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Les dirigeants européens célèbrent à Rome une union fragilisée

Les dirigeants européens se sont réunis samedi à Rome pour célébrer le soixantième anniversaire du traité fondateur de l'Union et tenter de relancer une dynamique fragilisée par le Brexit et par le regain nationaliste perceptible sur le Vieux continent. /Photo prise le 25 mars 2017/REUTERS/Remo Casilli

par Jan Strupczewski et Alastair Macdonald ROME (Reuters) - Les Européens doivent enterrer leurs querelles et leurs chicaneries s'ils veulent préserver l'Union européenne, ont prévenu samedi ses 27 dirigeants réunis à Rome pour le 60e anniversaire du Traité fondateur du bloc communautaire. A quatre jours du déclenchement par la Première ministre britannique, Theresa May, de la procédure de sortie du Royaume-Uni de l'UE, ils ont signé la Déclaration de Rome, par laquelle ils espèrent donner un nouveau souffle à un projet fragilisé par le Brexit et un regain nationaliste et eurosceptique. "Cette cérémonie avait un sens particulier par rapport aux défis et aux menaces que nous avons devant nous", a déclaré à des journalistes, en marge du sommet, François Hollande, qui a cité notamment le terrorisme, le nationalisme et l'extrémisme. "Oui, nous sommes décidés à être plus fort ensemble", a ajouté le président français. Les difficultés rencontrées pour rédiger ce document de trois pages et les dizaines de milliers de manifestants réunis derrière un imposant cordon de sécurité sont toutefois venues rappeler que les obstacles restent nombreux. "Nous avons marqué un coup d'arrêt et cela a provoqué un rejet de l'opinion publique", a déclaré le président du Conseil italien, Paolo Gentiloni. Le chef de l'exécutif italien a déploré que les difficultés économiques de ces dernières années sur le Vieux continent aient paralysé le projet européen et nourri la montée du nationalisme. Selon lui, la Déclaration de Rome offre un nouveau départ. "L'Union repart", a-t-il déclaré. "Et elle a une vision pour les dix prochaines années." La chancelière allemande Angela Merkel a reconnu que l'UE devait répondre aux demandes des nouvelles générations pour lesquelles la Seconde Guerre mondiale appartient à l'Histoire. "Nous devrons à l'avenir nous préoccuper en priorité de la question de l'emploi", a-t-elle dit. La chef du gouvernement allemand a rappelé la nécessité de répondre aux préoccupations des Européens concernant l'économie, la protection sociale, l'immigration et la défense en proposant une "Eruope protectrice". Cet enthousiasme n'était pas partagé par tous, de nombreux dirigeants refusant de poursuivre sur la voie de l'abandon de pans de souveraineté, tandis que d'autres ont, au contraire, plaidé en faveur d'une accélération de l'intégration. La Pologne a mené la fronde contre l'idée d'une "Europe à plusieurs vitesses" redoutant que les anciens pays communistes d'Europe de l'Est soient "laissés sur le bord du chemin. "AVENIR COMMUN" Des dirigeants ont profité de la commémoration pour saluer leurs prédécesseurs, qui ont su dépasser les clivages de la Seconde Guerre mondiale pour signer le 27 mars 1957 le Traité de Rome, point de départ du projet européen. Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker a invoqué le souvenir de son père, incorporé de force dans l'armée allemande. Le président du Conseil européen, Donald Tusk, s'est remémoré sa jeunesse dans une Pologne située de l'autre côté du Rideau de fer et une Europe coupée en deux. "Ça, c'était une véritable Europe à deux vitesse", a-t-il déclaré, visant implicitement le gouvernement polonais, qui a tenté d'empêcher les pays d'Europe de l'Ouest d'appuyer leur projet en faveur d'une intégration plus poussée. "Aujourd'hui, nous renouvelons nos voeux et réaffirmons nos engagements en faveur d'une Union une et indivisible", a dit Jean-Claude Juncker. "Pourquoi perdre aujourd'hui confiance dans le projet de l'unité ? Est-ce parce qu'il est devenu réalité ? Ou parce que nous nous en sommes lassés ?" a pour sa part demandé Donald Tusk. "L'Europe en tant qu'entité politique sera unie ou ne sera pas. L'unité de l'Europe n'est pas un modèle bureaucratique, c'est un socle de valeurs communes et de normes démocratiques." Dans sa conclusion, la Déclaration de Rome proclame : "Nous, dirigeants qui coopérons au sein du Conseil européen et de nos institutions, ferons en sorte que le programme défini aujourd'hui soit mis en oeuvre pour qu'il devienne réalité demain. Notre chance, c'est d'être unis. L'Europe est notre avenir commun." Du côté des détracteurs de l'Union, Giorgia Meloni, chef de file du mouvement d'extrême droite Fratelli d'Italia, a pour sa part dénoncé "la grande déception de l'UE" et a plaidé en faveur d'une nouvelle alliance "de pays libres et souverains". (Avec Isla Binnie, Nicolas Delame pour le service français, édité par Emmanuel Jarry)