renseignement américain répliquent à Donald Trump

Deux anciens chefs des services de renseignement américains ont dit craindre dimanche que Donald Trump soit aisément manipulable. /Photo prise le 13 novembre 2017/REUTERS/Jonathan Ernst

par Sarah N. Lynch

WASHINGTON (Reuters) - Deux anciens chefs des services de renseignement américains ont dit craindre dimanche que Donald Trump soit aisément manipulable, au lendemain de propos du président américain jugeant son homologue russe Vladimir Poutine "sincère" quand il affirme que la Russie n'a pas cherché à s'immiscer dans l'élection présidentielle de 2016 aux Etats-Unis.

John Brennan, ancien directeur de la CIA, et James Clapper, ancien chef du Renseignement national, ont estimé que Donald Trump gérait mal les relations avec Moscou alors même que plusieurs enquêtes sont menées sur une possible collusion entre des membres de son équipe de campagne 2016 et la Russie.

"Je pense que M. Trump, pour je ne sais quelle raison, est soit intimidé par M. Poutine, ou a peur de ce qu'il pourrait faire, ou de ce qui pourrait sortir comme résultat de ces investigations (...). Ce que M. Trump fait vis-à-vis des Russes est soit de la naïveté, soit de l'ignorance, soit de la peur", a dit John Brennan dans l'émission "State of the Union" sur CNN.

James Clapper, invité dans la même émission, a ajouté que les dirigeants qui déroulent le tapis rouge pour Donald Trump étaient en mesure de manipuler le président américain.

"Je suis convaincu que les Chinois comme les Russes pensent pouvoir le manipuler", a-t-il déclaré.

Le secrétaire au Trésor Steve Mnuchin, qui participait lui aussi à "State of the Union", a jugé ces allégations "ridicules". "Le président Trump n'est manipulé par personne", a-t-il dit.

"UN PÉRIL POUR LE PAYS"

Donald Trump s'est brièvement entretenu samedi avec Vladimir Poutine en marge du sommet du Forum de coopération économique Asie-Pacifique (Apec).

"Chaque fois qu'il me voit, il me dit qu'il n'a pas fait ça, et je crois vraiment qu'il est sincère", a dit ensuite le président américain aux journalistes l'accompagnant dans sa tournée en Asie. "Je pense qu'il se sent très offensé par ça, ce qui n'est pas une bonne affaire pour notre pays", a-t-il ajouté.

A bord d'Air Force One, Donald Trump s'en est également pris vivement à Brennan, Clapper et l'ex-directeur du FBI James Comey, tous nommés sous la présidence de son prédécesseur Barack Obama, en les traitant de "bureaucrates politiques" et en dénigrant le rapport des agences de renseignement américaines, rendu public en janvier dernier avant son investiture, qui concluait à une ingérence de Moscou.

Plusieurs personnalités politiques américaines se sont émues que Trump accorde plus de crédit au président russe qu'à ses propres agences du renseignement.

A Hanoï, étape suivante de sa tournée, Donald Trump a en partie tempéré ses propos en déclarant avoir confiance dans les dirigeants des services de renseignement qu'il a nommés.

Sur CNN, John Brennan a estimé que les critiques émises par Trump à son égard étaient un "insigne de fierté". Quant à James Clapper, il a laissé entendre que le déni par Trump d'une quelconque ingérence russe représentait "un péril pour le pays".

En réponse à une question de la chaîne, John Brennan a refusé de dire s'il avait connaissance d'informations suggérant que les Russes sont en possession d'informations compromettantes sur Donald Trump.

Un dossier rédigé par un ancien espion britannique contient des allégations non vérifiées selon lesquelles la Russie possède des informations embarrassantes pour le président américain.

(Jean-Stéphane Brosse pour le service français)