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Les alliés arabes de Washington perdent patience

Quartier de Katarji à Alep. L'effondrement du dernier cessez-le-feu en date en Syrie renforce la possibilité que les Etats du Golfe fournissent la rébellion en missiles sol-air portables pour se défendre contre les avions du régime syrien et de son allié russe. /Photo prise le 25 septembre 2016/REUTERS/Abdalrhman Ismail

par Jonathan Landay et Arshad Mohammed WASHINGTON (Reuters) - L'effondrement du dernier cessez-le-feu en date en Syrie renforce la possibilité que les Etats du Golfe fournissent la rébellion en missiles sol-air portables pour se défendre contre les avions du régime syrien et de son allié russe, disent des responsables américains. Washington continue cependant à maintenir que les négociations sont la seule voie pour mettre fin au carnage, ajoutent-ils. L'un de ces responsables, s'exprimant sous le sceau de l'anonymat, a souligné que les Etats-Unis avaient jusqu'ici empêché un grand nombre de ces missiles anti-aériens tirés à l'épaule, connus sous le nom de MANPADS, d'être acheminés en Syrie tout en poursuivant leurs négociations avec Moscou. Mais la frustration envers Washington grandit au point que les Etats du Golfe ou la Turquie pourraient cesser de suivre la politique américaine, ou fermer les yeux sur la fourniture de MANPADS à des groupes rebelles par de riches particuliers. "Les Saoudiens ont toujours pensé que la manière de faire reculer les Russes est celle qui a fonctionné il y a trente ans en Afghanistan: les priver de puissance aérienne en donnant des MANPADS aux moudjahidine", explique-t-on. "Jusqu'ici, nous avons réussi à les convaincre que les risques étaient bien plus grands aujourd'hui parce qu'on n'a plus affaire à une Union soviétique sur le déclin mais à un dirigeant russe attaché à reconstruire la puissance de la Russie et moins disposé à reculer", ajoute-t-on, par allusion au président Vladimir Poutine. LE DROIT DE SE DÉFENDRE Prié de dire si les Etats-Unis seraient prêts à faire tout leur possible, au-delà des négociations, pour faire cesser le bain de sang en Syrie, le porte-parole du département d'Etat Mark Toner a souligné que Washington ne souhaitait pas que de nouvelles armes soient apportées sur le champ de bataille. "La conséquence ne serait qu'une escalade dans un conflit déjà terrifiant", a-t-il dit. "Les choses pourraient s'aggraver encore davantage." Mais un autre responsable de l'administration a jugé que l'opposition syrienne était "en droit de se défendre et ne peut pas être laissée sans défense face à ces bombardements aveugles". Il a rappelé que les alliés et partenaires des Etats-Unis avaient été impliqués dans les négociations russo-américaines pour trouver une solution au conflit. "Je ne crois pas qu'ils prendront à la légère le genre d'affront auxquels nous avons assisté au cours des 72 dernières heures", a déclaré ce responsable sans vouloir préciser "la capacité spécifique qui pourrait être ajoutée au conflit". Les détracteurs de Barack Obama, qui cherche à éviter d'impliquer son pays dans un nouveau conflit au Moyen-Orient, estiment que la diplomatie américaine est paralysée par les réticences de la Maison blanche à recourir à la force. "Poutine et (le président syrien Bachar al) Assad ne feront pas ce qu'on leur demande par bonté de coeur, ni parce qu'ils se préoccupent de nos intérêts ou de la souffrance des autres. Ils doivent être contraints, et cela nécessite de la force", ont estimé les sénateurs républicains John McCain et Lindsey Graham dans un communiqué. "Tant que les Etats-Unis ne seront pas prêts à prendre des mesures pour modifier la situation sur le terrain, la guerre, la terreur, les réfugiés et l'instabilité perdureront." (Jean-Stéphane Brosse pour le service français)